
Sur ces 6 professeurs stagiaires, le vice-recteur a considéré que 3 d’entre eux ne résidaient pas en Polynésie l’année de leur concours, alors que le tribunal administratif avait expressément affirmé le contraire. Pour les 3 autres, il leur a opposé le fait que les conditions de suivi et d’évaluation de leur stage n’étaient manifestement pas remplies. Or, deux de ces stagiaires sont envoyés en métropole alors que deux autres restent ici dans la même discipline, avec les mêmes conditions de stage. Le troisième stagiaire a déjà été titularisé, pour la même fonction, dans un autre contexte. Ces 6 arrêtés d’affectation ne respectent donc pas l’autorité de la chose jugée par le tribunal ni les critères définis par le ministère de l’éducation nationale.
A deux semaines de la prise de fonction théorique des stagiaires en métropole, des questions restent toujours sans réponse, malgré de nombreuses tentatives de dialogue tant avec le vice-recteur, qu’avec le représentant de l’État en Polynésie française ou les ministères de l’éducation nationale et de l’outre-mer. Le directeur adjoint du cabinet de Marie-Luce Penchard, rencontré lors de la visite de cette dernière en Polynésie, n’a lui-même toujours pas obtenu d’informations du ministère de l’éducation nationale. Plus encore, les stagiaires qui ont contacté leur rectorat d’affectation n’ont obtenu aucune confirmation de leur accueil.
1/ Des établissements d’enseignement sont-ils susceptibles de les accueillir dans leurs académies respectives?
A ce jour, seule leur académie d’affectation est connue des stagiaires affectés en métropole, à laquelle ils sont tenus de se présenter le 05 ou le 12 mars 2012 (en fonction des dates de vacances d’hiver). Ils n’ont aucune information sur la ville ni sur l’établissement scolaire où ils sont censés exercer. Lorsqu’on sait qu’une académie regroupe plusieurs départements, on mesure l’étendue des difficultés qu’un tel déplacement implique. Comment en effet déménager sans savoir où l’on s’installe, surtout quand les arrêtés d’affectation précisent qu’ils sont prononcés « sans remboursement des frais de changement de résidence » ?
Contrairement à ce qui est trop souvent dit, les stagiaires se sont endettés pour suivre les études qui leur ont permis de passer le concours. De plus, bien que travaillant effectivement depuis le début de l’année scolaire, aucun n’a été jusqu’à ce jour rémunéré. Comment dans ce cas, assumer les dépenses exorbitantes qu’une telle affectation génère ?
2/ Seront-ils payés à la fin du mois de février pour le travail qu’ils effectuent depuis le début de l’année scolaire dans leurs établissements respectifs?
Les professeurs stagiaires, qui n'ont eu de cesse de s'impliquer fortement pour la formation des élèves du fenua (malgré des conditions matérielles personnelles difficiles, ils sont très assidus dans les établissements et à la formation), vivent cette situation comme une forte injustice. Comment l'État pourrait-il se permettre de ne pas rémunérer un travail réellement effectué auprès des élèves? Quels que soient les points de vue sur les affectations, tout travail réalisé mérite salaire.
3/ Les conditions de suivi et d’évaluation de stage seraient-elles remplies en métropole ?
Si malgré tout, les stagiaires parvenaient à résoudre les difficultés soulevées précédemment, la question de la poursuite du stage dispensé par la direction des enseignements secondaires de la Polynésie française, et suivi par les stagiaires depuis août 2011, se poserait.
Le dispositif de formation ayant été validé par des inspecteurs de la DES et du vice-rectorat,
les attestations de participation à la formation établies par la DES et les documents de suivi et de bilan devraient être pris en compte par le recteur de leur académie d'accueil. Pourtant, aucune assurance n’a été donnée à ce sujet : la formulation des arrêtés d’affectation impliquent que l’année règlementaire de stage soit effectuée dans l’académie de métropole.
Par ailleurs, suite au rapport 2012 de la Cour des comptes, particulièrement négatif à l'égard de la formation des professeurs stagiaires en métropole, on peut s'interroger sur la pertinence pédagogique et les raisons réelles d'une telle migration forcée.
http://www.ccomptes.fr/fr/CC/documents/RPA/Formation_initiale_et_recrutement_enseignants.pdf
Il est à noter qu’aucune réponse n’est fournie aux professeurs stagiaires, depuis fin janvier, de la part de ceux-là même qui ont émis ces arrêtés d’affectation. Malgré les nombreuses tentatives de dialogue, le vice-recteur se refuse à toute explication sur ses décisions.
L’affectation arbitraire de 6 professeurs stagiaires en métropole, au troisième trimestre de l’année scolaire, bénéficiera-t-elle aux élèves que la charte de l’éducation place au centre du système éducatif ? Le Comité de soutien à Éducation en Polynésie française se demande si cette mesure prise malgré tous les jugements contraires du tribunal administratif et contre toute logique n’est pas plutôt une marque de mépris vis-à-vis des stagiaires et de leur formation ou une volonté affirmée de remise en cause du statut d’autonomie de la Polynésie française. Elle traduit en tout cas une réelle difficulté au dialogue et à la concertation.
Compte tenu de l’urgence, les professeurs stagiaires attendent des réponses claires du ministère de l’éducation nationale et/ou des représentants de l’état en Polynésie française.
Moeava Grand
pour le Comité de soutien à l'Éducation en Polynésie française