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Un enfant de dix ans tué dans une fusillade à Nîmes sur fond de trafic de drogues


Crédit NICOLAS TUCAT / AFP
Crédit NICOLAS TUCAT / AFP
Nîmes, France | AFP | mardi 22/08/2023 - Un enfant de dix ans a perdu la vie lundi soir à Nîmes, touché par balles dans une fusillade dans le quartier populaire de Pissevin, "une tragédie" provoquée par la guerre que se livrent les trafiquants de drogue dans plusieurs secteurs de la ville. 

"Nîmes: un enfant de 10 ans tué lors de ce qui semble être un règlement de comptes entre trafiquants. C'est un immense drame qui ne restera pas impuni", a réagi mardi matin le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin sur X (anciennement Twitter), en annonçant l'arrivée dans la journée de membres de la CRS 8, une unité de policiers spécialisés dans le maintien de l'ordre en zones urbaines.

Plusieurs villes du Sud-Est de la France dont Marseille, Avignon, Nîmes, dans un arc entre l'Espagne et l'Italie, sont touchées depuis plusieurs années par des assassinats liés au trafic de drogue, une violence qui touche également désormais des victimes collatérales.

"Ce n'est pas un secret de dire" que ce dossier est "en lien avec les trafics de stupéfiants", a confirmé la procureure de Nîmes, Cécile Gensac, lors d'un point presse sur place, dans ce quartier où le taux de pauvreté dépasse les 70%.

Selon les premiers éléments de l'enquête ouverte pour "assassinat en bande organisée", le garçon se trouvait à l'arrière d'un véhicule pris pour cible aux alentours de 23h30. La magistrate a précisé qu'il était "établi" que l'enfant avait "reçu un projectile, une balle probablement, dans une zone visiblement létale".

Le conducteur, son oncle, âgé de 28 ans, a lui aussi été blessé par balles mais n'est "plus en danger" de mort. Un autre de ses neveux, âgé de 7 ans qui se trouvait à l'arrière, est sain et sauf.

"Au mauvais endroit au mauvais moment"

L'enfant tué et son oncle sont "indéniablement" des victimes collatérales, selon la procureure, qui a dénoncé "une tragédie des plus absolues". "La famille de la victime n'est absolument associée d'aucune façon, ni avant ni actuellement, dans des faits de nature pénale", elle "a eu pour seul malheur de passer au mauvais endroit au mauvais moment", a-t-elle ajouté.

Le préfet du Gard, Jérôme Bonet, a dénoncé un "crime intolérable".

De source policière, les tireurs seraient au nombre de quatre. Ils étaient toujours en fuite et recherchés mardi matin. La procureure de Nîmes a seulement parlé de "plusieurs auteurs".

Selon ses déclarations aux policiers, l'oncle pensait que son neveu était sorti de la voiture lors des tirs, mais ce dernier était en fait coincé dans sa ceinture de sécurité à l'extérieur du véhicule et aurait donc été trainé sur la chaussée sur près de deux kilomètres avant d'arriver à l'hôpital.

Dimanche, un adolescent de 14 ans avait été blessé par balles non loin de là, par des tireurs circulant à bord d'une Renault Clio. Selon une piste envisagée par les enquêteurs, la Mégane de l'oncle qui ramenait les deux enfants aurait pu être confondue par les tireurs avec la Clio utilisée la veille.

"Je suis profondément choqué, attristé et révolté par ce nouveau drame", a réagi dans un communiqué le maire de Nîmes, Jean-Paul Fournier, déplorant une situation "invivable", "qui s'envenime de jour en jour". L'élu LR a demandé au passage "l'affectation à demeure d'une compagnie de CRS" à Nîmes.

Ce quartier de Pissevin est le même où un homme de 39 ans avait été abattu en janvier, déjà dans une fusillade sur fond de trafic de stupéfiants.

"Les dealers ont pris le pouvoir sur le quartier, sur tous les quartiers d'ailleurs", a réagi auprès de l'AFP mardi Raouf Azzouz, directeur du centre social nîmois "Les mille couleurs": "Aujourd'hui l'espace public est privatisé par les vendeurs de mort", a-t-il déploré, regrettant "l'omerta et la peur de représailles".

Selon des chiffres de l'ex-procureur de Nîmes, Eric Maurel, une quinzaine de règlements de compte avaient fait huit morts à Nîmes en 2020 et trois en 2021, dont un adolescent de 17 ans. La plupart de ces homicides avaient eu lieu à Pissevin, au Chemin Bas et au Mas de Mingue, trois secteurs périphériques de Nîmes constitués de barres d'immeubles et de tours.

Ces trois quartiers avaient été créés dans les années 1960 pour loger des populations issues de l'exode rural, des rapatriés d'Afrique du Nord puis des travailleurs immigrés. Tous trois partagent des indicateurs socio-économiques alarmants. A Pissevin, 70% des 13.000 habitants vivent sous le seuil de pauvreté et le taux de chômage atteint 46%.

le Mardi 22 Août 2023 à 05:12 | Lu 416 fois