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Escroquerie à la loi Girardin : L'affaire Sofipac à la barre, symbole des dérives de la défisc'


Le procès du scandale Sofipac s'étalera sur toute la semaine au palais de justice.
Le procès du scandale Sofipac s'étalera sur toute la semaine au palais de justice.
PAPEETE, le 11 octobre 2015 - Après quatre ans d'investigation, douze personnes sont poursuivies pour "escroqueries" dans ce dossier dont l'examen commence ce lundi matin devant le tribunal correctionnel de Papeete. L'audience s'étalera sur une semaine. Le préjudice, historique, tourne autour des 3 milliards de Fcfp.

L'affaire avait vu le jour à la suite à un contrôle fiscal de routine mené en 2009 par le service des Finances du Pays, dans les bureaux du cabinet de conseil en défiscalisation Sofipac à Tahiti. En épluchant les comptes, les agents avaient découvert de nombreuses incohérences dans le montage de certains dossiers et des fausses factures.

Le parquet de Papeete fut informé et une enquête préliminaire ouverte pour aboutir, fin 2010, à l'ouverture d'une information judiciaire pour "faux et usage de faux, escroquerie en bande organisée et blanchiment", confiée au juge d'instruction Philippe Stelmach.
Quatre ans plus tard, l'heure est au jugement de cette affaire dont le procès s'ouvre ce matin devant le tribunal correctionnel de Papeete. L'audience se déclinera sur cinq jours, jusqu'à vendredi prochain. La Polynésie française est partie civile au procès.

Les gendarmes entendent plus de 200 personnes

Plus de deux cent auditions ont été menées par les limiers de la section de recherches de la gendarmerie dans le cadre de l'enquête préliminaire. Perliculteurs, agriculteurs, éleveurs, exploitants de vanilleraie, propriétaires de pensions de famille ou encore entrepreneurs en bâtiment : l'éventail des bénéficiaires de la fraude s'est avéré très large.

En 2012, l'ancien patron du cabinet de défisc' Sofipac, William Bernier, avait été interpellé et placé en détention provisoire. Il est le prévenu central dans ce dossier de fraude à la loi Girardin avec deux des principaux "apporteurs d'affaire", Yolande Wong Lam, une mamie de 70 ans connue pour escroquerie, et l'ancien chef de file du collectif de lutte contre la vie chère Te tau no te hono, Francky Tehaamatai. L'ancien vice-président de la Chambre d'agriculture Rubel Amaru figure aussi au nombre des prévenus.

Dans cette affaire, le dispositif Girardin d'aide à l'investissement, censé s'appliquer à l'achat d'équipements neufs, a sans arrêt été dévoyé. Les fraudeurs s'équipaient en matériel n'entrant pas dans le champ d'application de la loi, sans aucun contrôle. Le cabinet Sofipac, lui, se rémunérait en prenant un pourcentage sur les dossiers bidons qu'il montait.
Au cours de l'enquête, certains des bénéficiaires de cette défiscalisation parallèle ont voulu prouver leur bonne foi, ou leur méconnaissance des contours du dispositif, en chargeant les apporteurs d'affaires de la Sofipac qui leur auraient tenu des discours imprécis et volontairement généralistes sur ces aides venant de la métropole et auxquelles ils pouvaient prétendre.

Ces collaborateurs de la Sofipac s'allouaient une commission variant de 5 à 7 % du montant des investissements qu'ils remontaient pour finalisation au cabinet de défiscalisation. Yolande Wong Lam a reconnu à elle seule avoir participé au montage de 219 dossiers pour un investissement record de 2,8 milliards de Fcfp.

Rédigé par Raphaël Pierre le Dimanche 11 Octobre 2015 à 18:44 | Lu 3949 fois