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Puta’i garde le choix pour les municipales


Papeete, le 17 octobre 2019 – Le maire de Papara, Puta’i Taa’e, a été condamné jeudi en appel à une peine de deux ans d’inéligibilité, mais celle-ci n’est plus assortie d’une « exécution provisoire ». L’intéressé a déjà annoncé un pourvoi en cassation –suspensif– et garde donc la possibilité de se présenter aux municipales en mars prochain.

C’est un nouveau sac de nœuds juridico-politico-judiciaire dont nos élus semblent avoir le secret. Jeudi matin, la cour d’appel de Papeete a confirmé les condamnations des élus de Papara dans l’affaire de l’association Taatira Ia Ora Papara. Un dossier dans lequel le maire et ses proches ont détourné l’argent public de la commune, le faisant transiter par l’association culturelle, pour l’utiliser pour des dépenses personnelles et notamment des voyages aux Etats-Unis.

Les deux adjoints Jean Torohia et Charles Villierme ont été condamnés respectivement pour le premier à 400 000 Fcfp d’amende, 2 ans d’inéligibilité et 5 ans d’interdiction d’exercer une activité sociale avec exécution provisoire et pour le second à 6 mois de sursis et 200 000 Fcfp d’amende. L’épouse du maire, quant à elle, a été condamnée à une simple amende de 100 000 Fcfp.

Mais c’est surtout la condamnation du maire de Papara, Puta’i Taa’e, qui risque de faire couler beaucoup d’encre ces prochaines semaines. L’élu a en effet été relaxé du chef de « prise illégale d’intérêts » et condamné pour « abus de confiance » à une peine de 18 mois de prison avec sursis, 1 million de Fcfp d’amende et 2 ans d’inéligibilité. Enorme détail pour la suite des évènements, la cour d’appel n’a pas prononcé « l’exécution provisoire » de cette décision, comme l’avait fait le tribunal correctionnel.

« Exécution provisoire »

Ce détail relance en effet à lui seul la possibilité pour Puta’i Taa’e de mener une liste aux élections municipales de mars 2020. Même si l’équation juridico-administrative est assez complexe... Pour résumer, Puta’i Taa’e a été condamné en mai dernier par le tribunal à « l’exécution provisoire » d’une peine de deux ans d’inéligibilité. A la suite de cette décision, le haut-commissaire a donc pris un arrêté de « démission d’office » du maire de Papara.

Mais Puta’i Taa’e a attaqué cet arrêté devant les juridictions administratives. Une procédure qui a suspendu ledit arrêté, comme l’avait confirmé le haut-commissaire à l'époque. Le tribunal administratif de Papeete a ensuite rejeté le recours de Puta’i Taa’e, mais le tavana a porté l’affaire jusque devant le Conseil d’Etat. Un Conseil d’Etat dont la décision est attendue dans les mois à venir.

Tout le problème qui se pose aujourd’hui, c’est que puisque la cour d’appel a retiré l’exécution provisoire de sa décision jeudi matin, l’arrêté de démission d’office du haut-commissaire n’a, a priori, plus lieu d’être. Une analyse partagée jeudi soir par plusieurs juristes, mais qui reste néanmoins à confirmer.

Ira ? Ira pas ?

Jeudi matin, à la sortie du tribunal, Puta’i Taa’e a immédiatement annoncé son intention de former un pourvoi en cassation. Ce pourvoi suspend donc la peine d’inéligibilité du maire de Papara jusqu’à la décision définitive qui sera rendue par la juridiction parisienne. Or, puisque la Cour de cassation rend habituellement ses décisions en huit mois à un an, Puta’i Taa’e pourrait être éligible lors des municipales de mars 2020.

A la sortie de l’audience jeudi matin, le tavana a expliqué en reo tahiti qu’il ne souhaitait pas se présenter aux prochaines municipales, mais porter la candidature de son épouse : « Je ne vais pas me présenter, c’est ma femme. C’est sûr ». Mais c’était avant de savoir qu’il existait une possibilité pour qu’il soit éligible en mars prochain. Contacté jeudi soir, Puta’i Taa’e a confirmé à Tahiti Infos que si la loi le lui permettait, il serait bien candidat lui-même aux communales.

Et même avec l’épée de Damoclès d’une condamnation définitive au dessus de la tête, la candidature du maire sortant à Papara représente un vrai intérêt politique pour l’élu et son parti le Tapura. Celui-ci pourrait en effet mener une liste, remporter les élections et installer une majorité confortable qui n’aura qu’à le remplacer lorsqu’il sera définitivement inéligible.

La route est encore longue jusqu’aux municipales, mais le sort de la commune de Papara risque encore, à n’en pas douter, de faire couler beaucoup d’encre.

Rédigé par Antoine Samoyeau le Jeudi 17 Octobre 2019 à 21:15 | Lu 2885 fois