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"La rupture du câble en vol ne tient pas" avance un expert missionné par Air Moorea


L'expert Bertrand Dubucq, missionné par la société Air moorea "pour donner son avis" précise Me Quinquis, l'avocat de la compagnie.
L'expert Bertrand Dubucq, missionné par la société Air moorea "pour donner son avis" précise Me Quinquis, l'avocat de la compagnie.
PAPEETE, le 5 février 2016 - Alors qu'un procès devrait avoir lieu d'ici la fin de l'année, comme l'a annoncé il y a quelques semaines le procureur de la République José Thorel, la société, représentée par Me Quinquis, sort de son silence et conteste ouvertement le scénario retenu par les experts judiciaires et ceux du bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA).


Le juge d'instruction doit rendre incessamment sous peu son ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, visant les responsables présumés dans le douloureux dossier du crash d'Air Moorea. Hasard ou pas, c'est le moment qu'a choisi la société pour contre-attaquer médiatiquement, vendredi, en présentant les conclusions d'un expert qu'elle a elle-même missionné, "pour donner son avis" précise Me Quinquis.

Un avis qui contredit purement et simplement les conclusions des experts en aéronautique du très sérieux bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA), et reprises par les experts judiciaires au cours de l'enquête. Selon l'hypothèse retenue lors de l'instruction, la cause quasi certaine de l'accident serait la rupture du câble à cabrer des gouvernes arrières de l'appareil, lors de la phase ascensionnelle du twin-otter. L'enquête qui avait du même coup pointé du doigt de graves manquements de maintenance et d'organisation au sein de la compagnie à l'hibiscus.

L'hypothèse d'un malaise du pilote ressortie

"Le câble était nécessairement sous tension au moment de l'impact", avance au contraire Bertrand Dubucq, l'expert en aéronautique pour Air Moorea, après que l'avocat de la compagnie, Me Quinquis, ait pris soin de préciser que son exposé était à considérer hors du cadre des investigations judiciaires menées jusqu'à présent. "Donc il n'a pas pu se rompre avant, donc il n'a pas pu se rompre en vol".

Au terme d'une projection sur grand écran de sa reconstitution des faits, mélange d'images de synthèse et de photos des débris de l'empennage de l'appareil, Bertrand Dubucq en est arrivé à la conclusion que c'est le "désaxage" de la structure arrière de l'appareil qui aurait conduit à la rupture éventuelle du câble quand l'avion a été englouti par les flots après son contact ultra-violent à la surface de la mer, moins d'une minute après le décollage depuis l'aéroport de Temae. Les dégâts tels qu'observés par l'expert auraient été provoqués par le câble encore tendu sous l'effet de la torsion de la queue de l'appareil. Sa rupture aurait aussi pu intervenir lors de la remontée à la surface de l’empennage par le câblier Ile de Ré, mais en tout cas "pas en vol" martèle l'expert.

Pour étayer ses dires, Bertrand Dubucq se fonde sur les données très officielles, mais parcellaires, du premier rapport de constatation de l'accident établi par le CEPR de Saclay. Cet organisme rattaché au ministère de la Défense avait notamment réalisé des clichés ou l'on peut distinguer des traces suspectes de frottements sur la gouttière du cadran dans laquelle coulissait le câble, et d'un morceau de carlingue comme déchiré par ce même câble, sous tension, depuis un œillet qu'il traversait.

"Ce que nous disons, c'est que ces dommages n'auraient pas pu être observés si le câble avait cédé avant l'impact". L'expert qui s'étonne enfin que le BEA n'ai pas jugé utile de reprendre l'intégralité des travaux du CEPR quand il a récupéré l'enquête : "Ils sont partis du postulat que le câble s'était rompu en vol et nous ne sommes pas d'accord. La moitié des éléments rapportés par le CEPR ont été ignorés".

Comment expliquer dès lors la chute brutale de l'appareil ? "Un malaise du pilote n'est pas à exclure", reprend Me Quinquis, qui assure disposer d'éléments médicaux pouvant étayer cette hypothèse. L'autopsie pratiquée à l'époque sur Michel Santurenne, pilote aguerri de 53 ans, n'avait révélé aucune trace d'infarctus ou encore de malaise diabétique. Le crash d'Air Moorea avait coûté la vie à vingt personnes.

"C'est malhonnête" estime Nicolaz Fourreau

Nicolaz Fourreau, représentant de l'association de défense des familles des victimes de la catastrophe aérienne de Moorea.
Nicolaz Fourreau, représentant de l'association de défense des familles des victimes de la catastrophe aérienne de Moorea.
Le représentant de l'association de défense des familles des victimes de la catastrophe aérienne de Moorea s'est invité, hier, à la conférence de presse donnée par la société Air Moorea. Il n'a pas manqué de faire part de son agacement à l'issue de "ce plan de communication" : "C'est malhonnête de sortir cela aujourd'hui, on est à quelques jours de la fin de l'instruction et ils sortent un lapin de leur chapeau. La défense a le droit de présenter ses arguments".

"Mais il y a des simplifications un peu malhonnêtes sur la rupture du câble, comme la possibilité qu'il tombe au fond de la carlingue sans efforts. C'est faux, c'était un moment du vol ou il y avait les plus grandes tensions sur ce câble, donc il a forcément eu des réactions violentes. Je ne mets pas en doute les qualités de l'expert –missionné par la compagnie, Ndlr- mais ce n'est pas un expert judiciaire, c'est un expert indépendant qui travaille uniquement avec les compagnies aériennes. On est sur un axe de défense classique d'une compagnie qui met tout sur le dos d'un pilote".

"Une parodie de défense pour se dédouaner"

"Pour avoir écouté les dernières minutes pénibles du vol, après avoir entendu le fameux juron on entend beaucoup d'actions et de réactions du pilote. C'est assez étonnant qu'un pilote qui aurait fait un malaise s'amuse à manipuler les boutons qui sont sur la partie haute du poste de pilotage. Il y a beaucoup d'approximation. Par contre on note que la compagnie dépense beaucoup de moyen, des films, des recompositions pour mettre des doutes alors que l'instruction est finie et que beaucoup d'experts ont mis en avant que seule une rupture du câble pouvait avoir eu pour conséquences le comportement de l'avion tel qu'il l'a eu".

"Il faut savoir que la compagnie a essuyé beaucoup de refus d'experts pour se défendre parce qu'il n'y avait pas de possibilités techniques autres que celle qui est avancée par le BEA -la rupture du câble pendant l'ascension, Ndlr- dans son rapport. N'oublions pas que ce rapport met aussi en avant tous les dysfonctionnements de la compagnie, sa médiocrité, et ce ne sont pas les arguments qu'elle développe aujourd'hui qui remettront en cause que cette compagnie était mal gérée. C'est une parodie de défense pour se dédouaner".

La carlingue déchirée depuis cet oeillet par lequel passait le câble n'a pu l'être que si celui-ci était encore en pleine tension, estime l'expert d'Air Moorea, insinuant que sa rupture en vol n'est pas à l'origine du crash.
La carlingue déchirée depuis cet oeillet par lequel passait le câble n'a pu l'être que si celui-ci était encore en pleine tension, estime l'expert d'Air Moorea, insinuant que sa rupture en vol n'est pas à l'origine du crash.

Rédigé par Raphaël Pierre le Vendredi 5 Février 2016 à 19:13 | Lu 4106 fois
           



Commentaires

1.Posté par tuam'''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''''' le 05/02/2016 20:14 | Alerter
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09 aout 2007, bientot 10 ans et toujours pas de proces... cherchez l'erreur et qui sont les intouchables?

2.Posté par utupapa le 06/02/2016 12:45 | Alerter
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Après l'avion de Air Moorea, ce sont maintenant les parents des victimes qui vont péter un câble...

3.Posté par Piripirifaufau le 06/02/2016 08:38 | Alerter
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Allez va , c'est reparti pour encore 10 ans de procédure, vraiment au top ce Quinquis.. Le temps de regler tout ça et tout ce beau monde coupable aura eu le temps de passer une belle retraite dorée..ou sera mort?

4.Posté par Chaval le 06/02/2016 09:00 | Alerter
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Les experts du BEA sont des professionnels chargés des enquêtes lors des crash aériens, ils connaissent leur boulot et sont les seuls habilités à enquêter et donner les conclusions des accidents, ils ne sont pas dépendants de telle ou telle compagnie, ils sont absolument indépendants; Mais là il semble qu'Air Moorea tente de se dédouaner sur un entretien défectueux de sa flotte qui pourrait remettre en cause son autorisation de vol si cela s'avérait être le cas concernant des négligences.
La compagnie a fait appel à un expert d'Air Moorea, d'oùl a contestation appuyée par Me Quinquis qui n'en loupe pas une.
On tente de mettre l'affaire sur le dos du pilote, c'est petit.

5.Posté par vanille le 06/02/2016 10:41 | Alerter
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La lenteur judiciaire, c'est pas possible

6.Posté par emere cunning le 06/02/2016 21:36 | Alerter
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Il me semble que les contrôleurs avaient, auparavant, demandé à Air Moorea de changer ce câble hautement défectueux. Pour la sécurité de ses passagers, la cie aurait du suivre leurs recommandations, point final. Toutes ces précautions étant prises, d'abord l'avion aurait été plus fiable, et la cie n'aurait pas eu à s'en expliquer. Un peu trop facile de toujours tout mettre sur le dos du pilote, alors qu'il semble réactif.
C'est effectivement minable de leur part d'être allé se payer un expert qui contredise... l'évidence (a-t-on envie de dire). Il faut reconnaître qu'ils ont eu tout le temps de se le dénicher. Qu'en pense le BEA ? Il ne trouve rien à redire ? C'est sûr qu'il y a toujours matière à discuter, et semer le doute.

7.Posté par Kriss le 07/02/2016 18:54 | Alerter
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Moi j'aimerais savoir pourquoi Mate Galenon qui était PDG d'air moorea ne figure pas sur la liste des mis en examen ????

8.Posté par un peu fiou le 08/02/2016 07:50 | Alerter
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je me demande s il ils on place les corps dans la reconstitution 3D des evenements, juste pour rappeler qu une VINGTAINE DE PERSONNES sont mortes!!!!....et maintenant apres tout ce temps ils essaient de se defendre en accusant le pilote????Le tout pour ralentir les procedures ....Je vous vomis dessus....

9.Posté par Popol le 08/02/2016 10:01 | Alerter
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Quelle belle société : réfuter et contredire au prix d'une souffrance supportée par certaines familles, tout ça pour un besoin financier.

J’espère que la majorité d'entre vous gagneront un max de fric, que vous vous achèterez tout ce que vous voudrez, pour enfin réaliser que ce n'est pas ça qui compte dans la vie.

10.Posté par Yapa de justiss le 08/02/2016 15:14 | Alerter
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je compatis avec les familles des victimes,
c'est vraiment abusé comment la justice et air moorea vous traite...
Faatoito