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À Tahiti, la « résilience » des îles face aux risques environnementaux


Tahiti, le 20 janvier 2020 – Un séminaire est organisé à Papeete du 20 au 21 janvier par le comité français du Conseil de coopération économique du Pacifique. Les membres de ce colloque ont planché sur la résilience des territoires insulaires de la zone Asie- Pacifique, plus particulièrement face aux "risques environnementaux".
 
Le comité français du Conseil de coopération économique du Pacifique (PECC) a organisé un séminaire sur le thème "Résilience des îles et territoires de la zone Asie-Pacifique", dans la salle de conseil du gouvernement, du 20 au 21 janvier. Lors de sa première journée, le colloque a abordé la question de la protection des îles et des zones littorales face à la montée des eaux et du changement climatique. Il était aussi question du rôle de l’économie circulaire pour une croissance économique durable.
La Polynésie est un des membres associés des 25 pays du PECC. Sous l'égide du PECC de France, elle est l'un des membres les plus touchés par les enjeux étudiés par le conseil. Durant ce séminaire, des universitaires, des chefs d'entreprises, des représentants des administrations et autorités publiques, se sont réunis pour proposer des exemples de politique régionale dans le contexte de réchauffement climatique. Selon Pascal Lamy, ce 5e séminaire a pour objectif de permettre aux représentants de l’ensemble de la communauté PECC d’"échanger les pratiques des différents pays en rapport avec la résilience". Il s'agit de la capacité à faire face à une menace ou à un événement anormal. Concept en vogue depuis quelques années, la résilience dans les îles s'attache à analyser les stratégies d'adaptation de ces territoires insulaires vis-à-vis des nouveaux enjeux qu'ils connaissent.
 
S'adapter face aux risques environnementaux
 
Les territoires insulaires sont particulièrement vulnérables aux conséquences du changement climatique. En ce qui concerne la montée des eaux par exemple -un risque majeur dans la zone Asie-Pacifique- de nombreux retours d'expérience ont été partagés. Les intervenants ont proposé des solutions pour protéger les zones côtières de ce risque. Au Chili, Juan Esteban Buttazzoni, avocat spécialisé en droit de l'environnement, a élaboré un projet de loi qui prend en compte les changements subis par les zones côtières. En effet, des permis de construire sont octroyés sans tenir compte du risque de montée des eaux et d'inondation encourus par les futurs résidents. Le projet de loi a pour ambition de répertorier les zones à risques, les communiquer aux services d'urbanisme municipaux et les insérer dans un cadre réglementaire qui régule leur construction.
Il a aussi été question du type de logement à privilégier. Dans les zones à risque, des infrastructures adaptées aux aléas sont construites dans le but de limiter les dommages en cas de catastrophe. De manière générale, la capacité d'adaptation des îles est perçue comme un moyen pour contribuer au soutien d’une croissance économique durable et à la protection de l'environnement des îles d'Asie-Pacifique.
Ariitaimai Amary

Interview

Pascal Lamy, président du PECC - France (FPECC)

« Les îles sont en train de revenir sur le devant de la scène »

 
Comment se caractérise la résilience en Polynésie ?
"La résilience est un concept très large et très vague, qui a à voir avec la résistance et la réactivité. On l'emploi beaucoup en Polynésie en raison des menaces qui proviennent du changement climatique et dont on sait qu'il peut impacter fortement les activités, l'habitat, les côtes, etc. Je crois que l'idée qui s'impose est qu'il faut organiser la politique, les villes, les cités, les États, le privé, le public, le gouvernement, toutes les générations, à faire face à des événements dont nous savons que la probabilité est plus forte qu'avant. Il s'agit d'une conscience du risque qui n'a plus rien à voir avec les exercices incendies qu'on a pu connaître jusqu'alors, il faut le faire à une plus grande échelle pour habituer les populations et les systèmes à ces probabilités. Personne ne souhaite que ça arrive. Mais l'expérience prouve que quand on est préparé, les dégâts sont beaucoup moins grands. Donc au fond, c'est un investissement dans la minimisation des dégâts."
 
En quoi l'économie circulaire est-elle un moyen de soutenir la résilience des territoires ?
"Ce qui est sûr, c’est qu'il y a énormément de travaux dans le monde concernant ce sujet. Il faut donc les faire connaître aux uns et aux autres. Ce qu'il faut souligner, c'est que le mode de l'économie circulaire, qui date d'avant la mode de la résilience, répond assez bien dans l'atténuation. L'économie circulaire, c'est une assurance, une résilience car si notre économie est plus autonome et moins sensible à des risques du type climatique par exemple, puisque c'est la manière dont on produit qui entraîne les risques climatiques. L'économie circulaire est donc moins exposée à ces aléas."
 
Comment la Polynésie peut-elle passer du statut de "victime" des gouvernances dans la région à réel acteur ?
"Je crois personnellement, avec mon observation des avis à l'international, de ce qui se passe dans les grandes conférences du climat et de la biodiversité, que les îles sont en train de revenir sur le devant de la scène. Pourquoi, c'est très simple. Parce qu'aujourd'hui, elles sont plus exposées et que le seul moyen qu'elles aient pour exposer leurs problèmes est de se faire entendre. Il y a quelque chose qui est en train de se passer. La région Pacifique s'organise et parle ici d'une seule voix, c'est primordial. C'est la donnée écologique qui fait qu'elles reviennent sur le devant, qu'elles pèsent davantage dans la balance, non pas du fait de sa population, mais de ce coefficient écologique."
 

le Lundi 20 Janvier 2020 à 16:43 | Lu 2888 fois