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Anna-Bella Failloux promue professeure à l’Institut Pasteur


PAPEETE, le 21 février 2019 - Entomologiste, responsable de l’équipe Arbovirus et insectes vecteurs, Anna-Bella Failloux mène de nombreux travaux au sein de l’Institut Pasteur. Elle est professeure depuis, ce qui n’a pas émoussée son intérêt et ses motivations professionnelles.

"Le grade de professeur est le dernier grade à I’Institut Pasteur. C'est celui qui consacre une personne pour les réalisations faites dans une discipline", explique Anna-Bella Failloux. "La mienne est l'entomologie médicale, je suis entomologiste. Cette nomination est une reconnaissance des travaux réalisés."

L’entomologiste a été promue professeure au sein de l’Institut Pasteur il y a quelques semaines. Mais cela n’a pas bouleversé son quotidien professionnel. "Je continue le travail que je réalise déjà. Je suis responsable d'une équipe de 10 à 12 personnes dont les trois-quarts ne sont pas permanents. Ce sont des doctorants, post-doctorants et stagiaires du Réseau international des instituts Pasteur."

Son équipe s'appelle : Arbovirus et Insectes Vecteurs, elle fait partie du département de Virologie (voir encadré). Un département qui compte 2 700 personnes, 11 départements, environ 130 équipes.

Le moustique, serial killer


Anna-Bella Failloux est Polynésienne. Elle est née et a grandi à Tahiti. Ses parents tenaient un petit commerce et travaillaient sans compter. Elle s’est investie dans ses études à l’image de ses parents dans leur vie professionnelle.

Elle a toujours été fascinée par les insectes, "plutôt les insectes sociaux : fourmis, termites…". Le moustique, qui peut-être considéré comme l’animal le plus dangereux, a lui aussi réussi à séduire Anna-Bella Failloux. "Savez-vous que chaque année, il tue 600 000 personnes du paludisme et 30 000 de la dengue ? "

Après une scolarité à la Mennais, Anna-Bella Failloux a suivi des études de physiologie végétale à Université Paul Sabatier à Toulouse. Cinq ans plus tard, elle validait un DEA consacré aux phytophages (ravageurs de plantes) et poursuivait avec une thèse à l'Université d'Orsay (Paris XI) sur un vers parasite transmis par le moustique et responsable de la filariose de Bancroft.

À la suite de sa thèse, elle est revenue travailler à l'Institut Louis Malardé pendant 7 ans avant de rejoindre finalement l'Institut Pasteur Paris où elle est depuis maintenant 1994.

Toutes ces années de recherche lui ont apporté beaucoup de satisfaction intellectuelle. "On a émis des hypothèses, on les a testées sur notre modèle expérimental et on a abouti à des résultats qui nous ont permis de comprendre un phénomène observé."

Filariose, dengue, chikungunya

Depuis plus de 20 ans, ses recherches à l’Institut Pasteur ont été principalement orientées vers l’étude des maladies à transmission vectorielle (voir encadré). Elle s’est intéressée à la filariose de Bancroft, puis la dengue, la plus importante des arboviroses en termes de morbidité et de mortalité.

"De 1996 à 2004 dans l’unité d’Ecologie des systèmes vectoriels, les études entreprises en collaboration avec plusieurs instituts du Réseau international des Instituts Pasteur m’ont permis de définir l’organisation génétique des populations du moustique vecteur de la dengue, Aedes aegypti et son histoire évolutive depuis son aire d’origine en Afrique."

Plus tard, elle a travaillé sur le virus responsable de la fièvre de la Vallée du Rift montrant "qu’il pouvait s’affranchir de l’alternance d’hôtes (vertébré et invertébré) ". Ce qui avait un impact sur la sélection de variant viraux.

En 2006, ses travaux sur le chikungunya qui émergeait ont par exemple mis au jour un risque épidémique élevé pour les pays des régions tempérées et notamment, la France.

Les résultats des recherches d’Anna-Failloux sont nombreux. D’autres verront encore le jour.

Quelques dates

Depuis 2008 : responsable du groupe puis unité Arbovirus et insectes vecteurs à l’Institut Pasteur.
1998 à 2007 : chargée de recherche (département Infection et épidémiologie puis département de virologie).
2000 : habilitation à diriger la recherche (HDR), université Paris XII, France.
1996 à 1997 : assistante de recherche, dans l’unité d’Ecologie des systèmes vectoriels.
1994 à 1996 : post-doctorat, dans l’unité d’Écologie des systèmes vectoriels dirigée par le professeur François Rodhain, à l’Institut Pasteur.


Arbovirus et insectes vecteurs, AIV pour les intimes

Les arbovirus sont des types de virus transmis par des arthropodes hématophages. Les arthropodes hématophages sont des animaux (insectes, crustacés, arachnides, myriapodes) qui se nourrissent de sang.

Il existe de très nombreux arbovirus (environ 500). Certains sont bien connus en Polynésie : dengue, zika, chikungunya. Mais la Polynésie n’est pas le seul territoire concerné. Les arbovirus sévissent partout dans le monde avec des conséquences parfois des lourdes. La dengue par exemple touche 100 millions de personnes chaque année dont certaines décèdent (30 000). Des formes sévères apparaissent dans 1% des cas.

Les arbovirus sont transmis par des moustiques zoophiles qu’on appelle vecteur. Le vecteur est celui qui transmet.

Le moustique s’infecte en prenant son repas sur un animal ou un autre homme malade. Le virus arrive dans l’estomac du moustique. De là, il est capable de migrer jusqu’aux glandes salivaires. Une fois dans la salive, le virus est transmis à l’hôte par piqûre.

Les insectes vecteurs restent infectés toute leur vie.

Dans ce contexte, l’unité arbovirus et insectes vecteurs (AIV) collabore de façon privilégiée avec les instituts Pasteur du Réseau International qui compte aujourd’hui 33 instituts répartis sur les cinq continents. Les travaux qui y sont menés visent à "comprendre les facteurs conduisant à l’émergence des arbovirus en nous focalisant sur les interactions entre l’arbovirus, le moustique vecteur et l’environnement".


Rédigé par Delphine Barrais le Jeudi 21 Février 2019 à 08:11 | Lu 2159 fois