“C'était lui ou moi”


Tahiti, le 5 août 2025 – Une mère de famille inconnue de la justice a été condamnée lundi en comparution immédiate pour avoir donné un coup de couteau à son ex-compagnon qui avait l'interdiction d'entrer en contact avec elle. Elle a écopé de deux ans de prison dont un avec sursis probatoire pendant deux ans.

“À notre époque, on nous parle d'emprise et de contrôle coercitif mais personne n'a été capable de prendre la mesure de sa détresse alors qu'elle est victime de violences depuis des années.” Lors de l'audience de comparution immédiate lundi, Me May Gaymann a déploré que sa cliente, une femme de 27 ans poursuivie pour avoir poignardé son ex-compagnon, n'ait pas été protégée par son entourage et par la justice alors que l'intéressé avait l'interdiction d'entrer en contact avec elle.
 
Les faits reprochés à la jeune femme s'étaient déroulés le 1er août à Papeete dans un contexte très particulier. Malgré une interdiction de contact, l'ex-concubin se trouvait au domicile de la prévenue. Une dispute sur fond de jalousie avait alors éclaté entre les deux jeunes gens, parents d'un enfant. La jeune femme avait saisi un couteau de 30 cm avant de poignarder son ex-conjoint à la jambe.
 
Violences et harcèlement
 
Confrontée à son violent passage à l'acte et alors que la victime n'était pas présente à l'audience, la prévenue a dépeint lundi à la barre du tribunal une ancienne relation toxique émaillée par les violences physiques et sexuelles commises par son ex-conjoint, un homme fraîchement sorti de détention. “Tous les trois jours, je le chasse mais il revient”, a-t-elle raconté après avoir également indiqué qu'il l'espionnait sur son lieu de travail. Alors que le président du tribunal lui demandait si elle était consciente qu'elle aurait pu “tuer” la victime, la jeune femme a répondu : “Je sais que c'est grave mais c'était lui ou moi.”
 
Pour le procureur de la République, si la victime a sa “part de responsabilité”, il n'en demeure pas moins que la jeune femme a fait preuve d'une “hyper violence” et ce dans le cadre d'une relation “dysfonctionnelle et toxique”. Lors de ses réquisitions, le représentant du ministère public a demandé au tribunal de condamner la prévenue à 18 mois de prison dont 12 avec sursis probatoire pendant deux ans.
 
“Mécanisme de défense”
 
Pour la défense de la mise en cause, Me May Gaymann s'est ensuite attelée à démontrer que sa cliente avait saisi le couteau car cela représentait un “mécanisme de défense” : “Pourquoi ce passage à l'acte ? Ce genre de choses peut arriver car il y a tout un aspect psychologique qui n'a pas été pris en compte. C'est un contexte d'emprise dans lequel on ne peut pas tout expliquer par la logique.”
 
Après en avoir délibéré, le tribunal est allé au-delà des réquisitions du ministère public en condamnant la prévenue à deux ans de prison dont un avec sursis probatoire pendant deux ans, à une obligation de travail et à une interdiction de contact avec son ex-conjoint. Elle devra également lui verser 250 000 francs de dommages et intérêts alors qu'il avait demandé deux millions de francs au titre des “souffrances endurées”.

Rédigé par Garance Colbert le Mardi 5 Aout 2025 à 10:16 | Lu 5848 fois