Tahiti Infos

L'insécurité alimentaire aiguë à de nouveaux records dans le monde en 2021


EDUARDO SOTERAS / AFP
EDUARDO SOTERAS / AFP
Paris, France | AFP | mercredi 04/05/2022 - Avant même la guerre en Ukraine, l'insécurité alimentaire aiguë a atteint un nouveau sommet en 2021, frappant près de 40 millions de personnes supplémentaires sous l'effet des conflits, des crises climatiques et chocs économiques, alerte mercredi le réseau mondial sur les crises alimentaires.

L'an dernier, 193 millions de personnes dans 53 pays se trouvaient en situation d'insécurité alimentaire aiguë, avec un besoin d'aide d'urgence pour survivre.

Cela signifie que, même avec une assistance, beaucoup ont souffert de malnutrition aigüe, indiquent les 17 acteurs de ce réseau, créé en 2016 par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le Programme alimentaire mondial (PAM), l'Union européenne et des ONG. 

Cette classification englobe les niveaux 3 à 5 de l'échelle internationale de la sécurité alimentaire: "crise", "urgence" et "catastrophe".

Même si l'élargissement de la couverture géographique tire les chiffres vers le haut, ils n'ont cessé de croître "à un rythme alarmant", "avec des hausses ininterrompues chaque année depuis 2018" et un record en 2021, souligne le PAM.

L'invasion russe de l'Ukraine, en cours depuis fin février, promet d'aggraver les fragilités des pays très dépendants des exportations de céréales ou d'engrais russes et ukrainiens, comme la Somalie. De même que la terrible sécheresse qui frappe la Corne de l'Afrique en ce moment.

Les projections pour 2022, qui n'incluent à ce stade que 42 des 53 pays concernés, estiment que 179 à 181,1 millions de personnes pourraient souffrir d'insécurité alimentaire aiguë cette année.

La guerre en Ukraine "a déjà mis en évidence la nature interconnectée et la fragilité des systèmes alimentaires", relève la FAO, qui prévient que "les perspectives d'avenir ne sont pas bonnes".

"Ce que l'on voit aujourd'hui est inacceptable (...) nous devons garantir la durabilité des systèmes alimentaires, notamment pour les plus vulnérables", a défendu Qu Dongyu, directeur général de la FAO, lors d'une présentation du rapport mercredi.

"Personne ne doit être laissé de côté, nous devons nous attaquer aux causes profondes du problème, et pas seulement aux conséquences", a-t-il plaidé.

Accumulation des crises 

En Éthiopie, au Soudan du Sud ou à Madagascar, plus d'un demi-million de personnes ont eu besoin d'une "action urgente pour éviter l'effondrement généralisé des moyens de subsistance, la famine et la mort", ce chiffre ayant été multiplié par six depuis 2016. 

La hausse enregistrée en 2021 découle d'une "triple combinaison toxique de conflits, d'événements météorologiques extrêmes, et de chocs économiques", détaille la FAO.

Les conflits restent le principal facteur d'insécurité alimentaire pour 139 millions de personnes, les pays en proie à des crises politiques et humanitaires comme la République démocratique du Congo (RDC), l’Éthiopie, l'Afghanistan et le Yémen étant les plus affectés.

Les difficultés économiques liées à la pandémie de Covid-19 ont aussi poussé 30,2 millions de personnes vers la faim aiguë.

S'ajoutant aux épisodes de sécheresses extrêmes et maintenant à la guerre en Ukraine, les crises s'accumulent et sont "autant de facteurs qui exacerbent" les risques en Afrique, alertent les spécialistes.

Du sud de l'Éthiopie au nord du Kenya en passant par la Somalie, 20 millions d'habitants de la Corne de l'Afrique sont aujourd'hui menacés par la faim.

Selon Catherine Russell, directrice exécutive de l'Unicef, 10 millions d'enfants y ont besoin d'une assistance vitale en ce moment.

Et dans le monde, la mortalité infantile des moins de cinq ans a augmenté en 2021, a-t-elle signalé mercredi.

Pourtant, le montant de l'aide internationale versée à 55 pays et territoires était au niveau le plus bas enregistré depuis cinq ans, déplorent les membres du réseau.

Début avril, plusieurs pays avaient promis d'augmenter leur aide alimentaire allouée au Sahel et à l'Afrique de l'Ouest à hauteur d'1,79 milliard d'euros.

Toutefois, 1,5 milliard de dollars supplémentaires seraient nécessaires pour agir dès maintenant pendant la saison des semis, afin d'augmenter la production et rendre les populations moins dépendantes de l'aide, estime la FAO.

"On a des solutions et de l'argent dans les banques: il faut l'utiliser pour garantir la sécurité mondiale", a souhaité mercredi le directeur du PAM, David Beasly.

le Jeudi 5 Mai 2022 à 01:28 | Lu 224 fois