Le plan de transition énergétique reporté


En juin dernier, les demandes d'autorisation d'installer des centrales photovoltaïques de grosses capacités ont été toutes refusées à la société Eco Energy. Cette dernière exploite pourtant depuis des années, une centrale solaire sur l'hypermarché de Punaauia.
PAPEETE, 29 septembre 2015 - Très largement en retard sur le calendrier prévu l'an dernier, le plan de transition énergétique doit venir bouleverser les habitudes en Polynésie pour permettre au territoire de se désengager progressivement de la dépendance de l'énergie d'origine fossile. Une semaine après la restitution du Plan climat énergie, les axes de cette transition énergétique devaient être présentés ce mercredi en conseil des ministres par Nuihau Laurey. Elles seront finalement présentées la semaine prochaine.

Les objectifs de cette transition énergétique sont connus : à moyen terme - à l'horizon 2020-, "atteindre 50% de production d'énergie électrique issue de source endogène et renouvelable". Un objectif écrit depuis décembre 2013 dans la Loi du Pays sur les principes directeurs de la politique énergétique polynésienne. A long terme, pour 2030, l'objectif est plus ambitieux encore : "atteindre 70% d'autonomie énergétique au moindre coût" avec une réduction de "la consommation d'énergie fossile de 30% en 2030 par rapport à 2012". C’étaient en tous cas les grands principes inscrits en fin d'année dernière lors du débat d'orientation budgétaire.

"Ce plan de transition énergétique va modéliser un changement de technologie parce qu'on va passer d'un système thermique à de nombreux systèmes isolés de production d'énergie renouvelable qui sont aléatoires, qui ne sont pas stables et qui nécessitent des coûts additionnels. Deuxièmement, ce plan va nécessiter des changements de comportement des entreprises, des particuliers, dans leur relation avec l'énergie. Il faudra de la communication pour que le grand public soit sensibilisé à ces questions. Enfin, il s'agit de présenter un nouveau modèle économique parce qu'on ne peut plus fonctionner avec des formules tarifaires qui sont incompréhensibles y compris pour ceux qui sont dans ces domaines depuis de nombreuses années" indiquait il y a quelques jours Nuihau Laurey sous sa casquette de ministre des énergies qu'il porte depuis un an.

La raison de ce retard à l'allumage, alors que la loi du Pays sur les principes directeurs de la politique énergétique dort dans des cartons depuis plus d'un an et demi ? Les tractations et négociations sur l'un des points épineux de ce plan, à savoir le prix de l'électricité. "La visite de la CRE (commission de régulation de l'énergie) nous a conduit à reporter un peu la présentation de ce plan car il y a des dispositions que l'on attendait en matière de transparence des prix, d'équité de traitement des consommateurs et des producteurs d'énergie renouvelable" admet Nuihau Laurey.

LE SOLEIL C'EST DURABLE MAIS PAS STABLE

On sait déjà que l'un des objectifs est de parvenir à faire baisser le prix de l'électricité qui est actuellement presque deux fois et demie plus cher à Tahiti qu'en métropole. "On doit à mon avis non seulement reconsidérer la formule tarifaire de l'électricité pour qu'elle soit complètement transparente, ce qui n'est pas le cas et le tribunal administratif l'a dit à plusieurs reprises, mais aussi deuxièmement simplifier la grille de tarification de l'électricité et aussi inciter les consommateurs à changer de comportement et éventuellement à s'équiper de matériels qui consomment moins, à s'équiper de panneaux photovoltaïques. Ceux qui le font voient des baisses de leurs factures d'électricité parfois supérieures à 30%. Tout ça ne dépend pas que du gouvernement. Le gouvernement mettra en place les conditions pour arriver à cela mais les particuliers aussi doivent apprendre à changer leurs comportements" poursuit Nuihau Laurey. Dans ces propos le ministre en charge des énergies table ainsi sur le développement du solaire pour la production d'électricité alors même que de gros projets de centrales photovoltaïques n'ont pas eu l'autorisation de s'installer au cours de ces derniers mois pour des raisons techniques. Un paradoxe qu'il va falloir résoudre.

Aussi, le texte qui va être proposé semble se concentrer essentiellement sur les équipements solaires des petits et moyens producteurs et aborde aussi les dispositifs de stockage de cette énergie électrique produite par le solaire, en journée. "La puissance publique se doit se développer la puissance photovoltaïque parce que c'est que nous souhaitons mais à un coût qui soit acceptable par la Collectivité. Il faut gérer cette partie là et aussi la stabilité du réseau" indique encore Nuihau Laurey. "Ce plan de transition énergétique va devoir modéliser un changement de technologie puisqu'on va passer d'un système thermique à de nombreux systèmes isolés de production d'énergie renouvelable qui sont aléatoires, qui ne sont pas stables et nécessitent des coûts additionnels".

On comprend à travers les propos du ministre que les différents acteurs et producteurs d'énergie électrique n'envisagent pas forcément cette transition énergétique sous des angles similaires et qu'il va falloir parfois trancher. Dans cet arbitrage sur l'origine de l'électricité qui arrive jusqu'au consommateur final, la TEP (la société de transport d'énergie électrique en Polynésie) qui est une société d'économie mixte du Pays pourrait devenir un acteur central. "On souhaite donner un peu plus de poids, d'indépendance et de neutralité à un acteur -qui pourrait être la TEP- dans l'arbitrage des contentieux dans ce domaine des producteurs d'électricité" admet Nuihau Laurey. Une déclaration qui fait écho à ce que disait Guy Stalens, le P-dg de la TEP il y a quelques semaines à peine, à l'occasion du trentenaire de la société : "Aujourd'hui la TEP se contente de transporter l'électricité, on peut imaginer un autre système où ce serait la TEP qui choisirait le placement de l'énergie. On a les moyens techniques aujourd'hui de faire du dispatching".


Rédigé par Mireille Loubet le Mardi 29 Septembre 2015 à 08:35 | Lu 1048 fois