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A la COP28, des dirigeants rassemblés mais loin de s'accorder sur les fossiles


Crédit Ludovic MARIN / AFP
Crédit Ludovic MARIN / AFP
Dubaï, Emirats arabes unis | AFP | vendredi 01/12/2023 - Derrière les sourires de la photo de famille, sous le soleil de Dubaï, les désaccords sur le pétrole restent profonds: plus de 140 dirigeants mondiaux sont vendredi à la COP28 pour rompre la paralysie climatique, mais le "tournant" appelé de ses voeux par le roi Charles est loin d'être acquis.

Les uns après les autres, présidents et monarques ont pris acte du climat extrême en train de conquérir la Terre et de l'apathie collective face au réchauffement. La plupart se sont contentés de répéter leurs engagements existants sur le climat, dont presqu'aucun n'est en ligne avec l'accord de Paris, sans que les opposants à une sortie des énergies fossiles n'annoncent de volte-face.

Le Premier ministre Narendra Modi, rappelant que l'Inde représentait "17% de la population de la planète" pour "4% des émissions mondiales", s'est ainsi lancé dans un plaidoyer des efforts de son pays, un "modèle pour le monde" dans l'équilibre trouvé "entre écologie et économie".

Invité d'honneur des Emirats arabes unis, hôtes de la COP, le roi Charles III avait appelé en ouverture à faire de cette 28e conférence de l'ONU sur le climat un tournant digne de l'accord de Paris.

"Les records sont brisés si souvent que nous devenons insensibles à ce qu'ils nous disent", a déclaré Charles, présent pour la première fois à une COP en tant que souverain.

"Je prie de tout mon coeur pour que la COP28 soit un autre tournant décisif en faveur d'une transformation réelle", a-t-il dit, citant les cyclones ayant dévasté les îles vulnérables dont Vanuatu, les inondations en Inde, au Bangladesh et au Pakistan, ou les incendies record des Etats-Unis à la Grèce. 

"La Terre en a ras-le-bol des accords sur le climat qui ne sont pas respectés", a tonné à sa suite le Brésilien Lula, qui accueillera la COP30 dans deux ans.

D'ici la fin de la conférence prévue le 12 décembre, plus de 170 dirigeants sont attendus, selon Sultan Al Jaber, président de la COP28. 

"La science est claire: la limite de 1,5°C est tenable uniquement si nous finissons par arrêter de brûler tous les combustibles fossiles", a lancé le secrétaire général de l'ONU António Guterres.

Leur combustion croissante depuis le 19e siècle nous emmène vers un réchauffement invivable de près de 3°C d'ici 2100.

Mais comme un avertissement aux négociateurs, le président polonais, Andrzej Duda, a lancé: "Sortir des énergies fossiles trop vite engendre une charge trop lourde pour la société".

La guerre à la COP

L'ombre du conflit Israël-Hamas plane sur le rassemblement.

Le président israélien, Isaac Herzog, s'était déplacé à Dubaï pour plaider auprès d'homologues la libération des otages encore détenus dans la bande de Gaza. 

Il est toutefois reparti avant son tour de parole à la tribune, alors que les hostilités ont repris vendredi avec le Hamas.

Le président iranien Ebrahim Raïssi a annulé sa venue parce qu'Israël a été invité à y participer, selon un média officiel, et sa délégation a quitté la COP28 en guise de protestation.

Parmi d'autres dirigeants ayant consacré une partie de leurs brèves interventions au conflit à Gaza, le roi Abdallah II de Jordanie a déclaré qu'il n'était pas possible "de parler de changement climatique séparément des tragédies humanitaires autour de nous".

"Nous parlons ici d'inclusivité dans le climat, soyons inclusifs pour les plus vulnérables", a-t-il lancé, citant les Palestiniens de Gaza et les personnes affectées par des conflits dans le monde.

Un paragraphe explosif

En parallèle des discours des dirigeants, plus de 130 pays se sont engagés vendredi à prioriser l'alimentation et l'agriculture, responsables d'environ un tiers des émissions de gaz à effet de serre mais grands absents des COP habituellement, dans leurs plans nationaux de lutte contre le changement climatique. 

C'est le premier des grands engagements volontaires d'Etats, hors processus onusien, que les Emirats veulent catalyser dès le début de la conférence, pour donner une impulsion positive aux véritables négociations.

La COP28 a du reste réussi jeudi son coup d'envoi, avec la concrétisation historique d'un fonds de compensation des pertes et dommages climatiques dans les pays vulnérables, réclamé depuis des décennies.

Les premières promesses atteignent environ 500 millions de dollars, après l'annonce vendredi d'une contribution de 100 millions d'euros de l'Italie.

Elles ne sont toutefois qu'une mise de départ destinée à démarrer les opérations du fonds début 2024, qui reste loin des centaines de milliards nécessaires.

Derrière ce signal positif, indispensable pour apaiser les tensions entre le Nord et le Sud, tout reste à faire.

Un document de travail en vue de l'accord final, publié vendredi matin, propose aux pays de se prononcer sur une "réduction" ou une "sortie" des énergies fossiles. Sans doute le paragraphe qui sera le plus vivement débattu ces prochains jours.

le Vendredi 1 Décembre 2023 à 05:15 | Lu 269 fois