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Nucléaire : les femmes de l'association 193 sensibilisent les autorités


PAPEETE, le 18/10/2017 - L'objectif est d'interpeller les autorités de l’État et du Pays sur plusieurs domaines, tels que les chiffres exacts sur le nombre de cancer du sein au fenua depuis 1966 ou encore la mise en place des études transgénérationnelles. Les rencontres ont démarré tôt dans la matinée avec le ministre de la Santé, puis avec le haut-commissaire et enfin avec le président de l'assemblée.

Elles n'ont pas froid aux yeux, une délégation féminine de l'association 193 a rencontré plusieurs autorités de l’État et du Pays ce mercredi matin.

Au programme de ces rencontres, plusieurs thèmes :
- L'obtention des statistiques plus affinées au sujet du cancer du sein en Polynésie. "On a un tableau de la CPS qui évoque des chiffres de 1992 à 2015 avec 2180 cas de cancer du sein, et dans l'ensemble, on retrouve près de 7500 cas de cancer. Mais ça ne nous suffit pas. On aimerait connaitre le nombre de femmes touchées et quelle est l'origine par sexe", explique Léna Normand, 2ème vice-présidente de l'association 193.
- L'obtention des données depuis 1966, "parce que les essais ont commencé en 1966. Nous avons également demandé qu'en était-il d'après 1995, c'est pour mettre en avant la cause pour les enfants", poursuit Léna.
- La mise en place des études transgénérationnelles qui permettront de voir les maladies potentielles des générations antérieures.
- La sensibilisation au dépistage dans le cadre de l'opération "octobre rose".
- La future mise en place d'une branche féminine au sein de l'association 193. "Qu'allons-nous faire de nos enfants qui développeront une malformation ou un des 21 cancers ? Voilà pourquoi nous souhaiterions développer une branche féminine."


Rencontre avec le ministre de la Santé, Jacques Raynal

"Lors de cet entretien, l’association a pu préciser ses attentes, notamment chiffrées. Les éléments constitutifs des dossiers individuels sont, pour certains, difficiles à réunir (actes de naissance, certificats médicaux, etc) et il en va de même également les données chiffrées fiables des maladies contenues dans la liste de la loi Morin.

Le registre du cancer est actuellement en train d’être complété de manière exhaustive par la Direction de la santé. Les résultats de ce travail, attendu dans le courant 2018, permettront à l’association d’accéder à ces données
", précise un communiqué de la Présidence.


Rencontre avec le Haut-commissaire René Bidal

"Je trouvais normal de recevoir l'association 193, d'abord pour les écouter et ensuite pour leur dire les différentes modifications qui sont intervenues et ce qu'ils attendent encore depuis le vote de la loi de l'égalité réelle et la suppression de la notion de risque négligeable. Donc, c'est le fond des discussions que nous avons eu ensemble. Cette association a mis en place un dispositif de relai pour aider les familles à constituer leurs dossiers et je trouve ça très bien. Ensuite, ils m'ont fait un certain nombre de demandes que je vais faire remonter au gouvernement central, notamment sur les études transgénérationelles qui les préoccupent beaucoup. Nous avons évoqué aussi quelques dossiers particuliers où on leur demande des documents administratifs, comme les certificats de notoriété, qui sont faits devant le notaire et qui coûtent 30 000 francs pour les gens qui le demandent. Je trouve que c'est une somme importante, et nous allons voir si on ne peut pas trouver un autre document - notamment pour les personnes mariées ou en filiation directe - qui puisse remplacer les certificats de notoriété, comme les livrets de famille par exemple. Je leur ai quand même expliqué que lorsqu'il s'agit d'ayants droits qui montent un dossier de demande d'indemnisation et qui n'ont aucun lien avec le patient décédé, je pense par exemple, à un concubinage qui n'a pas été formalisé, on ne pourra pas échapper à un certificat de notoriété", explique René Bidal, Haut-commissaire.


Rencontre avec les élus à l'assemblée

Nucléaire : les femmes de l'association 193 sensibilisent les autorités
Sandra Lévy-Agami
Représentante Tahoeraa Huiraatira


"On a l'impression que du côté du Tapura, ils défendent leur bilan et ils sont assez agressifs des remarques qui peuvent être faites. L'objectif c'est quoi ? C'est de trouver des solutions pour que l'on puisse accompagner au mieux les Polynésiens pour qu'ils évitent de développer un cancer. Après, qui a fait quoi ou qui n'a pas fait ? Il faut arrêter de parler du passé, il faut aller de l'avant. Moi, au nom du groupe Tahoeraa, j'ai salué l'initiative de cette association. Il ne faut pas oublier que ce sont des gens bénévoles, pour beaucoup, ils viennent exprès des îles pour cette réunion. Je trouve qu'on aurait pu mieux les recevoir et travailler d'avantage. Je leur ai laissé mes coordonnées pour qu'on puisse refaire une réunion avec notre groupe à l'assemblée, et voir dans quelles mesures on peut les accompagner. J'ai bien retenu leur demande d'intégrer dans le programme de 2018, au niveau des Territoriales, un certain nombre de mesures concrètes. Ce que je souligne, c'est qu'il y a quand même une réponse du Président de la République à leur courrier, et ça montre toute la considération que l’État peut avoir sur cette question. Mais, je regrette toute l'attitude de Madame Tetuanui qui a semblé dénigrer cette réponse."

Antony Géros
Président du groupe UPLD


"Pour ce qui nous concerne, on a bien fixé les termes de notre réflexion sur le fait qu'on a dépassé la revendication qui nous est proposée aujourd'hui. Nous sommes sur la reconnaissance du fait qu'on est en face d'une entité qui est, à la fois, juge et partie. On ne peut plus discuter avec, pour obtenir gain de cause. Donc, il faut nécessairement porter l'affaire devant une instance arbitrale internationale pour qu'on ait au moins un arbitrage qui soit équitable, et non pas demander à quelqu'un qui est à la fois juge et partie s'il est d'accord de se faire condamner lui-même. L'association est ouverte à tous les points de vue, aussi bien par ceux défendus par l'UPLD que par les autres partis. Ils souhaitent que nous soyons unis autour de ce dossier. Maintenant, il va falloir que l'on voie entre nous avec le président de l'assemblée, comment on peut construire cette unité."


Sylvana Puhetini
Présidente du groupe RMA


"J'ai constaté qu'il y a toujours cet aspect politique qui ressort. Tony a dit qu'on ne peut pas être juge et partie, il faut aller plus loin sur le plan international, je pense qu'il parle de l'ONU. Mais, je pense que nous avons un travail ici à faire pour tout ce qui a été fait. Il faut reconnaitre qu'il y a eu des associations, Oscar Temaru… qui ont travaillé sur ce sujet-là. Après, il faut sortir de ces clivages politiques et parler en tant que personne polynésienne concernée par ce problème. C'est pour cela que j'ai parlé en tant que présidente de l'association Apac qui vient en aide aux personnes atteintes d'un cancer à l'hôpital, et en tant qu'ancienne infirmière travaillant en oncologie. On est d'accord sur le fait d'avoir les chiffres sur les personnes malades. Après comment peut-on repérer que c'est une maladie radio-induite ou héréditaire, donc il faut faire attention à ce que l'on va avancer. Aujourd'hui, l’État reconnait et c'est un grand pas. Maintenant, il faut avancer. Ils parlent de référendum mais c'est pour quoi faire ?"

Marcel Tuihani
Président de l'assemblée


"Quel que soit les bords politiques, nous avons été très sensibles à la démarche de l'association 193 et notamment des femmes de cette association. Il est évident que le cancer du sein fait partie des maladies radio-induites et ça fait partie des 21 maladies annexées à la loi Morin. Mais la question qu'il faut se poser est : est-ce qu'un cancer du sein identifié provient d'une exposition aux essais nucléaires ou est-ce que c'est un cancer qui est parvenu par rapport à une maladie héréditaire ? L'assemblée intervient dans ses propres prérogatives et nous constatons ce matin (mercredi NDLR), et je le regrette en particulier, que l'association n'obtient pas gain de cause auprès des autorités du pays pour obtenir des indicateurs, des chiffres et des données. En tous les cas, c'est de cette manière que l'association nous a présentés les choses. Nous allons voir très prochainement, dans le cadre d'une commission législative de quelle manière l'assemblée peut intervenir et demander aux autorités locales de bien vouloir nous communiquer les données qui ont été sollicitées par l'association 193."



Lena Normand
2ème vice-présidente de l'association 193


"Ce serait bien qu'ils arrivent à avoir un discours d'unité"

"Ils ont tous émis la volonté d'être unis, mais ils ont quand même tenu un discours propre à leur idéologie politique. Donc, il y a eu des points de divergence. Ils nous ont demandés d'être unis avec eux. Mais ce serait bien qu'ils arrivent à avoir un discours d'unité aussi, parce qu'il faut qu'on s'unisse face à l’État français qui est responsable de tous ces maux, et de toutes ces conséquences sanitaires.

C'est pour cela, qu'on croit que le référendum local va permettre au peuple polynésien de s'exprimer officiellement sur ce sujet sensible, et on rappelle qu'aujourd'hui, il y a plus de 53 800 Polynésiens pétitionnaires qui attendent d'être saisis sur un sujet qui a longtemps été "tabu".

Dans le référendum local, on demande seulement l'application du statut, de l'article 159. Et ça passe par le politique, c'est pour ça qu'on les saisis parce qu'ils ont la compétence de les mettre en place. Nous, nous sommes là pour sensibiliser la population et leur montrer qu'il y a un quart de l'électorat local qui attend d'être saisi officiellement. Que faites-vous ? Par rapport à cet aspect, ils nous répondent qu'il y a une subtilité par rapport à la rédaction de la question pour ne pas tomber hors compétences et que ce soit débouté par l’État. Donc, c'est encore en réflexion et nous, nous allons continuer la pétition
."


le Mercredi 18 Octobre 2017 à 17:29 | Lu 1850 fois