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Syndrome Asperger : des personnes souvent isolées et pas comprises


Raphaël est atteint du syndrome d'asperger, une combinaison d'une précocité intellectuelle et d'un petit déficit de communication
Raphaël est atteint du syndrome d'asperger, une combinaison d'une précocité intellectuelle et d'un petit déficit de communication
PAPEETE, le 29/05/2016 - En Polynésie, on estime à plus de 10 000 personnes le nombre de personnes qui pourraient être concernées par le syndrome asperger. Une combinaison d'une précocité intellectuelle et d'un petit déficit de communication, ce qui complique les relations avec les autres. Nous avons rencontré Raphaël, un jeune de 23 ans, qui est concerné par ce syndrome.

C'est dans un cadre plutôt calme et retiré que nous avons rencontré vendredi dernier, Raphaël, 23 ans. Il est atteint du syndrome d'asperger, encore peu connu sur le fenua.

"L'asperger c'est la combinaison d'une précocité intellectuelle et d'un petit déficit de communication, qui fait que la personne a du mal à lire les expressions du visage des autres. Pour des gens qui sont très touchés, des autistes profonds, ils ne savent jamais si la personne qui est en face d'eux, est contente ou en colère. Du coup, ils évitent de communiquer avec les autres et ils s'isolent un peu", nous explique Pierre Henri Senesi, président de l'association fenua pour les enfants intellectuellement précoces (AFEIP-PF)

Rester dans son coin et se réfugier dans des bouquins était le passe-temps favori de Raphaël durant sa scolarité. "Durant plusieurs années, je constatais que j'étais différent et que j'avais des activités différentes et j'étais en mal-être. Tu te demandes ce que tu as. Ce n'est pas comme si tu allais voir un médecin qui te dit que tu as la grippe et puis c'est tout. Là, c'est quelque chose que personne ne voit. On me sentant différent, cela me faisait mal. J'essayais d'être normal, mais ce n'était pas moi", nous confie-t-il.

Il a fallu attendre ses 5-6 ans pour que Raphaël découvre enfin ce qu'il avait, "parce qu'on voulait me faire sauter de classe. Quand j'ai appris que j'avais ce syndrome j'étais soulagé. J'avais enfin une réponse. Et je me suis dit qu'il y avait d'autres personnes qui étaient comme moi, malheureux durant leur enfance et même pendant l'âge adulte. Du coup, ça m'a donné envie de faire changer les choses. Il faut que l'on communique sur cette maladie comme cela, les gens ne tomberont pas dans une déprime."

LES ENFANTS PRECOCES SONT SENSIBLES AUX BRUITS ET AUX SAVEURS

Durant sa scolarité, Raphaël n'avait pas beaucoup d'amis et cela ne le dérangeait pas du tout. Jusqu'au jour où il s'est rendu compte que ses copains de classe s'amusaient. Même s'il ne trouvait pas cela distrayant, il a fini par accepter de suivre ses copains en boite de nuit. "Au bout de 10 minutes, je suis parti parce que ce n'était pas pour moi, les gens bourrés etc. Je me suis même demandé, comment ils peuvent tous être comme cela ? ".

La réaction est la même pour Tiihiva, un ami de Raphaël. À 23 ans, Tiihiva est un enfant précoce avec un haut potentiel intellectuel. "Je ne suis jamais sorti en boite de nuit à Tahiti. Je préfère la nourriture et j'essaye d'imaginer un mélange de saveurs pour faire quelque chose dont j'ai envie. Pareil pour les jeux vidéo. Je me suis inscrit à Poly 3D et les jeux vidéo permettent de créer par rapport à ton imagination, seule ton imagination est ta limite et il faut de la logique. Moi je trouve cela marrant."

Ils n'aiment pas les boites de nuit parce "qu'ils ressentent les choses plus fortes que les autres gens. Un bruit fort, ils l'entendent deux fois plus fort, et en boite de nuit ce n'est pas possible. Ils ressentent les odeurs plus fortes, c'est pour cela que Tiihiva a dit qu'il aimait bien manger parce que du point de vue gastronomique, les précoces sont très sensibles aux saveurs, aux odeurs, aux sons…", explique Pierre Henri Senesi. Et de poursuivre, "dans le cerveau, autour des neurones, il y a ce qu'on appelle la substance blanche, la myéline. C'est comme un isolant entre des fils électriques et ça se développe beaucoup plus vite chez le bébé précoce que chez les autres. Donc il a le cerveau et les sens qui fonctionnent plus vite et ça reste toute la vie, donc il n'aime pas les bruits forts."

Contrairement à Tiihiva, Raphaël est célibataire, mais il aimerait trouver une personne qui l'accepte avec ses différences.

Et aujourd'hui, il lance un appel à toutes les personnes qui ont le même syndrome que lui, à se faire connaitre. "Il ne faut plus se cacher et être ce que nous ne sommes pas." "Ils font une façade pour ressembler aux autres. Ils ne sont pas bien derrière cette façade, ils vivent mal et après s'ils veulent faire ce pas, nous avons nos structures associatives qui vont les aider à comprendre ce qu'il se passe", rajoute le président de l'AFEIP-PF.

En Polynésie, on évaluerait à plus de 10 000 personnes qui auraient un haut potentiel intellectuel. Une page facebook de l'AFEIP-PF a également été créée. L'association organise tous les ans des conférences pour sensibiliser le public sur le quotidien des enfants précoces.

"On fait venir des spécialistes pour aider ces gens-là à vivre mieux et à s'épanouir. Ils ont un potentiel qui serait fabuleux pour le fenua. Ce sont des créatifs, une des plus grandes caractéristiques des précoces, c'est la créativité. Tous les gens qui ont inventé des choses fabuleuses sur la planète, c'était des gens comme cela", conclut Pierre Henri Senesi.
Pierre Henri Senesi, Raphael et Tiihiva sont des personnes avec un haut potentiel intellectuel. Ils lancent un appel à toutes les personnes qui sont dans cette situation à les rejoindre.
Pierre Henri Senesi, Raphael et Tiihiva sont des personnes avec un haut potentiel intellectuel. Ils lancent un appel à toutes les personnes qui sont dans cette situation à les rejoindre.

Pierre Henri a découvert qu'il était une personne précoce à 50 ans. Aujourd'hui, il est content de pouvoir aider ces jeunes à se retrouver.
Pierre Henri a découvert qu'il était une personne précoce à 50 ans. Aujourd'hui, il est content de pouvoir aider ces jeunes à se retrouver.

Le cerveau d'un enfant précoce est plus rapide et dès qu'il voit des lieux comme le port autonome, des questions se mettent en place.  "Je regarde comment les grues sont faites, comment elles sont structurées" (Raphaël) – "J'essaye de voir si ce sont des grappins magnétiques ou mécaniques qui agrippent pour que ça prenne. Par rapport à la taille des containers, vu qu'il y a trois tailles différentes. Voir si on ne peut pas en avoir des plus grands ou plus petits" (Tiihiva)
Le cerveau d'un enfant précoce est plus rapide et dès qu'il voit des lieux comme le port autonome, des questions se mettent en place. "Je regarde comment les grues sont faites, comment elles sont structurées" (Raphaël) – "J'essaye de voir si ce sont des grappins magnétiques ou mécaniques qui agrippent pour que ça prenne. Par rapport à la taille des containers, vu qu'il y a trois tailles différentes. Voir si on ne peut pas en avoir des plus grands ou plus petits" (Tiihiva)

le Dimanche 29 Mai 2016 à 18:40 | Lu 14871 fois