Le Conseil d’Etat valide la loi sur les provisions pour renouvellement


PAPEETE, 24 octobre 2018 - Le Conseil d’Etat reconnait que les provisions pour renouvellement des immobilisations dans les délégations de services public sont une "dette du délégataire vis-à-vis de l’autorité délégante". Une loi du Pays adoptée à ce titre en mars dernier avait fait l’objet d’une procédure en annulation par la société EDT Engie.
 
S'il valide le texte dans ses grandes lignes, le Conseil d’Etat censure cependant deux dispositions accessoires prévues par l’article LP 6 de cette loi du Pays adoptée le 13 mars dernier pour encadrer provisions pour renouvellement des immobilisations dans les délégations de service public. Les points II et III de la LP 6 prévoyaient que les provisions pour renouvellement devenues sans objet puissent abonder un fonds pour travaux, sur un compte bancaire dédié. Et que ce compte bancaire soit géré sous le contrôle de l’autorité délégante, c’est-à-dire de la Polynésie française. Ces dispositions sont déclarées illégales par le Conseil d'Etat et ne pourront être promulguées.

Mais sur le fond, comme le relèvent également nos confrères de Radio 1 mardi, la haute cour valide la disposition principale de cette loi du Pays, qui était de constater que, lorsqu’elles ne sont pas consommées, "les provisions pour renouvellement sont une dette du délégataire vis-à-vis de l’autorité délégante", que les sommes qu’elles représentent ne peuvent "avoir pour objet ou pour effet de produire un revenu distribuable" et qu’à "l’issue du contrat de délégation de service public, le solde des provisions pour renouvellement non utilisé est restitué à l’autorité délégante".

Cette loi du Pays adoptée par l’assemblée en mars dernier avait fait l’objet d’un recours engagé par la société EDT Engie, fin avril. La haute cour a rendu sa décision jeudi dernier.

Une "dette", pas un bénéfice distribuable

Dans les faits, les provisions pour renouvellement des immobilisations sont constituées par les délégataires de service public en vue de financer la réalisation de travaux futurs, dans le cadre de l’entretien ou de la modernisation de l’ouvrage concédé, c’est-à-dire de leur outil de travail. Au plan comptable, cette dotation aux provisions pour renouvellement est mise en place parallèlement à une dotation aux amortissements. Son objet est de couvrir le différentiel de coût, s’il est positif, entre le bien qui sera renouvelé et le bien initial. En pratique, ces provisions pour renouvellement sont constituées à la longue par le concessionnaire au moyen d’avances facturées à l’usager. Par ce biais, le délégataire de service public obtient un lissage de ses charges et répercute cet effet sur le coût de la gestion de ses actifs facturé aux usagers.

Ces provisions constituent donc des sommes directement issues de la tarification aux usagers, en vue de dépenses futures. Elles n’appartiennent pas au délégataire, qui n’en est que le dépositaire. C'est ce principe que souhaitait entériner la loi du Pays attaquée par la société EDT Engie. Il est aujourd'hui validé par le Conseil d’Etat.

Il arrive en effet que les sommes constituées au titre des provisions pour renouvellement ne soient consommées qu’en partie par le délégataire (non-renouvellement de la concession de service public ; apparition de nouvelles technologies moins coûteuses ; renouvellement inutile en raison d’une durée de vie du bien plus longue que prévue, etc). Et c'est pour encadrer leur devenir comptable dans de tels cas, que la collectivité de Polynésie française a souhaité réglementer. L’objet de la loi du Pays aujourd'hui validée était d’inscrire dans le marbre que "les provisions pour renouvellement constituent une dette du délégataire vis-à-vis de l’autorité délégante" et non, lorsqu’elles ne sont que partiellement consommées, un bénéfice de l’exploitant, éventuellement distribuable.

Pour ce qui concerne EDT Engie, on estime que la société compte plus de 10 milliards de ces provisions pour renouvellement, en comptabilité.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mercredi 24 Octobre 2018 à 10:41 | Lu 1309 fois