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Oeuf, lait, caramel... ces substances qui s'invitent dans nos verres de vin


Oeuf, lait, caramel... ces substances qui s'invitent dans nos verres de vin
PARIS, 26 mai 2012 (AFP) - "Contient des traces de lait", "peut contenir des protéines d'oeuf". Ces mentions insolites devront figurer sur les bouteilles de vin concernées à compter du 1er juillet, en vertu d'une directive européenne visant à informer le consommateur de la présence d'allergènes dans les boissons alcoolisées.

Les protéines de lait et d'oeuf, le collagène de poisson, le caramel ou encore le bois de chêne font partie des nombreuses substances que les vignerons sont autorisés à mettre dans leurs cuves durant le processus de vinification (la transformation du jus de raisin en vin). Elles permettent de modifier le goût, l'aspect ou les caractéristiques de conservation du breuvage final.

"Produire du vin ne consiste pas seulement à presser du raisin et à laisser fermenter le jus. Il y a des étapes complexes, des pratiques et des produits autorisés", explique Marie-Madeleine Caillet, vice-présidente de l'Union des Oenologues de France.

Parmi ces substances, la caséine (protéine de lait) et l'ovalbumine (protéine d'oeuf) peuvent déclencher des allergies. Leur présence devra donc être mentionnée sur les étiquettes des vins mis en bouteille à partir du 1er juillet.

- pratique ancestrale -

"C'est une pratique ancestrale : les anciens mettaient du blanc d'oeuf dans les fûts afin de +coller+ le vin", explique Eric Serrano, directeur régional de l'Institut français de la vigne et du vin (IFVV).

Le collage consiste à utiliser des protéines pour agglomérer les particules présentes dans le moût et les faire tomber au fond de la cuve. "Ca permet d'éliminer les résidus du vin et ce sans aucun impact organoleptique" (sur le goût du breuvage), précise François Davaux, oenologue à l'IFVV.

"La caséine est plus utilisée pour les vins blancs et rosés, tandis que l'albumine d'oeuf est à réserver pour les vins rouges", précise Marie-Madeleine Caillet.

D'après l'EFSA, l'Autorité européenne de sécurité des aliments, les deux tiers des vins français sont stabilisés ou clarifiés avec des colles protéiques. Or 0,3% des adultes sont allergiques aux produits à base d'oeuf et 1% aux protéines de lait.

"Ces produits ne sont pas des ingrédients mais des auxiliaires technologiques: ils sont normalement éliminés dans les lies du vin ou par filtration", précise Marie-Madeleine Caillet. "Cependant, d'après nos études, moins de 10% des vins produits en France devront arborer une étiquette modifiée" parce qu'ils contiendront des traces de caséine ou d'albumine dans des proportions pouvant provoquer des réactions chez les personnes allergiques.

- oeuf, lait, caramel etc. -

Les vignerons qui ne souhaiteront pas écrire "protéine d'oeuf" ou "traces de lait" sur leurs étiquettes pourront toujours recourir à d'autres "colles" non allergènes, telles que les protéines de blé et de pois ou encore le collagène de poisson, tous autorisés par la réglementation européenne.

La liste de ces "pratiques et traitements oenologiques autorisés" durant la vinification est impressionnante : il est par exemple possible d'ajouter des morceaux de bois de chêne afin de reproduire les arômes des bons vieux fûts, ou encore du caramel, pour renforcer la couleur des vins de liqueur.

Certains de ces additifs sont naturels et donc autorisés également par les fédérations d'agriculture biologique telles que Nature et progrès.

"Le vin est l'un des seuls produits agroalimentaires dont l'étiquette ne doit pas mentionner la liste des ingrédients", rappelle Eric Reppert, caviste et grossiste chez "Vins étonnants" et spécialisés dans les vins issus de l'agriculture biologique.

"La filière a un défaut de communication, reconnaît Marie-Madeleine Caillet. Si le consommateur voit de la caséine parmi les ingrédients d'un yaourt il ne va pas se poser de question. Mais sur une étiquette de vin il va se demander ce que ça fait là."

Quant aux négociants en vin, notamment ceux qui exportent leurs bouteilles, ils s'arrachent les cheveux. C'est le cas d'Annick Groisy, chez le négociant Monmousseau, à Montrichard (Loire-et-Cher): "Depuis 2000, on doit déjà mentionner la présence de sulfites dans une dizaine de langues. Ensuite on a ajouté le logo mentionnant le danger pour les femmes enceintes. On n'aura bientôt plus de place sur nos étiquettes !"

hse/fga/ed

Rédigé par Par Hélène SEINGIER le Samedi 26 Mai 2012 à 05:45 | Lu 985 fois