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Le combat des apiculteurs contre les maladies


Pour le moment, le miel de Huahine peut être importé à Tahiti. Les apiculteurs souhaitent que cela ne soit plus possible.
Pour le moment, le miel de Huahine peut être importé à Tahiti. Les apiculteurs souhaitent que cela ne soit plus possible.
PAPEETE, le 26 mars 2015. Le syndicat des apiculteurs de Polynésie française s'inquiète d'une possible contamination des ruches de Tahiti et Moorea par des produits venant de Huahine. La loque américaine a une nouvelle fois été détectée à Huahine. Il demande qu'aucun produit ne puisse être importé depuis l'île.


La loque américaine est une maladie qui touche le couvain, c'est-à-dire les œufs, les larves et les nymphes). Très contagieuse, elle peut provoquer une diminution de la productivité et faire dépérir toute la colonie d'abeilles. La maladie est donc dangereuse pour la ruche si elle n'est pas traitée. Pour l'éradiquer les apiculteurs n'ont pas d'autre choix que de faire brûler leurs cadres et leurs abeilles et de tout désinfecter.

Un plan a été lancé à Tubuai, île largement infectée, en octobre dernier par le gouvernement. Après une destruction totale des ruches, il s'agit d'en reconstituer de nouvelles saines. Mais Tubuai n'est pas la seule île concernée par la loque américaine. Une enquête entre 2009 et 2011 avait montré qu'un apiculteur de Huahine avait été touché par la loque américaine. En 2010, l'île est officiellement déclarée comme infestée par la loque américaine. Un nouveau cas a été identifié en décembre dernier par le Service du développement rural.

Les îles de Tahiti et Moorea avaient elles déjà été déclarées infestées par la loque américaine en octobre 2000. Ce statut « d'île infestée » autorise le transport entre Huahine, Tahiti et Moorea d'abeilles et de tous produits issus de l'apiculture (miel, gelée royale, pollen, cire d'abeille...).


Des larves mortes retrouvées à Tahiti en 1986

Or, les recherches faites entre 2009 et 2011 n'ont pas montré de résultats positifs à la loque américaine sur Tahiti et Moorea. Mais il y a 29 ans, des larves mortes avaient été retrouvées et des apiculteurs se sont montrés « récalcitrants » lors de la dernière enquête. Les autorités ont donc préféré laisser les deux îles avec leur statut « d'île infestée ».
Le syndicat des apiculteurs souhaite qu'il n'y ait plus d'importations de produits issus de l'apiculture venant de Huahine. Le Service de développement rural (SDR) prévoit de réaliser de nouveaux tests pour lever le statut d'infection de Tahiti afin que les produits venant de Huahine ne puissent plus être placés dans les rayons.

Raiarii Crawford, président du syndicat des apiculteurs de Polynésie française, est inquiet pour l'avenir de la filière. On estime à environ 250 le nombre d'apiculteurs aujourd'hui. « L'apiculture apparaît comme une nouvelle niche. Tout le monde se lance et fait n'importe quoi », regrette-t-il. « Quand il y a des maladies dans une ruche, une grande connaissance est demandée. On sait comment il faut agir ». Ce passionné craint que la filière connaisse le même sort que la perliculture.


L'arrivée du varroa inquiète


Plus que la présence de la loque américaine, l'arrivée possible du varroa inquiète encore plus les apiculteurs professionnels. Le varroa est un acarien parasite de l'abeille adulte ainsi que des larves et des nymphes. Il provoque des pertes économiques importantes en apiculture et il est une des causes de la diminution du nombre d'abeilles sur la planète. Ayant colonisé quasiment toutes les zones où l'abeille Apis mellifera est présente, le varroa est désormais un problème d'ordre mondial. « Nous ne sommes pas prêts pour le varroa », prévient Raiarii Crawford. « La loque, ce n'est rien comparé au varroa. Celui-ci décime les colonies. »

Préserver les ruches polynésiennes est un enjeu économique à l'échelle locale mais aussi internationale. Limiter la propagation de la loque américaine permet de protéger la production locale de miel et d'assurer la pollinisation des productions agricoles de cette île. Il est important de venir à bout de tous les foyers de loque américaine à Tubuai pour ne faire courir un risque à l'ensemble du rucher de la Polynésie française

Un statut indemne de cette maladie pour l'ensemble de la Polynésie constituerait en effet un argument commercial de poids pour l'élevage et la commercialisation de reines d'abeilles à l'international.











Tubuai : plan de lutte contre la loque américaine

En octobre dernier, le ministre du Développement des activités du secteur primaire, Frédéric Riveta, a annoncé le lancement d'un plan de lutte contre la loque américaine qui affecte les abeilles de l'île de Tubuai. Ce plan ne laisse aucune chance aux foyers de loque américaine de survivre.

La première phase d'assainissement vise à diminuer la pression d'infection et à limiter les risques d'hybridation des abeilles. Elle implique la destruction des foyers actifs de loque américaine et l'élimination de colonies, y compris les essaims sauvages.

La seconde phase prévoit le repeuplement de l'île par des colonies saines et testées pour leur comportement hygiénique. Le but est de compenser la perte liée à la destruction des colonies pendant la phase d'assainissement, d'indemniser les propriétaires de ruches grâce à une prise en charge des dépenses liées au repeuplement.

Pas de transmission à l'homme

La loque américaine est une maladie infectieuse et contagieuse du couvain operculé de l'abeille, provoqué par la bactérie paenibacillus larvae. Cette maladie hautement contagieuse contient des spores de paenibacillus larvae extrêmement résistants. Les larves d'abeilles sont infectées par voie orale et les spores. Les jeunes colonies se développent pendant un an ou deux puis le couvain est attaqué, noirci et pourri, tuant ou essaimant ainsi la colonie.

La loque américaine n'est pas transmissible à l'homme. Elle se transmet aux autres ruchers par le biais de plusieurs vecteurs :

- les abeilles elles-mêmes, soit par pillage d'une ruche, soit par transfert d'un rucher à un autre ;
- le matériel apicole qui, s'il n'est pas désinfecté, peut contenir des formes de résistance de la bactérie ;
- les produits issus de l'apiculture tels que le miel, la gelée royale et la cire, qui eux aussi peuvent contenir ces formes de résistance.

Rédigé par Mélanie Thomas le Jeudi 26 Mars 2015 à 13:31 | Lu 2852 fois