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La commercialisation de l'Uvestérol D aussi suspendue en Polynésie


PAPEETE, le 4 janvier 2017. Le ministère de la Santé a décidé de suspendre la commercialisation de l’Uvesterol D®, suite au décès, en métropole, d’un nouveau-né de 10 jours. Il est donc demandé aux parents qui détiendrait de l’Uvestérol D® de ne plus l’administrer à leurs enfants, et de se rapprocher de leur professionnel de santé, qui leur proposera de la vitamine D sous une autre forme.


Le 21 décembre dernier, un nouveau-né de 10 jours est décédé par arrêt cardio- respiratoire, à son domicile en métropole. Ce nouveau-né avait reçu une dose d’Uvestérol D® indiquée dans la prévention et le traitement de la carence en vitamine D chez le nouveau-né, le nourrisson et l’enfant jusqu’à 5 ans.

Les conclusions des investigations disponibles à ce jour mettent en évidence un lien probable entre le décès et l’administration de l'Uvestérol D®. Aussi, l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a engagé, par mesure de précaution, une procédure de suspension de la commercialisation de l’Uvestérol D®.

"L'intérêt de la supplémentation en vitamine D n'est pas remis en cause", indique le ministère de la Santé dans un communiqué. "Seule la spécialité Uvestérol D® administrée avec une pipette est concernée." Selon l’ANSM, c’est le mode d’administration spécifique du produit qui présente des risques (et pas la vitamine D). Les enfants qui ont reçu de la vitamine D, sous quelque forme que ce soit, ne courent aucun danger.

"En Polynésie l’Uvestérol D® est très peu prescrit, les professionnels de santé préférant les formes de vitamine D en gouttes"
, précise le ministère. "Toutefois, par mesure de précaution, il est demandé aux parents qui détiendrait de l’Uvestérol D® de ne plus l’administrer à leurs enfants. Ils sont invités à se rapprocher de leur professionnel de santé, qui leur proposera de la vitamine D sous une autre forme, la vitamine D étant essentielle pour le développement des nourrissons."

Plusieurs incidents graves (malaises avec apnée, "fausses routes"...) liés à ce mode d'administration avec la pipette ont été signalés par le passé, valant au produit une "surveillance renforcée" depuis 2006.

En 2006, puis en 2013, l'ANSM a alerté sur les précautions à prendre chez les nourrissons: "Toujours administrer le produit avant la tétée ou le biberon", installer l'enfant "éveillé" "en position semi-assise", laisser l'enfant "téter" la seringue ou faire couler le produit "goutte à goutte", ne pas l'allonger "immédiatement après l'administration", prévient la notice.

Le laboratoire Crinex, qui commercialise 1,8 million de doses d'Uvestérol D par an, va "rencontrer (jeudi) les autorités de santé pour analyser les faits et réfléchir à un mode d'administration alternatif pour les nouveau-nés", a-t-il annoncé.

Crinex avait déjà modifié la pipette en 2006, puis reformulé le produit en 2014: plus concentré, le volume à administrer est désormais plus faible (seulement quatre gouttes).

Mais, "aucun élément tangible" ne montre "que ces changements réduisent le risque de malaise", estimait en 2015 la revue médicale Prescrire.

La revue a salué la décision de suspension, tout en estimant qu'elle "aurait dû être prise depuis des années".

Les autorités sanitaires "ont été trop indulgentes", a estimé Bruno Toussaint, directeur de la rédaction de Prescrire, sur RTL, regrettant que leur priorité soit trop souvent "de ménager les firmes pharmaceutiques" plutôt que de protéger les patients.

"Comment se fait-il que les pouvoirs publics n'aient pas mis fin à sa commercialisation alors qu'il existe des alternatives à ce produit?", s'est aussi interrogée la députée européenne Michèle Rivasi, réclamant une "enquête indépendante".

L'agence sanitaire n'a pas souhaité faire de commentaires sur ces mises en cause.

Crinex, laboratoire familial basé à Montrouge, est spécialisé dans la prévention des maladies des nourrissons et l'hygiène buccodentaire. Il emploie 27 salariés pour un chiffre d'affaires de 20 millions d'euros (dont 10% grâce à l'Uvestérol D).

Une enquête judiciaire a par ailleurs été ouverte à Evry pour déterminer les causes du décès.

Rédigé par D'après un communiqué et avec AFP le Mercredi 4 Janvier 2017 à 15:08 | Lu 4686 fois