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Vente des graines de paka : la décision du tribunal administratif pourrait changer la donne


Vente des graines de paka : la décision du tribunal administratif pourrait changer la donne
PAPEETE, le 13 novembre 2018. Le tribunal administratif a décidé d'annuler l’arrêté pris par le Pays le 7 mars dernier interdisant la vente des graines de cannabis. Il considère que le classement de ces graines dans la « liste des substances vénéneuses » est irrégulier puisque les graines « ne contiennent pas de substances actives » comme le THC. La juridiction a ainsi suivi l'avis du rapporteur public.


Dans sa décision, le tribunal administratif s'appuie sur un document de l'Office des Nations unies qui indique que les graines de paka ne contiennent pas de tétrahydrocannabinol (THC). Cette substance active aux effets psychoactifs est en revanche présente dans les plantes de cannabis, dont le commerce est interdit en métropole si la teneur en THC dépasse 0,2 %. "Il en ressort sans ambiguïté que les graines de cannabis ne contiennent pas la substance active susceptible de fonder leur classement comme substance vénéneuse", souligne le tribunal administratif.

Mais le gouvernement avait anticipé que l’arrêté de mars dernier pouvait être retoqué pour vice de forme. Il avait donc décidé de l'abroger et d'en reprendre un en juin dans la foulée pour interdire également la vente des graines de cannabis mais cette fois-ci, sur proposition du directeur de l’Agence de régulation sanitaire et sociale (Arass) comme le veut la procédure administrative.

Ce nouvel arrêté a également été attaqué par le gérant du Street Shop.

Pour rappel, le Street Shop a ouvert en février 2018 avant d'être l'objet d'une fermeture administrative début avril. Sur son étal, les clients pouvaient notamment trouver à la vente des graines de cannabis. En réaction, le gouvernement avait donc pris ce premier arrêté interdisant la vente des graines de cannais en les inscrivant sur la liste des « substances vénéneuses en médecine humaines et vétérinaires ».

Après l'audience le 16 octobre dernier, Thibault Millet, l’avocat de Nicolas Veyssière, importateur et fournisseur du Street Shop de Papeete, avait souligné que ces textes sont des "dispositions de circonstance" dont le "seul objet" est de "justifier la mise en œuvre de poursuites pénales" contre son client, "dans un intérêt politique, contre l’intérêt général et contre la réglementation".

Les deux gérants du Street Shop de Papeete et leur fournisseur comparaîtront par ailleurs devant le tribunal correctionnel le 29 janvier prochain pour détention, offre, cession de stupéfiants (en l’occurrence des graines de cannabis) et incitation à la consommation de stupéfiants,



Thibaud Millet, avocat de Nicolas Veyssière

" Nous nous félicitons de ce retour progressif à l'Etat de droit"

"L'arrêté qui avait classé les graines de cannabis en stupéfiant dans le seul but de justifier une poursuite pénale surréaliste contre nos clients a logiquement été annulé par le tribunal administratif comme nous nous y attendions. Il en résulte sur le plan pénal que les poursuites engagées du chef de trafic de stupéfiants contre nos clients pour avoir commercialisé des graines de cannabis en mars 2018 n'ont désormais plus de base légale et sont donc anéanties.

Un second arrêté avait été adopté le 7 juin 2018 pour régulariser un vice de procédure commis dans le premier et il sera lui aussi très certainement annulé par le tribunal administratif dans les mois à venir.

Des graines de cannabis demeurent donc encore aujourd'hui un produit stupéfiant en Polynésie jusqu'à ce que le second arrêté du 7 juin 2018 soit à son tour annulé ce qui devrait arriver très prochainement. Nous nous félicitons de ce retour progressif à l'Etat de droit en Polynésie française sur cette question qui a connu de graves dérapages ces derniers mois."

Rédigé par Mélanie Thomas le Mardi 13 Novembre 2018 à 09:10 | Lu 3083 fois