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21 mars 1845, une date historique pour la Polynésie française, pour les Marquises


21 mars 1845, une date historique pour la Polynésie française, pour les Marquises
Ce jour marque l’anniversaire de la mort de Pakoko, illustre chef marquisien de Nuku-Hiva, exécuté hâtivement le 21 mars 1845 par le Capitaine Amalric. En tant que descendante de Pakoko, je tiens à remercier ceux qui se souviennent et particulièrement Monseigneur Hervé Le Cléach, évêque des îles Marquises, qui a tant fait pour que l’histoire de Pakoko comme la langue et l’histoire marquisiennes soient mises en lumière.

Cet acte de mémoire peut paraître dérisoire au regard des difficultés qui frappent la Polynésie française. Je crois au contraire qu’il est important que l’histoire de Pakoko soit rappelée. D’après Jean-Louis Candelot « Pakoko était chef de guerre à Nuku Hiva. Son influence y était grande et certains étrangers voyaient en lui l'homme qui possédait la stature pour prétendre à être reconnu comme roi de l'île, davantage que le "roi" Temoana qui était une création de circonstance pour servir à la légitimité des actes de prise de possession de l'île. Pakoko représentait la seule véritable opposition à l'ordre nouveau représenté par Dupetit-Thouars et les missionnaires ». Pakoko a payé de sa vie son autorité de chef guerrier. En effet, l’histoire orale dit que les militaires français emprisonnèrent la fille de Pakoko, certains témoignages parlent de viol. Pakoko, en colère, tua 6 militaires français à l’aide de son u’u (casse-tête). Le chef s’enfuit, poursuivi par les français. La lutte est inégale. Face au désarroi de son peuple pris en otage et à la trahison de certains, Pakoko se rend. Suite à un jugement expéditif relaté dans les archives de la Marine, Pakoko est fusillé sur le lieu de « Hakapehi » à Taiohae, Nuku-Hiva. Le corps de Pakoko ne fut jamais retrouvé. Seuls demeurent ses attributs de chef aujourd’hui exposés à Paris au Musée du Quai Branly, quelques écrits et portraits réalisés par le breton Max Radiguet ou Pierre Gillotin. Une œuvre de ce dernier a été prêtée par le collectionneur Anthony Meyer lors de l’exposition «Rencontres en Polynésie/Victor Segalen et l'exotisme» qui s’est déroulée en 2011 à l’abbaye de Daoulas et fut un des moments phare de l’année des outremers.

La disparition du chef Pakoko marque aussi la disparition de son monde. Le nombre de marquisiens diminuant drastiquement de plusieurs dizaines de milliers d’habitants à quelques milliers d’habitants. Plusieurs témoignages dont les immémoriaux du médecin breton Victor Segalen ou les écrits de Jack London à bord du Snark, attestent de cette fulgurante dépression. La mémoire de Pakoko se partage entre la Polynésie et l’Occident. Aujourd’hui loin de verser dans le manichéisme que certains affectionnent, il est temps de regarder l’Histoire sereinement et de faire confiance aux historiens pour enfin édifier un monument à la mémoire de l’illustre chef. Si justice a été faite à l’époque de Pakoko, la Marine ayant blâmé le capitaine responsable du jugement expéditif, qu’en est-il actuellement ? Qu’en est-il de l’absence de plaque commémorative en l’honneur de l’illustre chef, des terres confisquées à ses descendants?

La population marquisienne est en droit d’attendre du Territoire et de la commune de Nuku-Hiva, l’édification d’une stèle en l’honneur du chef ainsi que le baptême d’une rue du nom du chef Pakoko.
C’est à nous, polynésiens, de faire acte de mémoire, de réparer les injustices du passé pour prendre notre destin en main.

Après les paroles, il est temps de passer aux actes.

Teaki Dupont-Teikivaeoho

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Rédigé par Teaki Dupont-Teikivaeoho le Mardi 20 Mars 2012 à 19:26 | Lu 1989 fois