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Cédric Pastour : "Oui, Air Tahiti Nui peut gagner de l’argent"


Cédric Pastour : "Oui, Air Tahiti Nui peut gagner de l’argent"
Il vient d’annoncer des pertes prévisionnelles de 811 millions pour l’année 2011. Mais le Président directeur général d’Air Tahiti Nui, Cédric Pastour, compte toujours arriver à l'équilibre en 2013. Pour ce faire, il a lancé officiellement la chasse au gaspi, et aux abus. « Tous les jours, je découvre tellement d’économies à faire dans une multitude de domaines ! » explique celui qui a pris les rênes de la compagnie il y a quatre mois, en décembre 2010. Mais au-delà de la lutte contre les kilos inutiles - rendue célèbre par l’abandon de la « bouteille de rosé local » à bord -, le PDG a entamé une réorganisation générale en interne. Avec un leitmotiv : préserver les acquis, mais bouleverser les habitudes.

Au revoir Michel Rispal : le directeur général qui épaulait l'ancien président du CA a démissionné. Et il ne sera pas remplacé, puisque Cédric Pastour a choisi depuis le départ d’endosser ces deux casquettes. Pour s’épauler, le PDG s’entoure de trois directeurs généraux adjoints, tous issus de la compagnie. «J’ai voulu démontrer que nous avions un gisement de compétences au sein d’ATN» explique le PDG, qui a donc choisi la promotion en interne. Francis Dziadula se voit confier l'exploitation. Romain Vidal, les finances. Quant à Yves Wauthy, il hérite de la stratégie et des affaires commerciales. Si les tâches sont ainsi réparties, précise Pastour c’est « pour rappeler qu’il existe des compétences métiers ».

VERS UNE STRATEGIE MARKETING PLUS OFFENSIVE

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Cette nouvelle équipe sera chargée de la mise en œuvre d’une stratégie qui devrait (enfin) faire décoller la compagnie. Pour l’heure, le PDG refuse de trop en dire. Tout juste saurons-nous qu’il entend mener une politique marketing « plus offensive », ce qui passera notamment par l’affectation de « plus de moyens », et par une plus grande centralisation des décisions.

Difficile d’en savoir plus pour le moment. Cédric Pastour ne veut pas donner l’impression de court-circuiter ses équipes, et les groupes de travail qu’il a formés. Ni de critiquer les directions précédentes. Il reconnaît toutefois que la gestion de la compagnie n’a pas toujours été « optimale ». « Je ne suis pas favorable, par exemple, à la signature de contrats sur des durées trop longues, de 4 ou 5 ans », explique Cédric Pastour. « Nous devons garder notre possibilité de repartir sur des appels d’offre, de renégocier nos contrats, ce qui n’a pas toujours été le choix de mes prédécesseurs. » Le PDG envisage également de se séparer d’un avion, pour alléger une flotte en surcapacité.

LE PDG VEUT METTRE FIN AUX "DERAPAGES" DES BILLETS GRATUITS

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Et les billets gratuits ? Impossible de ne pas évoquer le sujet qui déchaîne les passions en Polynésie. Ceux qui jugent la pratique « scandaleuse » appuient leurs critiques sur les constatations de la Chambre Territoriale des Comptes (CTC). Dans son rapport sur la SEM, la CTC s'étonnait en 2008 que, certaines années, « la proportion de billets gratuits accordés ait dépassé les 8%», ce qui représente «le double du taux observé dans les compagnies concurrentes ». « Il y a des abus », reconnaît Cédric Pastour, qui met toutefois en garde contre les « amalgames ».

« Ces avantages sont prévus par les accords d’entreprise, comme dans toutes les compagnies aériennes. Mais s’il faut que je confirme que je pense qu’il y a certains abus dans l’application des règles, alors oui, je le confirme. Et mon devoir, c’est d’arrêter ces abus. » explique le PDG avec prudence, mais fermeté. « Je ne veux pas rentrer dans le détail, car ce sont des sujets très sensibles, mais je peux vous donner deux exemples. Un, les surclassements à bord lorsque les portes de l’avion sont fermées. Cette pratique là, moi je ne l’accepte pas. Deux, les certificats de concubinage, qui donnent le droit à des facilités de transport. Il y a là aussi des dérapages, et on a les moyens d’y mettre fin en demandant un autre document administratif. ».

ATN SUR LA VOIE DE LA RENTABILITE?

Cédric Pastour : "Oui, Air Tahiti Nui peut gagner de l’argent"
A force de rigueur, Cédric Pastour espère parvenir à l’équilibre, sans augmenter les prix. Vendredi, la compagnie a pourtant élevé ses tarifs de près de 3%, pour compenser la hausse du prix des carburants (qui représentent 30% des dépenses globales de la compagnie). Aujourd’hui, un aller retour Papeete/ Paris, c’est 185 000 francs, au minimum. « En matière tarifaire, il faut raisonner sur le long terme », tente d’expliquer Cédric Pastour. « Ce sont des lignes difficiles à exploiter de par la distance. Nous savons que la population attend que les tarifs soient revus à la baisse et nous devons faire des économies pour y arriver un jour. On a beaucoup de travail à faire sur notre structure de coûts », affirme le PDG, qui affiche une confiance inébranlable dans l’avenir de sa compagnie.

Parmi les marchés qu’il lorgne, la Chine, le Canada, l’Amérique latine. Aucune ouverture de ligne n’est prévue pour le moment, « mais nous devons mettre des moyens pour être plus présents », souligne-t-il. Le PDG envisage par ailleurs le rapprochement avec d’autres compagnies, pour qu’ATN ne « reste pas seule dans la zone Pacifique ». Près de 13 ans après son premier vol Papeete/ Los Angeles, la compagnie aérienne polynésienne peut-elle enfin rêver de stabilité, et de rentabilité ? « Air Tahiti Nui peut gagner de l’argent», tranche Cédric Pastour. « J’ai fondé une compagnie aérienne, Star Airlines, qui a été rentable pendant 10 ans ». Reste à lui souhaiter de ne pas faire les frais de l’instabilité politique. La formation politique du nouveau président Oscar Temaru, l’UPLD, avait publiquement manifesté son désaccord au moment de l’arrivée à la tête d’ATN du « popa’a » Cédric Pastour.







Rédigé par Florence O'KELLY le Mardi 5 Avril 2011 à 12:00 | Lu 4857 fois