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​Une mule d’Alfonsi se dit victime du "syndrome de Stockholm"


Tahiti, le 5 octobre 2020 - Au sixième jour du procès de l’affaire Sarah Nui, l’une des mules du trafic, Baptiste Pousset, a témoigné à la barre de ses visites à Tamatoa Alfonsi lorsque ce dernier résidait à Tijuana. L’homme a également expliqué au tribunal qu’il avait souvent été violenté par ce dernier et qu’il s’était senti victime du "syndrome de Stockholm". 
 

L’étau se resserre autour de Tamatoa Alfonsi. Au début de la deuxième semaine de procès consacrée à l’affaire Sarah Nui lundi, le tribunal a entendu plusieurs mules de ce réseau qui avait permis, entre janvier 2017 et août 2018, l’importation et l’écoulement sur le territoire de 40 kilos de méthamphétamine. Mais l’audition la plus intéressante de la journée aura certainement été celle de Baptiste Pousset. Poursuivi pour avoir fait office de mule à trois reprises au moins, et pour avoir envoyé l’argent issu du trafic à Tamatoa Alfonsi au Mexique, l’homme de 32 ans a expliqué au tribunal comment l’un des deux boss du réseau organisait le trafic du Mexique. 
 
Pour Baptiste Pousset, tout avait commencé à l’adolescence. En rupture familiale, le jeune homme s’était rapproché de Tamatoa Alfonsi, de dix ans plus âgé que lui, et de ses amis. Entre surf et trafics de stupéfiants, il avait été heureux de se sentir associé à ce qu’il appelle encore aujourd’hui la "dream team". Après avoir frayé avec Alfonsi, pour lequel il faisait notamment le ménage, Baptiste Pousset avait décidé de se reprendre en main et d’intégrer la marine nationale. Sous-marinier à Brest, il avait, selon ses déclarations, entretenu une relation avec une femme rencontrée sur un site de rencontres qui lui avait fait un enfant dans le dos. Condamné pour des violences exercées sur cette même femme, Baptiste Pousset avait été contraint de quitter la marine et de revenir. "C’était un peu la loose de tous les côtés à ce moment-là !" a commenté le président du tribunal à l’évocation de ce parcours lors de l’audience lundi.
 

Recrutement de mules à Tijuana

De retour à Tahiti, Baptiste Pousset, "sûr" de "retomber dans la délinquance", était devenu sans domicile fixe, allant même jusqu’à se prostituer. "Tombé au fond", il avait accepté de prendre part au trafic pour Tamatoa Alfonsi et l’avait rejoint à Tijuana où il était redevenu son "larbin". "Il me disait que j’étais son esclave à vie, il me donnait des coups sans raison". Question du président : "Mais pourtant, vous y êtes retourné…" Réponse de l’intéressé : "C’est le syndrome de Stockholm. Je ne sais pas si je suis schizophrène mais ça me semblait cohérent à l’époque". 
 
À Tijuana, le "larbin" semblait si "insignifiant" aux yeux d’Alfonsi et de ses amis que ces derniers parlaient librement devant lui. Un témoignage précieux pour comprendre comment Tamatoa Alfonsi fonctionnait au Mexique. Et tel que Baptiste Pousset l’a réaffirmé à la barre du tribunal correctionnel, le multirécidiviste était bien organisé. Dans les chambres de motels "pas classes" dans lesquelles il vivait, Tamatoa Alfonsi recevait des mules potentielles, des "jeunes", des "couples" et même des "vieux". Il avait "plusieurs rendez-vous par jour" qui étaient destinés à "évaluer" ces gens. Il avait un "garde du corps mexicain" et se montrait souvent violent. 
 
Au-delà du fantasme du cartel mexicain qui ne semble pas déplaire aux prévenus, qui lisent tous les matins les comptes rendus de la presse dans les journaux, il semble surtout que ce soit l’enrichissement personnel et les envies de vivre "comme dans un film" qui aient motivé les principaux mis en cause du dossier. Et le tribunal a relevé à plusieurs reprises depuis le début du procès que, si Tamatoa Alfonsi avait fait "un peu n’importe quoi" en s’affichant notamment sur les réseaux sociaux avec des armes, Maitai Danielson, qui nie son implication, s’était montré beaucoup plus "discret" et "prudent". Les deux hommes seront entendus mardi matin. 
 

Rédigé par Garance Colbert le Lundi 5 Octobre 2020 à 17:43 | Lu 4079 fois