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Réforme de la PJ: rassemblements de policiers, magistrats et avocats dans toute la France


Crédit MEHDI FEDOUACH / AFP
Crédit MEHDI FEDOUACH / AFP
Paris, France | AFP | jeudi 16/03/2023 - Des centaines de policiers, magistrats et avocats se sont de nouveau rassemblés jeudi dans toute la France pour dénoncer le projet de réforme de la police judiciaire (PJ) souhaité par Gérald Darmanin. 

Tous les rassemblements étaient prévus à 12H00 devant les tribunaux judiciaires, à l'appel de l'Association nationale de la police judiciaire (ANPJ), créée en août pour organiser la riposte contre la réforme qui doit entrer en vigeur à la fin de l'année.

A Lyon, le président de l'ANPJ, Yann Bauzin, a fait valoir que "la validation de ce projet s'est faite sans réel dialogue social". "Avec la complaisance, si ce n'est dire la complicité, de certains syndicats", a-t-il asséné.

Son discours a été lu lors de tous les rassemblements.

Dans la capitale des Gaules, ils étaient environ 150 enquêteurs, magistrats, avocats et membres de l'association Anticor. 

"Le principal problème sera la baisse de la garde contre la délinquance organisée et la délinquance financière de haut niveau", a estimé Cédric Antoine, vice-président à la cour d'appel de Lyon et trésorier de l'antenne locale de l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire). 

A Paris, ils étaient aussi plus de 150 enquêteurs de la PJ, magistrats et avocats à deux pas du tribunal judiciaire. La réforme ne s'applique pas à Paris et la petite couronne, mais les enquêteurs des offices centraux de la PJ basés à Nanterre (Hauts-de-seine) ont fait le déplacement pour se joindre aux magistrats et avocats, majoritairement opposés au projet. Avec une large banderole blanche sur laquelle était inscrit "les offices contre la DDPN (Direction départementale de la police nationale)".

"Sidération, écoeurement, souffrance"

Les opposants au projet dénoncent le risque d'un "nivellement vers le bas" de la filière PJ, qui intègrerait les services d'investigation de la sécurité publique plombés par un stock énorme d'affaires en souffrance, ainsi qu'un poids du préfet dans les enquêtes.

La future réforme de la police nationale prévoit la mise en place d'un directeur départemental de la police nationale (DDPN), dépendant du préfet, qui aura autorité sur tous les services de police d'un département: renseignement, sécurité publique, police aux frontières (PAF) et PJ.

Face aux critiques de cet échelon jugé "inadapté" par les enquêteurs, les magistrats et les parlementaires, le ministre de l'Intérieur a annoncé début mars la création dans certains départements de directeurs interdépartementaux de la police nationale (DIPN) qui auront autorité sur la PJ et la PAF de plusieurs départements. Dans les autres, ce sont les DDPN qui auront autorité sur la PJ.

A Paris, des Pjistes brandissaient des pancartes "la DDPN tue la PJ" ou "Oui à la Police judiciaire, non a la départementalisation". "On est venu pour dire que personne n'a été entendu, la réforme se fait comme elle a été prévue initialement. On craint la disparition de la police judiciaire", a déploré Christophe Korell, enquêteur de PJ actuellement en détachement, représentant de l'ANPJ.

"On est très inquiets de cette réforme. Ce n'est pas de bon augure dans la lutte contre la criminalité organisée", a soupiré Stéphanie Caprin, secrétaire nationale de l'USM. Le député LFI Ugo Bernalicis est venu apporter son soutien à cette mobilisation.

"Nous n'avons absolument pas été écoutés par notre ministre ni par notre directeur général", a déploré à Versailles Stéphanie Duchatel, secrétaire générale de l'ANPJ.

A Rennes (Ille-et-Vilaine), ils étaient une cinquantaine avec leur brassard de la police judiciaire barré de noir. "Le passage en force de ce projet est une aberration", a dit l'un d'eux sous couvert d'anonymat.

A Marseille, un des bastions de la contestation, la lassitude et l'écoeurement dominaient chez la petite centaine de participants. "Tout le monde est dégoûté. Il y a même de la haine contre ce gouvernement", a confié un enquêteur à l'AFP sous couvert d'anonymat.

Côté magistrats, pour Florent Boitard, secrétaire général adjoint de l'USM, "si la réforme passe en l'état il ne sera plus possible d'enquêter efficacement au-delà du département".

A Bordeaux, ils étaient environ 150 pour dire leur "sidération, l'écoeurement et la souffrance" face à un "passage en force", et une cinquantaine à Strasbourg.

le Jeudi 16 Mars 2023 à 05:51 | Lu 451 fois