Le projet de l’Etat pour sécuriser la dette nucléaire


PAPEETE, 17 septembre 2019 - Un projet d’article du projet de loi de finances 2020 vise à créer un prélèvement sur recettes en faveur de la Polynésie française, pour financer la Dotation globale d’autonomie. Les élus de Tarahoi prévoient de débattre de cette mesure lors de la première séance de la session budgétaire, jeudi.
 
C’était une des demandes fortes du Pays, en marge des négociations avec Paris pour le toilettage du statut d’autonomie de la Polynésie française : trouver une solution permettant de sanctuariser le montant de la Dotation globale d’autonomie (DGA) autrement appelée "dette nucléaire".

Sujette aux variations annuelles des dotations financières allouées au ministère des outre-mer, cette dotation avait subi plusieurs réductions jusqu’à sa stabilisation à 10,8 milliards de francs (90,552 millions d’euros) depuis 2017, sur engagement du chef de l’Etat en réponse à une forte demande des élus locaux.  

Pour pérenniser cette dotation, une tentative de sanctuarisation de la DGA a été inscrite dans la loi organique statutaire adoptée fin mai dernier au Parlement. Mais l’amendement visant à transformer cette "dette nucléaire" en prélèvement sur recettes à compter de 2020, pour la mettre à l’abri de fluctuations annuelles, a été censuré par le Conseil constitutionnel fin juin dernier.

Le recours au prélèvement sur recettes permettrait à l’Etat de sortir la DGA du champ de son budget, mettant ainsi la dotation à l’abri des restrictions budgétaires, tout en sécurisant son montant et en simplifiant la gestion de ses versements.

La haute cour estime cependant que les dispositions de la loi organique créant ce prélèvement sur recettes pour financer la DGA étaient trop imprécises sur la destination et la détermination des dépenses en cause, et notamment sur les charges, liées, pour la Polynésie française, "aux déséquilibres d’ordre économique provoqués par l’arrêt des essais nucléaires". Le Conseil constitutionnel souligne aussi que de telles précisions peuvent être l’objet d’une loi ordinaire.

C’est dans ce contexte qu’un projet d’article pour la débudgétisation de la DGA est soumis par l’Etat à l’avis de l’assemblée de la Polynésie française, dans le cadre du projet de loi de finances 2020.

L’étude de ce projet de texte est prévue à l’ordre du jour de la première séance de la session budgétaire, ce jeudi à Tarahoi.

Le rapport présenté aux représentants de l’assemblée suggère à l’institution de donner un avis favorable à ce projet de création en faveur de la DGA d’un prélèvement sur recettes. Mais cet avis favorable prévoit d'être mis sous réserve, en premier, lieu d’indiquer "expressément le montant plancher de la dotation, soit 90,552 millions d’euros", alors que cette précision n’est pas donnée dans le projet de texte soumis par Paris à l’avis des élus. Le projet d'article devra également prévoir l’indexation de ce montant de base de la dotation sur l’indice général métropolitain des prix de détail, suggère aussi la commission des finances de l'assemblée dans le rapport qui sera présenté aux représentants polynésiens jeudi. 

La DGA fait partie, avec la DTIC (Dotation territoriale pour l'investissement des communes de 1 milliard Fcfp par an) et le 3IF (troisième instrument financier, de 6 milliards de francs par an) des dotations héritières du Fonds de reconversion économique de 18 milliards de Fcfp annuels créée par l'Etat en 1996 pour atténuer les effets sur l'économie polynésienne de l'arrêt des essais nucléaire français dans le Pacifique. 

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mardi 17 Septembre 2019 à 17:21 | Lu 1753 fois