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Déficit: conclave à Bercy pour trouver des économies, sous l'oeil vigilant des agences


Crédit JOEL SAGET / AFP
Crédit JOEL SAGET / AFP
Paris, France | AFP | jeudi 28/03/2024 - Objectif économies: le gouvernement réunit jeudi à Bercy des parlementaires pour tenter de s'accorder sur de nouvelles coupes budgétaires, deux jours après l'annonce du dérapage du déficit 2023, un rendez-vous toutefois boycotté par plusieurs élus de l'opposition.

Mercredi soir, le Premier ministre Gabriel Attal a réaffirmé sur TF1 le "cap" de son gouvernement: ramener le déficit en dessous de 3% du PIB en 2027, un effort chiffré à 50 milliards d'euros par la Cour des comptes.

10 milliards d'euros d'économies ont déjà été actés pour 2024, et 20 milliards de coupes sont annoncés pour 2025.

Mais des "économies supplémentaires" seront nécessaires dès 2024, selon le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire, alors que le déficit public s'est établi à 5,5% du produit intérieur brut en 2023, bien au-delà des 4,9% initialement prévus par l'exécutif.

L'effort reposera non seulement sur l'Etat, mais aussi sur la Sécurité sociale et les collectivités territoriales, dont les représentants seront reçus le 9 avril à Bercy.

L'objectif est d'anticiper autant que possible la préparation du budget pour 2025, en identifiant d'ici la "fin juin" les premières pistes d'économies, a détaillé Gabriel Attal.

C'est précisément pour trouver des économies "réalistes, documentées et significatives" que Bruno Le Maire a convié députés et sénateurs jeudi à Bercy, avec ses collègues Thomas Cazenave (ministre délégué aux Comptes publics), Catherine Vautrin (Travail) et Frédéric Valletoux (Santé).

Parmi les invités figurent les présidents et les rapporteurs généraux des commissions des Finances et des Affaires sociales des deux chambres du Parlement. En outre "tous les groupes parlementaires ont été invités", a indiqué Bercy. 

Mais plusieurs formations ont décliné l'invitation, à commencer par les groupes LR de l'Assemblée nationale et du Sénat. 

Seule exception: le sénateur Jean-François Husson, qui sera bien présent mais en sa qualité de rapporteur général de la commission des Finances. "Je n'y vais pas pour recevoir des leçons", a-t-il déjà averti.

- "Mascarade" -
Le chef des députés Liot Bertand Pancher a aussi indiqué qu'il boycottait la réunion, en l'absence d'engagement de l'exécutif à présenter un budget rectificatif pour 2024 devant le Parlement, dénonçant un "simulacre de concertation". 

"Plutôt qu'une réunion dans les arcanes de Bercy, nous demandons une loi de finances rectificative au plus vite pour que le Parlement ne soit pas mis à l'écart du débat budgétaire", ont aussi fait valoir dans un communiqué les sénateurs communistes et les députés du groupe GDR-Nupes, pour qui "un gouvernement qui décide seul doit assumer seul". 

Ils expliquent être en désaccord avec les pistes évoquées par l'exécutif, qui choisit de porter atteinte au "modèle de protection sociale" plutôt que de faire marcher la "justice fiscale" via une taxation des "superprofits". "Nous ne participerons pas à cette mascarade", ont-ils affirmé.

L'annonce mardi d'un déficit plus important que prévu met davantage l'exécutif sous la pression des agences de notation, qui doivent actualiser la note de crédit française avant la fin du printemps.

Mercredi, l'agence Moody's a estimé "improbable" que le gouvernement atteigne son objectif de déficit de 4,4% du PIB en 2024 et de moins de 3% en 2027.

La trajectoire de déficit du gouvernement "est basée sur des hypothèses (...) optimistes et une modération sans précédent de la dépense", ajoute Moody's, soulignant qu'hors pandémie de Covid, le gouvernement n'est parvenu qu'une fois à réduire son déficit de plus d'un point de pourcentage en un an depuis le début du siècle.

Pour la - moins influente - agence de notation Scope, "la France est confrontée à d'importants obstacles budgétaires, sociaux et politiques dans sa quête d'économies supplémentaires" d'ici à 2027. 

"Des décisions politiques difficiles seront nécessaires pour réformer l'Etat-providence et réduire les rigidités de la dépense publique. Les mouvements sociaux pourraient empêcher des progrès rapides, vu l'ampleur de la contestation récente contre la réforme des retraites", juge encore Scope.

Enfin, au fur et à mesure que l'élection présidentielle de 2027 approchera, la "volonté politique" de tailler dans les dépenses "pourrait s'évanouir", anticipe l'agence.

le Jeudi 28 Mars 2024 à 06:54 | Lu 983 fois