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Les Thénardier polynésiens à la barre


Les Thénardier polynésiens à la barre
Tahiti, le 24 août 2020 -  Une mère a été présentée ce lundi en comparution immédiate, avec sa compagne pour avoir maltraité, frappé, humilié et même affamé, sa fille de 9 ans. Les deux femmes sont accusées de faits qui se sont déroulés du 1er août 2019 au 22 juin 2020 sur un atoll des Tuamotu. Elles ont été condamnées à 36 mois de prison, dont 18 mois avec sursis.
 
 
« La petite fille, c'est Cosette, les deux femmes, c'est le couple Thénardier. C'est la version polynésienne des Misérables », a lâché d'emblée le procureur lundi après-midi, lors de la comparution immédiate des deux femmes. Et effectivement, c'est un triste remake du roman de Victor Hugo, qui a été relaté par le tribunal.
La mère de l'enfant, actuellement à Nuutania, et sa compagne, sous contrôle judiciaire, sont notamment accusées de violences habituelles sur mineur de moins de 15 ans et de privation de soins ou d'aliments, pour des faits qui se sont déroulés du 1er août 2019 au 22 juin 2020.
Il faut le reconnaître, la petite fille, âgée de 8 ans au début des faits, a vécu un véritable calvaire, devenant au fil du temps le souffre-douleur du couple.
 

« Je préfère que ce soit ma fille qui se prenne les coups »

La mère de l'enfant, âgée de 30 ans, vit avec sa compagne de 25 ans, depuis six ans. Entre elles, les relations ne sont pas tendres et les coups sont monnaie courante. Et forcément ce mode de fonctionnement au sein du couple a des répercussions sur la fillette.
« Je préfère que ce soit ma fille qui se prennent les coups, qui soit frappée plutôt que moi », avoue égoïstement la mère dans le rapport fait par la gendarmerie.
Car la compagne a la main facile, très facile, envers la mère de l'enfant, mais surtout envers la fillette. Avec le plat de la main, les coups de poing, un bâton et quand le bâton casse, elle demande à la fillette d'aller chercher un autre bâton. Et pour finir la punition, elle humilie la gamine à genou les mains en l'air.
La mère, qui travaille dans une pension de famille, reconnaît frapper sa fille aussi, car « elle n'est pas sage, elle fait des bêtises... » « ne la réveille pas à l'heure qu'il faut... ». Bref, tout est prétexte pour que la fille se fasse taper.
Un premier signalement est fait par les tantes en août 2019 qui s'aperçoivent du calvaire de leur nièce, les deux compagnes reconnaissent les agissements, mais assurent qu'elles ne le feront plus.
Mais cela reprend. Le vice va même jusqu'à priver la petite fille de manger. La raison à cela est simple : «  Il ne faut pas que la fillette grossisse, sinon, il faudra lui racheter des vêtements », expliquera la compagne, qui travaille comme surveillante à l'internat, aux gendarmes, lors de sa garde à vue.
Toutes ces violences laissent des traces, des hématomes, des escarres forcément. Les deux femmes tentent de cicatriser les plaies avec du dentifrice, mettent des glaçons. Elles évitent de mettre l'enfant à l'école quand les bleus sont trop voyants, n'amènent pas la fillette chez le médecin par peur qu'il découvre la vérité. « Ce n'est pas de la peur, mais de la lâcheté », dira l'avocat de l'APAJ, qui défend les droits de l'enfant.
Les tantes s'aperçoivent de nouveau de la violence dont est victime leur nièce. La petite fille leur avoue ne plus en pouvoir d'être frappée par sa mère et sa belle-mère. Convoquées de nouveau par les gendarmes en juin, les deux femmes sont mises en garde à vue.
Si la petite fille n'a pas de séquelles physiques et a, depuis qu'elle vit chez sa famille repris 4 kilos, elle souffre de troubles post-traumatiques.
La mère a été condamnée à 36 mois d'emprisonnement, dont 18 mois avec sursis, avec notamment une obligation de soins, une indemnisation de la victime et un retrait de l'exercice de l'autorité parentale, qui n'est toutefois pas définitif.
La compagne a été condamnée à 36 mois d'emprisonnement, dont 18 mois avec sursis, avec une obligation de soins, une indemnisation de la victime et notamment une interdiction de rentrer en contact avec la victime et de travailler auprès des jeunes.

le Lundi 24 Août 2020 à 19:54 | Lu 8897 fois