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24 élèves et deux enseignants : les CP nouvelle formule


FAA'A, le 13 septembre 2017 - Depuis la rentrée, les cours préparatoires des écoles des réseaux d'éducation prioritaires ne comptent plus que 12 élèves pour un professeur, ou 24 élèves avec deux enseignants. Le dispositif, applicable en Polynésie, semble plutôt bien accueilli à l'école de Piafau, à Faa'a.

8 heures précises. La cloche retentit à l'école de Piafau, à Faa'a. Les jolies têtes brunes embrassent leurs parents et se pressent dans les salles de classe. Après l'habituel brossage des dents, les élèves de CP s'installent pour la leçon du jour. Ce mardi matin : c'est mathématiques. Les 23 élèves sont répartis en deux groupes. Chacun sa maîtresse.

Depuis la rentrée 2016, les écoles classées en réseaux d'éducation prioritaires (REP+) bénéficient de nouveaux outils, applicables en Polynésie française. Au fenua, les REP+ ont été créées à Faa'a, à Papara et aux Tuamotu. Objectif du dispositif : se recentrer sur la réussite des élèves en améliorant leur accompagnement, leur cadre de vie et la formation des équipes pédagogiques, entre autres. Pour cette rentrée, l'organisation des classes de CP a été chamboulée.

Terminé les classes traditionnelles avec 25 élèves, en moyenne, pour un seul instituteur. Désormais, c'est 12 élèves pour un professeur ou 24 mais avec deux enseignants. "Ici, nous avons de classes de CP avec 16 élèves et une autre classe avec 23 élèves mais où il y a deux instituteurs titulaires", explique le directeur de l'école de Piafau, Tetaria Louk. Les nouvelles dispositions ont été adaptées au contexte polynésien. Pour le directeur, cette nouvelle organisation permet aux élèves d'être mieux suivis.

"NOUS SOMMES PLUS PRÉSENTES AUPRÈS DES ÉLÈVES"

Tauhia Tinorua, enseignante en CP.
Tauhia Tinorua, enseignante en CP.
Dans la classe de CP, Tauhia Tinorua et Tauhia Oopa, les deux maîtresses, s'activent. "Là, je dois additionner le huit et le quatre et inscrire le résultat ici", explique Madame Oopa en pointant l'exercice inscrit sur le tableau blanc. Les écoliers réfléchissent, posent les chiffres sur leur feuille avant de lever la tête et de lancer leurs réponses.

De l'autre côté de la salle, toute autre ambiance. Madame Tauhia s'accroupit auprès des écoliers. Ils ont chacun un petit sac transparent dans lesquels se trouvent des cubes de couleurs. "1,2,3… 4! Il y en quatre dans celui-ci", s'exclame l'un d'entre eux avant d'apposer sur le sachet l'étiquette qui correspond au bon chiffre. L'institutrice lui sourit, l'encourage à continuer avant de se retourner vers un autre élève, un peu plus en difficulté.

"Deux enseignants, c'est l'idéal pour les séances de lecture et de mathématiques. Nous sommes tout le temps disponible, nous sommes plus présentes auprès des élèves. Nous arrivons à bien les suivre et à nous rendre compte des progrès de chacun. Cela nous permet d'observer de plus près un enfant et de repérer ses difficultés", explique Tauhia Tinorua, l'une des deux enseignantes.

Plusieurs modes de fonctionnement ont été mis en place pour exercer cette co-intervention. "Ce matin, nous appliquons la méthode d'enseignement avec groupe différencié. C'est-à-dire qu'un enseignant prend tout le groupe en classe dans un premier temps et leur explique la leçon. Ensuite, nous cassons le groupe en deux : d'un côté ceux qui ont plus de difficultés et de l'autre, ceux qui en ont le moins."

Quatre autres modalités sont utilisées par les deux institutrices. La méthode partagée : une maîtresse explique et l'autre tourne dans la classe pour aider les élèves. L'enseignement en parallèle où la classe est divisée en deux mais les deux groupes travaillent sur les mêmes objectifs. En outre, il existe la méthode des ateliers : les enseignants dispensent chacun un contenu et ce sont les élèves qui tournent. Enfin, l'école de Piafau applique le fonctionnement en tandem où les deux professeurs sont acteurs avec toute la classe. Dans l'ensemble, l'équipe pédagogique se dit satisfaite de ce nouveau dispositif, même si tout n'a pas été facile.

TROUVER LE BON FONCTIONNEMENT

Tauhia Oopa, enseignante en CP.
Tauhia Oopa, enseignante en CP.
"Les premiers temps ont été difficiles, parce que nous avons chacune notre façon de faire. Après, nous nous sommes mises d'accord sur les méthodes de fonctionnement. C'est un travail de quelques semaines de mettre en place une méthode qui nous correspond à toutes le deux", glisse Tauhia Oopa.

Cette coopération éducative permet aussi à l'équipe éducative de se supporter mutuellement. "L'avantage, c'est que nous sommes deux à préparer une séance et donc il y a un débat. Chacune propose quelque chose et après on en sort quelque chose de bien", continue sa collègue.

Près d'un mois après la rentrée, les enseignantes ont trouvé leur rythme, en adéquation avec celui de leurs chères têtes brunes. Tous savent où aller : vers la réussite. Avec un seul objectif : "100 pour 100 de réussite."

Impliquer les parents dans la réussite de leurs enfants

Du 11 au 15 septembre a lieu dans les écoles la semaine du CP. Chaque parent est invité à se rendre dans la classe de son fils ou sa fille pour observer la manière dont se fait la classe et la manière dont se comporte les enfants. L'idée est aussi de responsabiliser les parents quant à la réussite de leurs enfants, en leur donnant quelques clés.

Les classes à double niveau

Cette année, les CM1 et CM2 de l'école de Piafau vont en classe ensemble. Il y a toujours eu une classe double niveau à l'école. "Au départ, c'était pour équilibre les effectifs car il n'y avait pas assez d'élèves dans un niveau. Ensuite, nous nous sommes rendu compte que cette organisation permettait aux élèves du niveau inférieur de pouvoir bénéficier de l'apport des plus grands. Inversement, les plus grands aident les plus petits et parfois deviennent leurs tuteurs. Cela les responsabilise", explique le directeur de l'école de Piafau.

La maîtresse en charge de cette classe de 19 élèves, Marania Petis, confirme. Il y a une continuité dans les apprentissages. En revanche pour elle, cette organisation demande plus de temps de préparation et d'explication. "Quand je décris les exercices au CM1, je dois le refaire après au CM2. Pareil pour certains cours. Cela demande beaucoup d'énergie et d'efforts", déclare l'institutrice. Cependant, certains cours sont communes et permettent une plus grande cohésion entre les enfants.

"Cette disposition pourrait être étendue aux classes de CE1 pour assurer une continuité"

Christian Morhain, conseiller pour l'éducation et l'enseignement supérieur au ministère de l'Education :

" Les réductions d'effectifs dans les classes de CP est une disposition qui a été annoncée après l'élection du président de la République, par le ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer. La ministre de l'Education au fenua a fait le choix de transposer ce dispositif au fenua. Nous avons dû le faire pendant les vacances scolaires, ce qui n'a pas été simple. Il a fallu faire de grands calculs pour obtenir le nombre de classes de CP nécessaires. Ensuite, il a fallu en informer tout le monde, tout ça dans un laps de temps assez court. Cela n'a pas été simple mais comme c'est pour la bonne cause, nous l'avons fait. Les études montrent que ces classes allégers sont un bénéfice pour les enfants. Aujourd'hui, ce que nous devons faire, c'est continuer d'accompagner les enseignants dans leur formation en leur donnant les outils nécessaires. L'année prochaine, nous ferons un bilan de ce dispositif. A la rentrée 2018, cette disposition pourrait être étendue aux classes de CE1 pour assurer une continuité. C'est une chose que nous semble cohérente dans le cadre des REP+."


Les REP+ En Polynésie concernent les collèges de Faa'a, Papara, Rangiroa, Makemo et Hao. Les écoles élémentaires et maternelles qui dépendent de ces collèges sont aussi classées en REP+.
- A Faa'a: toutes les écoles de la communes sont concernées;
- A Papara : écoles élémentaire et maternelle Taharu'u, Apatea et Tiamao.

Rédigé par Amelie David le Mercredi 13 Septembre 2017 à 17:00 | Lu 5165 fois