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Deux taureaux arrivent à Tahiti par avion


Après avoir fait le voyage en avion depuis Nouméa enfermés dans ces caisses en métal, les deux jeunes taureaux étaient impatients de retrouver leur liberté de mouvement, meuglant régulièrement. Les douanes ont donc hébergé deux "boites à meuh" géantes pendant quelques heures… Elles ont finalement été chargées sur un camion en direction de Taravao.
Après avoir fait le voyage en avion depuis Nouméa enfermés dans ces caisses en métal, les deux jeunes taureaux étaient impatients de retrouver leur liberté de mouvement, meuglant régulièrement. Les douanes ont donc hébergé deux "boites à meuh" géantes pendant quelques heures… Elles ont finalement été chargées sur un camion en direction de Taravao.
PAPEETE, le 22 juin 2019 - La scène s'est passée à l'aéroport de Tahiti-Fa'a'a vendredi dernier. Deux taureaux ont atterri par le vol Air Calin en provenance de Nouméa, ont passé les douanes puis sont montés dans un camion en direction de leur nouvelle vie à la Presque-Île… Rien d'anormal à ça. Ces mâles reproducteurs ont été achetés par la direction de l'Agriculture afin d'agrandir la diversité génétique des cheptels polynésiens.

Pour deux taureaux, venir en Polynésie par avion n'est pas une mince affaire. Il faut d'abord obtenir une certification, ce qui comprend une quarantaine d'un mois et une batterie d'examens. Puis il faut qu'ils se fassent enfermer dans une caisse en acier, direction l'aéroport. S'en suivent 5h20 de voyage dans la soute d'un vol Air Calin. Et encore des formalités à l'arrivée : examen vétérinaire, obtention de leurs papiers avec les douanes pour être naturalisés Polynésiens... Et enfin un dernier trajet en camion vers leur destination finale avant d'être enfin relâchés. En tout, il aura fallut plusieurs mois de préparation et un budget de 8 millions de francs pour permettre à Orion et Omygod d'atterrir à Tahiti ce vendredi 21 juin.

Nés et élevés en Nouvelle-Calédonie, les deux jeunes mâles vont désormais profiter des verts pâturages du Fenua sans plus jamais avoir à reprendre l'avion. Ils sont maintenant installés dans le corral de la direction de l'Agriculture à Taravao pour le restant de leur vie. Leur rôle : la reproduction avec les belles vaches tahitiennes. Après tous ces efforts, ils sont arrivés à l'Eldorado des taureaux, avec comme seule mission d'apporter leur diversité génétique aux troupeaux polynésiens.

Portraits de taureaux

Omygod, un an et demi, race Limousine
Omygod appartient à la race Limousine. C'est une race réputé pour ses qualités bouchères, sa viande fine, une bonne croissance et de belles masses musculaire. Cette race relativement rustique a de belles performances.

Orion, un an, race Santa Gertrudis
Orion est issu d'une race créée au Texas dans les années cinquante, avec 3/8e de sang brahmane et 5/8e de sang short horn. Les Santa Gertrudis sont des animaux bien conformés, même si leur conformation est moins belle que celle de la race limousine. Ils ont de bonnes qualités maternelles, donc ce sont des animaux assez rustiques qui demandent moins d'entretien au moment du vêlage. Le sang brahmane amène une résistance aux tiques qui permet de diminuer les traitements anti-parasitaires.

Valérie Antras, chargée des filières animales pour la direction de l'Agriculture

Ce n'est pas la première fois que des taureaux arrivent à Tahiti par avion depuis la Nouvelle-Calédonie. Quand ont eu lieu les précédents voyages ?
C'est la quatrième fois. La première importation a eu lieu en 2002, pour la station d'élevage de la direction de l'Agriculture. En 2011 puis en 2017 c'était un particulier qui les a fait venir par avion pour son exploitation laitière, avec des aides du Pays.
A la station nous n'élevons que des bovins destinés à l'exploitation bouchère. La plupart des élevages polynésiens sont destinés à la viande, il n'y a plus qu'une seule ferme qui produit du lait.

A quoi ces deux taureaux sont-ils destinés ?
Là c'est une opération qui va repeupler la station d'élevage, ce sont deux taureaux qui correspondent aux races que nous élevons à la station. Nous allons multiplier notre génétique. L'objectif est de produire des veaux, des femelles et des mâles, que nous allons mettre à la disposition des agriculteurs à un prix intéressant. Nos animaux sortent à 200 000 ou 300 000 francs pièce, alors que pour ces deux taureaux nous en avons eu pour huit millions de francs, avec le transport, les examens puisqu'il faut que l'on s'assure que l'on ne va pas apporter un certain nombre de maladies avec les animaux, puis un certain nombre de traitements. Et on paie aussi la génétique puisqu'en Calédonie ils ont une base de population beaucoup plus large, ça leur permet d'avoir une pression de sélection plus importante et de la variété. Nous avons environ 5000 bovins dans l'ensemble du Pays, à la station nous n'en avons qu'une centaine. Donc au bout d'un moment nous tournons en rond au niveau génétique, et il faut apporter du sang neuf. C'est une opération qu'il faudrait renouveler tous les 10 ans pour la station.

Pourquoi le Pays doit-il se charger de ces importations de taureaux reproducteurs ?
C'est par rapport aux revenus des exploitations de production de viande bovine. Nous sommes en train de travailler sur l'amélioration du marché, sur la valorisation de la viande bovine locale. Mais bien souvent c'est une production à caractère informelle, artisanale. Les exploitants n'ont pas les moyens de se payer des taureaux à 4 millions, même avec les aides du Pays. Et il y a les difficultés administratives, tout ce que ça représente de paperasse, négociations, avances de fonds… Pour un petit éleveur dans les îles, c'est compliqué, donc le Pays le prend en charge.

Les producteurs peuvent-ils vous acheter des saillies ?
Non, la station est un milieu fermé, on ne veut pas introduire de maladies. Chaque élevage a ses risques sanitaires. Le but est de vendre des veaux d'un certain âge aux producteurs. Ils prennent contact avec la direction de l'Agriculteur et on a une procédure. Mais ce n'est pas pour tout de suite. Ces deux taureaux sont encore jeunes, donc il faut encore leur laisser le temps de grandir. Ensuite les vaches ont neuf mois de gestation, donc les premiers veaux ne naîtrons pas avant un an et demi ou deux ans.

D'autres achats de bovins sont-ils prévus dans les années qui viennent ? Peut-être d'un autre pays ?
Déjà il n'y a que la Nouvelle-Calédonie qui correspond à nos critères sanitaires et avec qui nous avons un certificat sanitaire négocié. Mais effectivement il y a un projet. Nous avons aussi un troupeau charolais en Polynésie, qui n'est pas facile à élever en race pure pour les éleveurs mais qui présente de bonnes qualités pour les croisements, donc on va essayer de lancer une opération de transfert d'embryon dans les années qui viennent, il faudra sans doute engager une équipe australienne pour aller en Nouvelle-Calédonie prélever l'embryon puis venir à Tahiti pour l'implanter. Ça nous permettrait de renouveler les reproducteurs et d'avoir un taureau charolais à la station dans trois ans.

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Samedi 22 Juin 2019 à 18:05 | Lu 5979 fois