Les 23 troupes de danse et de chant achèvent leur préparation sans avoir la certitude de pouvoir monter sur scène (Crédit : Archive/Heiva i Tahiti Officiel).
Tahiti, le 30 juin 2025 – La grève à la Maison de la culture sera-t-elle solutionnée avant la soirée d’ouverture du Heiva i Tahiti, ce jeudi 3 juillet ? Mobilisés depuis plusieurs mois, les artistes poursuivent les répétitions et finalisent les costumes. Les chefs des troupes de danse et de chant interrogés ne cachent pas leurs inquiétudes vis-à-vis de cette situation inédite, qui ne sera pas sans conséquence si elle venait à se prolonger au vu de l’investissement personnel et financier.
C’est un stress supplémentaire dont les 3 000 artistes du Heiva i Tahiti se seraient bien passé. Le préavis de grève déposé lundi dernier par la Fédération de rassemblement des agents des administrations de Polynésie (Fraap) à la Maison de la culture – Te Fare Tauhiti Nui (TFTN) laisse planer le doute quant au maintien de l’événement, d’autant que les négociations de ces derniers jours n’ont pas permis d’éviter l’entrée en grève, ce lundi, y compris dans d’autres services du Pays.
Pour rappel, 16 points de revendication sont listés, dont “la création d’un minimum de 40 postes sur trois ans” et “l’instauration d’une prime spécifique pour compenser les conditions de travail atypiques (horaires décalés, forte pénibilité, implication technique constante)”.
C’est un stress supplémentaire dont les 3 000 artistes du Heiva i Tahiti se seraient bien passé. Le préavis de grève déposé lundi dernier par la Fédération de rassemblement des agents des administrations de Polynésie (Fraap) à la Maison de la culture – Te Fare Tauhiti Nui (TFTN) laisse planer le doute quant au maintien de l’événement, d’autant que les négociations de ces derniers jours n’ont pas permis d’éviter l’entrée en grève, ce lundi, y compris dans d’autres services du Pays.
Pour rappel, 16 points de revendication sont listés, dont “la création d’un minimum de 40 postes sur trois ans” et “l’instauration d’une prime spécifique pour compenser les conditions de travail atypiques (horaires décalés, forte pénibilité, implication technique constante)”.
“On ne peut pas toucher au Heiva”
Pour les 23 troupes de danse et de chant prêtes à se produire à To’atā – entre le jeudi 3 et le samedi 12 juillet pour les spectacles, puis entre le mercredi 16 et le samedi 19 juillet pour la remise des prix et les soirées des lauréats –, c’est l’onde de choc.
Au rendez-vous depuis 1992, le chef du groupe de chant Tamariki Rapa est rassuré par le fait que les 70 artistes de la troupe résident à Tahiti et ne sont donc pas impactés par la grève dans les transports aériens, mais pas pour le reste. “C’est très inquiétant. En tant qu’homme de la culture, je le dis simplement : on ne peut pas toucher au Heiva ! C’est notre patrimoine”, confie le compositeur et ra’atira. “Même pour le chant, ça demande de la préparation. Certains d’entre nous viennent de Papara, Toahotu ou Hitia’a jusqu’en ville pour répéter deux à trois fois par semaine. On a programmé nos deux dernières répétitions ces lundi et mardi soir, et vendredi 4 juillet, on monte à To’atā. On doit aussi participer à un festival à Faa’a”, précise-t-il, résolument tourné vers l’avenir, ayant déjà pour projet de revenir l’an prochain avec un groupe de danse.
Bien que son passage soit programmé pour la dernière soirée du samedi 12 juillet, la troupe de danse Teva i Tai n’en est pas moins plongée dans l’incertitude. “On prépare ce spectacle depuis plus d’un an et les répétitions ont commencé en février. À l’approche de la date fatidique, on répète 10 à 15 heures par semaine. Et notre costumerie a ouvert ses portes depuis le mois d’avril : tous les achats et productions ont été faits, en dehors du végétal”, remarque Heimoana Metua, qui supervise 200 artistes de la Presqu’île.
“Nous comprenons les revendications des équipes de TFTN, avec lesquelles nous partageons plusieurs grands événements chaque année, mais on se sent un peu pris en otage. On est partagé entre ces deux sentiments. On a investi beaucoup de temps, mais aussi d’argent, à hauteur de plus de 3 millions de francs. On est aussi inquiet par rapport au fait que de nombreux spectateurs attendent l’événement : il ne faut pas oublier que les soirées sont sold out ! Pour nous, c’est le résultat de plusieurs mois de travail qui risque de ne pas être vu. Se produire ailleurs, c’est possible, on tourne d’ailleurs souvent dans des heiva communaux, mais c’est compliqué dans le sens où le public a payé ses billets avec des attentes par rapport aux gradins, au son et aux lumières”, poursuit la cheffe de troupe. Elle reste toutefois “confiante” quant à la tenue du Heiva i Tahiti, proposant d’aider les techniciens avant et après les prestations dans “un élan de solidarité”.
Des enjeux colossaux
Du coté du groupe de chant Mehau, qui se présentera le jeudi 10 juillet en catégorie Tārava Raromata’i, le thème et les compositions sont prêts depuis décembre, tandis que les répétitions s’enchaînent depuis mars. “Je reste focus sur la préparation en attendant que la Maison de la culture nous donne elle-même des nouvelles. On ne met rien de côté pour le moment : on fait comme si ça allait se passer et ça va se passer, je pense. On est plutôt optimiste. On s’adaptera en cas de mauvaise nouvelle”, indique le chef de groupe, Steeve Reea.
Avec 11 millions de francs et plus de 2 000 heures de travail au compteur, l’ambiance est nettement plus tendue chez Hei Tahiti, première troupe de danse censée fouler la scène pour cette 144e édition. Les more ont été commandés dès novembre et les fleurs fraîches seront bientôt livrées pour finaliser les costumes végétaux. “On fait ce qu’on a à faire, comme si on dansait le 3 juillet”, confie Tiare Trompette-Dezerville, “exaspérée” par la situation. “C’est désolant et grave ! C’est vraiment une première. On prie les tupuna en espérant qu’un accord pourra être trouvé. Si ça ne devait pas se faire, je demanderais des dommages et intérêts en compensation. Par respect pour mes 216 artistes qui ont investi, je ne laisserai pas passer ça”, avertit la cheffe de troupe.
La situation est pesante, à plus d’un titre : “Ça fait 21 ans que la troupe existe et c’est mon neuvième Heiva. C’est un Heiva que je vis très mal administrativement : on doit se débrouiller à tous les niveaux, que ce soit sécuritaire ou réglementaire. Il n’y a pas assez de places en tribunes pour nos familles (...). À un moment donné, il faut réfléchir au statut juridique de cet établissement qui ne répond pas aux normes événementielles. Il faut arrêter de mettre des pansements et définir un projet sur dix ans pour la salle, pour le personnel et pour nous, les artistes”.
Pour l’heure, aucune annonce officielle n’a émané de la Maison de la culture. Sur les réseaux sociaux, la campagne promotionnelle autour du concours de danses et chants traditionnels se poursuit.