Tahiti Infos

Un moustique stérile pour lutter contre la dengue, le zika et le chikungunya


Hervé Bossin.
Hervé Bossin.
PAPEETE, le 25 janvier 2017 - Ces maladies seraient-elles amenées à disparaître? C'est en tout cas ce que souhaite ardemment une équipe de chercheurs de l'Institut Louis Malardé (ILM). Depuis 2010, ils expérimentent un programme de stérilisation de moustiques, destiné à réduire la population d'Aedes polynesiensis.

Mission accomplie. Dans son bureau de Paea, le docteur Hervé Bossin, chercheur à l'Institut Louis Malardé se réjouit. Après plusieurs tests à petite échelle réalisés ces dernières années, le laboratoire d'entomologie médicale de l'Institut Louis Malardé a lancé en septembre 2015 une vaste expérience de lâcher de moustiques mâles rendus incompatibles à la reproduction sur l'un des motu de Tetiaroa. "Il est impossible de stopper une épidémie quand elle a commencé, explique Hervé Bossin. Nous avons donc travaillé sur la manière de prévenir le phénomène. Nous avons travaillé en amont du problème afin d'essayer de réduire les risques de transmission de la maladie."

Lire ici >>> Des mâles stériles pour anéantir le moustique Aedes polynesiensis

Pendant près d'un an, l’équipe de l’ILM a élevé des moustiques porteurs d’une souche différente de Wolbachia, une petite bactérie symbiotique très commune dans le monde des insectes. 50 à 100 000 de ces moustiques mâles ont été lâchés chaque semaine sur le motu Onetahi de Tetiaroa. En à peine 4 mois, la population de moustique Aedes polynesiensis s'est effondrée. 13 mois plus tard, elle a été réduite à près de 100 %. Cette expérience a permis de réduire la nuisance liée aux moustiques mais surtout, d'éviter la propagation des maladies.

Financée par le contrat de projets, l'expérience, qui a reçu l'appui logistique de la société Pacific BeachComber, l’hôtel The Brando et l’association Tetiaroa Society, a démontré l'efficacité du procédé. "Nous sommes actuellement en surveillance post-traitement afin de mesurer l’impact à plus long terme", ajoute Hervé Bossin.

Le chercheur aimerait étendre ce procédé à d'autres îles de la Polynésie. Pour ce faire il convient désormais d’appliquer ce procédé de la façon la plus économique possible. A l’instar de ce qui se fait dans d’autres pays, il espère que, un jour, des lâchers de moustiques se feront à l'échelle d'îles comme Bora Bora et Tahiti. "Afin de protéger au mieux la population contre ces maladies, des réunions d'information et de concertation seront organisées, ajoute Hervé Bossin. La lutte anti-vectorielle étant une compétence partagée entre le Pays et les communes, nous avons hâte de pouvoir travailler avec l’ensemble des acteurs. La population pourra, elle aussi, réellement s'impliquer dans ce type d'opération. Ce sera une approche communautaire, par exemple, les gens pourront contribuer à lâcher des moustiques mâles chez eux."

Et ici >>> L'expérience des moustiques stériles à Tetiaroa est concluante

Pour que ce programme soit conduit sur une île comme Tahiti, là où la population est plus importante, il faudra une préparation minutieuse et une capacité de production adaptée à la taille de l’île.

En attendant, à Tetiaroa, les chercheurs s’apprêtent à poursuivre les lâchers de moustiques sous la forme d'une prestation de service, afin que l'atoll reste préservé de toute nuisance.

D'autres moustiques en Polynésie

Il existe une quinzaine d'espèces de moustiques au fenua. Trois sont particulièrement nuisibles : l'Aedes polynesiensis, Aedes aegypti, essentiellement urbain et le Culex quinquefasciatus, nocturne. L'expérience réalisée sur la première espèce pourrait s'étendre aux deux autres dans le futur.


Rédigé par Amelie David le Mercredi 25 Janvier 2017 à 18:01 | Lu 6471 fois