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Fritch : "Je ne suis pas le porte-parole de la France"


Edouard Fritch et Manuel Terai, son conseiller spécial en charge des affaires internationales.
Edouard Fritch et Manuel Terai, son conseiller spécial en charge des affaires internationales.
SIEGE DE L'ONU, 3 octobre 2016 - A New York, le jour du grand oral approche pour Edouard Fritch. "Je suis un novice dans cette procédure", reconnait le président de la Polynésie.

A la veille de la réunion de la commission en charge des questions de politique spéciales et de la décolonisation, qui doit instruire le cas polynésien ce mardi à New York, Edouard Fritch se prépare à porter la voix des autonomistes du fenua.

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Et : Processus d'autodétermination : ce qui est à l’œuvre à New York

Cette fois, Edouard Fritch s'exprimera le premier, durant dix minutes, à partir de 15 heures, heure de New York. Pour préparer ce rendez-vous, Edouard Fritch a rencontré ce lundi matin des représentants de la délégation française à l'ONU. La France, qui refuse toujours de reconnaître la réinscription, ne sera pas présente, mardi.

Edouard Fritch a ensuite rencontré Tekau Frere, représentante à l'ONU de l'organisation non gouvernementale Islands First. Le président a ensuite récupéré son badge pour entrer dans l'enceinte de l'ONU, avant d'enchaîner les réunions diplomatiques : entretien avec l'ambassadeur de Papouasie Nouvelle-Guinée, avec l'ambassadeur de Nouvelle-Zélande, puis avec le président de l'Assemblée générale de l'ONU, Peter Thomson.

Que comptez-vous dire devant le Comité de décolonisation ?

Edouard Fritch : C'est la grande majorité des Polynésiens que je représente aujourd'hui. Il faut qu'à l'ONU on ait une idée un peu plus vraie de la Polynésie Française et de ce qui s'y passe. Je n'irai pas dans le sens de la décolonisation parce que ce n'est pas une urgence pour le pays. Je viens ici pour rectifier certaines choses parce que je crois que nos amis indépendantistes sont allés un petit peu loin et n'ont peut-être pas tout dit sur la situation exacte en Polynésie. Donc, je viens pour leur dire la réalité du terrain.

18 personnes parleront au nom du camp indépendantiste et antinucléaire. Vous serez seul pour représenter le camp autonomiste. Ne risquez-vous pas d'être noyé par toutes ces interventions?

Edouard Fritch : Non, je ne crois pas. Ce qui est important, c'est la résolution qui va être adoptée. Les travaux mardi vont contribuer à maintenir ce qu'il y a dans le projet de communiqué ou non. Ce que j'essaye de rectifier dans l'immédiat, c'est deux choses : notre statut d'autonomie est aujourd'hui reconnu au niveau du Pacifique. N'étant pas indépendant mais bénéficiant d'une autonomie suffisamment large, nous nous asseyons autour de la table avec les pays indépendants du Pacifique et nous sommes entendus en tant que tels. Les compétences qui sont exercées par la Polynésie française semblent ne pas être réellement ce qui se dit ici. J'ai agi seul au Forum, j'ai agi seul à Honolulu, j'agis seul lorsque je vais dans les réunions internationales dans le Pacifique ; La seconde chose, c'est l'affaire des essais nucléaires. On ne l'a pas suffisamment dit mais la France a reconnu dès 2010 qu'il y a un problème. La loi Morin en est la preuve. En début d'année, le président de la République a été beaucoup plus précis sur les conséquences environnementales, sanitaires et économiques. Je souhaite leur dire que nous continuons les discussions avec l'Etat français qui n'est pas fermé sur le sujet, au contraire, et qui est disposé à trouver des solutions sur la Polynésie Française.

Est-ce que cela donne une image d'une Polynésie divisée ?

Edouard Fritch : Non, je ne crois pas. Nous ne semblons pas divisés. Nous venons avec deux conceptions différentes des choses. Je crois que l'essentiel est que nous puissions discuter entre nous et ici dire les choses sans mépriser les autres. C'est bien mon état d'esprit. Il faut continuer à se respecter, à se comprendre et à discuter.

Regrettez-vous que la France ne participe toujours pas aux discussions du comité de décolonisation, concernant la Polynésie?

Edouard Fritch : La France ne participe pas parce qu'elle ne reconnait pas la réinscription. C'est son problème. Je comprends tout à fait aussi que l'Etat français ne soit pas d'accord avec ce processus qui a été initié sans qu'il soit réellement consulté et dans son dos. Donc oui, je comprends cette situation.

Est-ce que vous serez le porte-parole de la France devant le comité de décolonisation?

Edouard Fritch : Non, je ne suis pas le porte-parole de la France, que ce soit clair. Je suis le porte-parole des autonomistes de la Polynésie française, de ceux qui réclament encore aujourd'hui de vivre au sein de la République française, avec l'accompagnement de l'Etat, avec le partenariat de l'Etat.


Rédigé par Serge Massau, à New York le Lundi 3 Octobre 2016 à 08:10 | Lu 3565 fois