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Vanille de Tahiti : quand l’or noir prend son essor


La semaine dernière le ministre de l’agriculture Thomas Moutame était à Raiatea pour rencontrer des vanilliculteurs et s’assurer que le plan de relance de la filière allait dans le bon sens : il a assuré que les premiers résultats étaient très prometteurs.
La semaine dernière le ministre de l’agriculture Thomas Moutame était à Raiatea pour rencontrer des vanilliculteurs et s’assurer que le plan de relance de la filière allait dans le bon sens : il a assuré que les premiers résultats étaient très prometteurs.
La vanille de Tahiti est un produit qui s’exporte de mieux en mieux et dont le prix progresse. Au point que ce produit commence à peser sérieusement dans la balance commerciale du pays. Mais cette progression pourrait ne pas être durable en raison d’une régénération trop tardive des plants. Zoom sur une petite liane qui vaut son pesant d’or.

Le dernier rapport mensuel du commerce extérieur publié par l’ISPF (Institut de la statistique de Polynésie française), celui d’avril 2014, contenait une petite pépite passée inaperçue dans la floraison des chiffres analysés. Entre avril 2013 et avril 2014, les recettes à l’export de la vanille ont quasiment doublé en un an, précisément + 82% ce n’est pas rien. Cette envolée est le résultat d’une hausse conjointe des volumes exportés et des prix internationaux. La vanille de Tahiti est ainsi en train de gagner de nouveaux marchés à l’international, même si son rayonnement mondial est encore limité à quelques pays initiés à la qualité de son arôme. En 2013, dans la balance du commerce extérieur du Pays la vanille pesait pour 316 millions de Fcfp pour à peine 17 tonnes de produit vendus sur le marché extérieur.

C’est encore peu, mais la progression de la vanille comme produit d’exportation est quasi continue depuis 2008. Une évolution positive qui bénéficie d’un prix en hausse : en 2013 le kilo de vanille est vendu en moyenne 18 000 Fcfp (3 % de mieux qu’en 2012). De plus la vanille de Tahiti conquiert de nouveaux marchés et progresse là où elle est implantée depuis longtemps. L’an dernier, le marché français a absorbé 17% d’exportations de plus que l’année précédente. La France reçoit ainsi la moitié de la production destinée à l’export de la vanille de Tahiti.

Objectif : 100 tonnes en 2016

Mais la mutation la plus importante est à venir pour la vanille de Tahiti et commence dans les ombrières de Polynésie française. Pour exporter plus, il faut produire plus et c’est là que les problèmes commencent. La production de vanille de Tahiti a pris son essor il y a une dizaine d’années, grâce à la création de l’EPIC Vanille et aux aides financières que l’établissement a pu fournir à ceux qui voulaient tenter cette aventure. Dix ans plus tard, le bilan est un peu amer.

Faute de suivi dans la filière, certains producteurs ont laissé tomber les ombrières à peine quelques années plus tard. «La production ne commence qu’à payer au bout de 4 ou 5 ans et les banques, elles, attendent un remboursement sur les investissements dès la 3e année. Certains producteurs n’ont pas pu passer ces années difficiles. Aussi, beaucoup d’ombrières sont vides désormais» remarque Francky Tauatiti un vanilliculteur de Raiatea.

Quant au plan de relance mis en place par le ministère de l’agriculture depuis août 2013 pour une régénération des plants (nécessaire chaque 8-10 ans), il arrive un peu tard et risque de ne pas réussir à atteindre son objectif de 100 tonnes de production en 2016. Le ministère a pourtant sorti les gros moyens : une subvention de 61,2 millions Fcfp octroyée à l’Etablissement Vanille de Tahiti pour le financement de nouvelles ombrières, qui seront livrées, montées et plantées (deux hectares d’ombrières supplémentaires au total). Ce qui ne change rien à l’essentiel : la vanille a besoin de temps pour produire. Trois ans au minimum sont nécessaires, à moins que l’on ne mette en œuvre des techniques d’accélération de sa maturation naturelle, au risque de détériorer la qualité de ce qui est présenté comme un produit de luxe.

Francky Tauatiti, producteur à Raiatea

C’est sans doute la plus grande culture de vanille sous ombrières de Polynésie française. La ferme agricole Hotu Vanilla est située à Raiatea, dans la baie de Faaroa et cultive la vanille sur 8 000m2 d’ombrières. C’est une entreprise familiale. «Nos parents ont démarré la culture de la vanille lorsqu’ils ont été en retraite et avec la volonté de laisser quelque chose à leurs enfants» précise Francky Tauatiti, le gérant de la société qui travaille désormais à 100% sur l’exploitation familiale pour commercialiser la production.

«C’était un projet ambitieux de nos parents. Les premières années ont été difficiles et il a fallu tenir face aux banques en prenant sur des fonds personnels». Désormais Hotu Vanilla exporte en grandes quantités notamment en France grâce à un partenaire en métropole où un stock est assuré en permanence pour des livraisons plus rapides. La société a également créé en 2010 sa plateforme de vente en ligne avec un site Internet dédié (www.hotu-vanilla.pf). Les expéditions peuvent être faites directement depuis Raiatea pour les clients pointilleux qui veulent s’assurer du tampon de la poste de Tahiti, garant de l’authenticité du produit. Prochaine étape pour la société : après les gousses de vanille, la transformation de la vanille et la commercialisation de produits dérivés.

L’appellation Vanille de Tahiti en chantier depuis deux ans

Il y a deux semaines, le ministère de l’agriculture annonçait qu’avec l’arrivée de nouveaux producteurs de vanilla tahitiensis, (Papouasie Nouvelle Guinée ou dans le sud-est asiatique), il devient plus que nécessaire d’assurer la protection juridique de la Vanille de Tahiti. Le projet est pourtant ancien. Déjà en 2012, l’EPIC Vanille assurait que cette appellation était en chantier. L’enquête avec la publication officielle des dispositions à respecter, établies en concertation avec les producteurs, le service du développement rural, la DGAE et l’EPIC, a été finalisée en août 2012 et attendait depuis lors ! Cette reconnaissance polynésienne est néanmoins l’étape préalable au dépôt d’une demande de reconnaissance d’une appellation d’origine contrôlée (AOC) en métropole. Une extension à l’ensemble du territoire européen pourra ensuite être sollicitée pour une appellation d’origine protégée (AOP). En parallèle, un dépôt de marque collective française et internationale sera effectué.

Rédigé par Mireille Loubet le Mardi 1 Juillet 2014 à 17:43 | Lu 3435 fois