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Amnésie collective dans l’affaire de la rixe de Papara


Les témoins qui ont défilé à la barre avaient, pour beaucoup d’entre eux, des difficultés quant au fait de se souvenir avec précision de ce qu’ils avaient vu.
Les témoins qui ont défilé à la barre avaient, pour beaucoup d’entre eux, des difficultés quant au fait de se souvenir avec précision de ce qu’ils avaient vu.
PAPEETE, le 13 septembre 2017 - Ce matin, la troisième journée d’assises dans l’affaire de la bagarre mortelle de Papara a été consacrée à l’audition des nombreux témoins. Pour certains d’entre eux, il a été difficile de se souvenir de ce qu’ils avaient vu le soir de la mort du jeune Moearii.

Le premier témoin entendu ce matin dans l’affaire de Papara a donné le ton de cette troisième journée d’assises. L’homme, cousin de plusieurs des six accusés, a expliqué que c’était le frère de la victime qui avait porté le premier coup. Lorsque des questions plus précises sur l’identité des auteurs des coups ont été posées, le témoin semblait partagé entre l’incompréhension et l’amnésie. Face à l’une des avocates des parties civiles, il a affirmé n’avoir reçu aucune pression.


C’est ensuite un témoin clé qui s’est avancé à la barre. Ex compagne du frère de la victime, auteur du coup de fil appelant à l’aide pour récupérer son enceinte bose, la jeune femme a exprimé une « grande culpabilité ». Elle a expliqué que, ce jour-là, elle avait passé la journée à la plage avec des amis dont certains des accusés. Alors qu’elle souhaite récupérer ses affaires dans l’enceinte du domicile où tout a dérapé, elle constate la disparition de son enceinte et appelle à l’aide son ex beau-frère, Moearii, « il m’avait toujours dit de l’appeler si j’avais un problème et c’était la première fois que je le faisais… » Très éprouvée par la peine et la culpabilité, la jeune femme a expliqué qu’après les faits, elle était tombée dans une lourde dépression, restant cloîtrée chez elle pendant 8 mois, « j’avais envie de me suicider mais j’ai pensé à ma fille, je ne pouvais pas la laisser. » Le témoin a, par ailleurs, indiqué que, le soir des faits, la victime avait répété aux accusés « je ne veux pas de problème, je veux juste récupérer l’enceinte. » Elle a évoqué la victime, comme étant « un homme bien, un mec joyeux qui était toujours là pour sa famille. »

Le troisième témoin entendu ce matin était la sœur de trois des accusés. Présente dans la cour du domicile, elle a confirmé que le frère de la victime était nerveux et qu’il n’avait pas voulu l’écouter lorsqu’elle lui avait dit de partir. Elle fait partie de ceux qui ont tenté de protéger les victimes, « j’ai couru vers le frère de Moearii, j’ai reçu des coups en essayant de le protéger. Je suis restée avec lui jusqu’à l’arrivée des secouristes. »


Culpabilité

Les témoins qui ont ensuite défilé à la barre avaient, pour beaucoup d’entre eux, des difficultés quant au fait de se remémorer avec précision de ce qu’ils avaient vu. Ils se souvenaient d’avoir vu les deux hommes à terre, battus par d’autres. Mais seul le nom d’un des accusés est clairement ressorti comme étant celui qui avait continué de frapper Morearii alors qu’il était déjà à terre, inconscient. Mais cette troisième journée a surtout permis de mettre en lumière quelle était la vision générale des témoins à propos de cette triste affaire. Unanimement, tous ont expliqué que, dans leurs esprits, la responsabilité incombait aux victimes puisqu’elles avaient cherché cette situation. Comme l’instinct d’un territoire sur lequel on est maîtres, il ne fallait pas s’aventurer. Depuis, dans le quartier où s’est déroulé le drame, une chape de plomb s’est abattue sur l’affaire. Comme l’a dit un témoin à la barre, « la page est tournée » Beaucoup semblent, d’ailleurs, penser que l’ex compagne du frère de la victime est l’unique responsable de ce lynchage. Comme l’a justement exprimé l’avocat général : « le quartier a digéré cette affaire en transférant la culpabilité ». La remise en question serait, en effet, bien plus douloureuse.

Rédigé par Garance Colbert le Mercredi 13 Septembre 2017 à 16:47 | Lu 2339 fois