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Rangiroa : le dentiste escroc à la CPS soupçonné de mutilation sur ses patients


Le dentiste "indélicat", prévenu de la tenue de l'audience du conseil de l'ordre aujourd'hui, n'a pas jugé bon de se déplacer.
Le dentiste "indélicat", prévenu de la tenue de l'audience du conseil de l'ordre aujourd'hui, n'a pas jugé bon de se déplacer.
PAPEETE, le 7 juin 2016 - Les ennuis s'accumulent contre ce praticien de Rangiroa, déjà mis à mal en mai dernier par une enquête de gendarmerie dans le cadre d'une vaste fraude déclarative au préjudice de la CPS. Cette fois, les accusations sont portées devant le conseil de l'ordre par des patients qui estiment avoir été victimes d'un "arracheur de dents".

Après les gendarmes en fin d'année dernière (lire ci-dessous), c'est le conseil de l'ordre des chirurgiens-dentistes de la Polynésie française qui s'intéresse désormais au cas de leur confrère installé à Rangiroa. La chambre disciplinaire de première instance de l'ordre s'est en effet réunie ce mardi, saisie de trois plaintes pour "infraction aux dispositions réglementaires de déontologie". L'une d'entre elle est portée par le conseil de l'ordre en tant que tel, représenté par son président Denis Meslin, la deuxième par une dentiste du dispensaire de Rangiroa et la dernière par un patient qui estime avoir été mutilé par le chirurgien-dentiste.

"Mon client a perdu deux molaires à cause d'un abcès alors qu'il venait au départ pour un problème d'incisive fêlée, il a fallu cinq séances avec un second dentiste pour tout reprendre" confie son avocate, Me Eftimie-Spitz, interrogée par Tahiti-Infos. "On parle aussi de dévitalisation incomplète, il ne prescrivait jamais d'antidouleur, mon client s'est soulagé avec du Doliprane. Aujourd'hui il ne peut plus mastiquer ni sourire". D'autres plaintes "plus graves encore" pour reprendre les mots du président du conseil de l'ordre, sont en cours de transmission.

"Conditions d'hygiène douteuses"

Le spectre des accusations portées contre le dentiste de Rangiroa auprès du président du conseil de l'ordre est large : "mauvaise qualité des soins et dommages subis par les patients", "conditions d'hygiène douteuses", "insulte à la clientèle" et même "exercice de l'activité en état d'ébriété", "absence de matériel radio", "facturation de soins inexistants" a-t-on pu entendre pêle-mêle aujourd'hui à l'audience. Le dentiste indélicat, lui, n'a pas fait le déplacement pour se défendre. Selon nos informations, il a d'ailleurs fermé son cabinet et quitté Rangiroa dans le courant de la semaine dernière sans aucune autre forme d'explication. "Il n'a prévenu ni la population, ni le conseil de l'ordre, cela pose un gros problème en particulier dans les îles" a souligné le président du conseil de l'ordre à la chambre disciplinaire rappelant que son confrère ne s'était jamais présenté aux tentatives de réconciliation, pas plus qu'il n'avait répondu aux mises en demeure consécutives aux plaintes déposées contre lui.

Le conseil de l'ordre qui, enfin, a indiqué n'avoir trouvé aucune trace des diplômes universitaires dont le chirurgien-dentiste se revendiquait pourtant auprès de sa clientèle. Selon nos informations, le praticien avait déjà fait l'objet d'une suspension de ses diplômes en 1980 alors qu'il exerçait à Raiatea. L'audience de la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre à laquelle le chirurgien-dentiste ne s'est pas présenté ce matin était une audience dite d'acquiescement : en clair, le conseil de l'ordre considère les accusations avérées et devrait maintenant se prononcer rapidement sur la nature de la sanction. Qui peut aller jusqu'à la radiation avant, éventuellement, de rebondir du côté de la justice pénale.


Convoqué au tribunal en octobre pour l'escroquerie

Le chirurgien-dentiste de Rangiroa avait déjà fait parler de lui il y a peu, le 27 mai dernier, suite à une communication de la gendarmerie qui se félicitait d'avoir mis fin à une vaste escroquerie au préjudice de la CPS. Après quelques mois d'une enquête ouverte en octobre 2015 pour des soupçons de travail dissimulé, les militaires s'étaient rendu compte que le docteur surfacturait des soins ou encore multipliait les fausses factures pour des faux actes afin de tromper la caisse. Le préjudice subi par la caisse de prévoyance sociale a pu être estimé à environ 20 millions de francs pacifiques dans ce pan du dossier qui a valu au dentiste une garde à vue suivie d'une notification à comparaître le 11 octobre prochain devant le tribunal correctionnel pour escroquerie.

Rédigé par Raphaël Pierre le Mardi 7 Juin 2016 à 18:01 | Lu 10198 fois