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Carnet de voyage: Le tiki de Tapuivi, gardien mystérieux de Aakapa


La superbe vue sur la vallée de Aakapa et sa cocoteraie, à gauche de la photo, et sur les somptueux pics de lave qui s’avancent en mer : l’un des plus beaux paysages de toutes les îles Marquises.
La superbe vue sur la vallée de Aakapa et sa cocoteraie, à gauche de la photo, et sur les somptueux pics de lave qui s’avancent en mer : l’un des plus beaux paysages de toutes les îles Marquises.
PAPEETE, le 2 novembre 2017- La vallée de Aakapa, aux Marquises, abrite sans doute le petit village le moins visité et le moins connu de la grande île de Nuku Hiva. A tort nous semble-t-il, ne serait-ce que pour la beauté du panorama et pour son mystérieux tiki veillant, au fond de la forêt, depuis le meae Tapuivi, sur « sa » population.

1er avril 1946 : à des milliers de kilomètre de nos archipels, une secousse sismique d’une magnitude de 7 sur l’échelle de Richter secoue les île Aléoutiennes, en Alaska. Généralement, ce genre de colère chtonienne n’est pas suivi de beaucoup d’effets. Ce jour là pourtant, sans que les scientifiques qui planchent encore aujourd’hui sur ce phénomène ne se l’expliquent, le tremblement de terre génèrera une série de colossales vagues, de plus de cent pieds de hauteur (trente mètres !). Cinq personnes trouvent la mort en Alaska, mais très au sud, à Hawaii, 159 personnes sont tuées par le raz-de-marée, une en Californie et deux à Atuona, aux Marquises sud (les vagues déferlent sur les côtes marquisiennes à la mi-journée, la population est dans les cocoteraies et les jardins, pas en bord de mer).


Tsunami à Aakapa

La petite église catholique de Aakapa, flambant neuve.
La petite église catholique de Aakapa, flambant neuve.
A Nuku Hiva, les déferlantes font aussi des dégâts, à tel point que dans la petite vallée de Aakapa, les anciens, aujourd’hui disparus, ont raconté aux jeunes que la mer s’était avancée de plus de deux cents mètres dans les terres, ravageant petites maisons et cultures vivrières.
La leçon a visiblement été retenue puisque, aujourd’hui, lorsque l’on arrive par une piste encore loin d’être bétonnée en vue de la baie de Aakapa, on est surpris de constater que pratiquement aucune construction n’est visible en bord de mer. L’arc de la baie est quasiment uniformément vert, le vert des arbres, dont une majorité de cocotiers. Les maisons, quant à elles, se trouvent plus haut, en retrait, elles aussi masquées par la végétation.
Aujourd’hui, en attendant les chiffres officiels du dernier recensement, environ 200 personnes vivraient ici (130 au recensement de 1998), loin des bruits et turpitudes du monde, autour de la petite et pimpante église catholique, non loin d’un tohua en cours de restauration (et qui sert déjà de lieu de rassemblement).


Le mystérieux tiki des Teii

Le majestueux tiki veillant sur la vallée, caché dans la végétation sur les hauteurs de Aakapa, objet de notre recherche.
Le majestueux tiki veillant sur la vallée, caché dans la végétation sur les hauteurs de Aakapa, objet de notre recherche.
En longueur, le hameau semble donc hors de portée d’une nouvelle vague inquisitrice ; mais ce qui domine le paysage dans le dos des habitations, c’est une impressionnante cocoteraie qui s’élance hardiment sur les flancs du fond de la vallée. Jadis vivait ici une population bien plus importante (proche de la tribu des Teii) ; on s’en rend compte facilement si l’on prend le temps de pénétrer le hallier et de remonter la pente douce. Les paepae sont en effet nombreux, mais ce ne sont pas eux qui nous amènent là aujourd’hui : nous savons qu’un grand tiki silencieux, mystérieux, masqué par la végétation, sommeille sur les hauteurs et c’est lui que nous sommes venus voir et photographier, en tachant de ne pas le réveiller ! Il s’agit du géant du meae de Tapuivi.

Un magnifique visage sculpté

William, notre guide, donne l’échelle, face à ce visage sculpté dans la lave.
William, notre guide, donne l’échelle, face à ce visage sculpté dans la lave.
De fait, notre guide, William trouve un habitant du cru, travaillant à la régénération de la cocoteraie. Lui se souvient ; il sait où dort le géant de pierre et il sait aussi que des pétroglyphes nombreux ornent les pierres alentour. La marche est précise, et bien vite, nous nous retrouvons sans avoir eu le temps de le discerner de loin face à un gros bloc de lave refroidie, recouvert de mousse verte, dans lequel a été sculpté un magnifique visage de tiki ; son regard, habileté des sculpteurs, est à la fois orienté vers les terres qui l’entourent et vers le ciel.
La récompense de notre journée de balade est devant nous, et visiblement, compte tenu de la mousse recouvrant le rocher, il y a belle lurette que personne n’est venu ici admirer la sculpture monumentale. Nous nous garderons bien d’ôter cette mousse qui, probablement, protège peut-être mieux le basalte qu’une exposition directe aux intempéries.


Un site encore vierge

Autour du tiki, on peut « lire » de nombreux pétroglyphes sans doute gravés dans la roche par la tribu des Teii.
Autour du tiki, on peut « lire » de nombreux pétroglyphes sans doute gravés dans la roche par la tribu des Teii.
Si des reconnaissances ont été faites par des chercheurs dans cette vallée durant le XXe siècle, notamment sur ce meae Tapuivi, aucune fouille et aucun défrichage d’ampleur n’a été conduit, permettant de mesurer les dimensions de ce site archéologique encore quasiment vierge, mais très probablement de première importance.
Après avoir minutieusement observé des pétroglyphes (dont un groupe de créatures qui ressemblent à quatre chiens), nous laisserons le champ libre aux moustiques et autres nonos.

Une vaste opération de régénération de la cocoteraie de Aakapa est en cours, mais les sites archéologiques sont toujours vierges de toute restauration.
Une vaste opération de régénération de la cocoteraie de Aakapa est en cours, mais les sites archéologiques sont toujours vierges de toute restauration.
Pour la population de Aakapa, la première source de revenus est, bien entendu, la très belle cocoteraie qui recouvre en grande partie ces ruines ; et il est clair qu’elle n’abandonnera pas cette ressource pour le simple plaisir de dégager ce site de sa végétation. Mais en revanche, une restauration bien conduite, un défrichage limité et une mise en valeur de ces vestiges (comme c’est le cas à Hatiheu) pourrait permettre à Aakapa de devenir une destination touristique incontournable à Nuku Hiva, comme l’est justement Hatiheu aujourd’hui. A condition aussi que les travaux de bitumage de la route, actuellement en cours, ne s’éternisent pas trop non plus. Car indubitablement, ce coin de la grande île marquisienne mérite qu’on lui consacre une escapade…


Textes et photos : Daniel Pardon

La semaine prochaine :
en descendant la vallée de Taipivai
La vallée chère à Melville recèle de nombreux points d’intérêt. Nous vous proposons de les découvrir. Entre tiki et botanique…


Aakapa pratique

Une vue de la baie de Taiohae depuis l’hôtel Keikahanui Pearl Lodge.
Une vue de la baie de Taiohae depuis l’hôtel Keikahanui Pearl Lodge.
- Pour visiter ce village, une consigne : partir directement de Taiohae à Aakapa, sans marquer d’arrêt aux vestiges archéologiques de Hatiheu que vous aurez tout le temps de visiter l’après-midi, sur le chemin du retour. La lumière du matin est en effet extraordinaire sur les pics de Aakapa, qui nous offrent ainsi l’un des plus somptueux et majestueux paysages des îles Marquises (l’après-midi, on est en contre-jour).

- Il n’y a, bien entendu, aucun hôtel ni aucun restaurant à Aakapa. Soit on emmène son casse-croûte, soit on revient déjeuner chez Yvonne à Hatiheu, ce qui nous semble la formule la plus judicieuse.


- En termes d’hébergement, « Séjours dans les îles » offre deux possibilités à Nuku Hiva : la pension Mave Mai et l’hôtel Keikahanui Pearl Lodge, un magnifique ensemble que nous vous avons présenté il y a deux semaines. Vingt bungalows dans un parc arboré de sept hectares, une piscine (bienvenue en fin de journée, après avoir joué à Indiana Jones !), et un restaurant de qualité s’offrent aux visiteurs désireux de bénéficier du confort d’un trois étoiles. Indubitablement, la bonne adresse. Les budgets plus serrés préfèreront la pension Mave Mai.

- Prix pour deux nuits
-Pension Mave Mai : séjour vol + 2 nuits à partir de 61 652 Fcfp., avec petit déjeuner. Nuit supplémentaire à partir de 5 500 Fcfp par personne (avec petit-déjeuner)
- Hotel Keikahanui Pearl Resort : séjour vol + 2 nuits à partir de 76 252 Fcfp avec petit-déjeuner. Nuit supplémentaire à partir de 13 900 Fcfp par personne, avec petit-déjeuner.

- Le conseil Tahiti Infos
On ne va pas à Nuku Hiva comme à Moorea. Compte tenu du prix du billet d’avion, n’hésitez pas à allonger votre séjour, 3 ou 4 nuits à Nuku Hiva n’étant pas de trop, il s’en faut, pour visiter tous les coins et recoins de cette magnifique destination. Et couplez bien sûr votre séjour avec Hiva Oa.


Rédigé par Textes et photos : Daniel Pardon le Jeudi 2 Novembre 2017 à 17:40 | Lu 2728 fois