25 ans de prison pour l'assassin de Faa'a


Tahiti, le 3 décembre 2025 – Au terme de trois jours d'audience, le  quadragénaire jugé depuis lundi aux assises pour un assassinat commis le  25 janvier 2023 à Faa'a a été condamné à 25 ans de réclusion criminelle. 
 
Le procès de l'homme de 48 ans, jugé depuis lundi par la cour d'assises pour avoir porté 13 coups de couteau à l'une de ses connaissances le 25 janvier 2023 à Faa'a, s'est achevé mercredi avec les plaidoiries des avocats des parties civiles, de la défense, et les réquisitions de l'avocat général.
 
En fin de matinée, c'est pour défendre une “famille brisée” et “quatre orphelins” que Me Edouard Varrod a tout d'abord pris la parole en revenant sur la pathologie et la responsabilité de l'accusé. “Lundi, nous avons appris qu'il avait eu un emploi pendant longtemps, qu'il avait eu des compagnes, qu'il avait été traité pour sa bipolarité et qu'il est entouré par sa famille, c'étaient des éléments plutôt rassurants. Mais hier, il a fait des déclarations glaçantes en expliquant qu'il était retourné voir la victime pour voir la peur dans ses yeux et il a dit que cela lui avait apporté de la satisfaction.” Pour l'avocat, l'accusé a tué le père de famille pour “voir s'il en était capable”. Constituée pour défendre les intérêts de la mère et du frère de la victime, Me Béatrice Eyrignoux a quant à elle évoqué une “exécution volontaire” en rappelant qu'il n'y avait eu aucun signe de défense de l'accusé et que l'acte avait été très “rapide”.
 
La question centrale du discernement
 
Lors de ses réquisitions, l'avocat général a tenu à rendre hommage aux victimes que le système judiciaire a “tendance à oublier” alors que “la justice doit aussi être rendue dans leur intérêt”. Alors que l'accusé a assuré durant son procès que la victime l'avait frappé avec des pierres, le représentant du ministère public a jugé cette version “pas crédible” : “La seule version possible, c'est qu'il l'attendait avec ses armes et qu'il l'a planté. Il n'y avait pas de signes de défense” a-t-il poursuivi avant d'assurer que le geste était “prémédité”.
 
L'avocat général est ensuite revenu sur la question centrale de ce dossier, à savoir l'altération du discernement relevé par trois des quatre experts qui avaient examiné l'accusé. Il a en effet demandé aux jurés de tenir compte du fait qu'à l'époque des faits, l'accusé avait volontairement arrêté de prendre son traitement pour atteindre la phase maniaque de sa maladie qu'il a comparée, lors de l'audience, aux effets de l'ice. Le représentant du ministère public a donc conclu qu'il ne pouvait bénéficier du dispositif législatif qui prévoit qu'en cas d'altération, la peine est réduite du tiers.
 
Dernière des parties à prendre la parole, Me Isabelle Nougaro a demandé aux jurés de s'interroger sur la question de l'abolition du discernement de son client lors des faits en rappelant que ce dernier était malade et que son état de santé, quelques heures après les faits, avaient nécessité une hospitalisation.

Après en avoir délibéré, les jurés ont finalement suivi les réquisitions de l'avocat général. 

“J'ai vu mon père mourir sous mes yeux”

Alors que la vie de la victime avait été jusque-là peu évoquée, cette dernière journée d'audience aura été marquée par les auditions de ses proches qui ont décrit un père aimant et drôle qui avait pleinement assumé sa famille après le décès de sa femme en 2021. Première à s'avancer à la barre, l'une de ses filles a suscité une grande émotion tant chez les jurés que dans la salle en racontant qu'elle avait vu son père mourir sous ses yeux. “Il avait encore les yeux ouverts, il manquait de plus en plus d'air”, a-t-elle déclaré en pleurant avant d'expliquer qu'elle souhaitait que l'accusé ne “sorte jamais de prison” car il a commis un “acte prémédité”.
 
Sa sœur, aînée des quatre enfants de la fratrie, a ensuite évoqué le décès de leur mère et le courage de leur père qui avait affronté cette disparition en gérant, notamment, les crises car “on était des ados”. La jeune femme a également fait part de sa “culpabilité” : “Si j'avais pris un café avec lui ce matin-là, ça ne se serait pas passé ; mais on peut faire plein de choses avec un si.” Elle a ensuite raconté comment elle avait dû s'occuper de ses frères et sœurs à l'âge de 19 ans, apurer les dettes et subvenir à leurs besoins.
 
Dernière à être entendue, la mère de la victime, une femme de 77 ans, a quant à elle déploré la perte d'un enfant qu'elle a “porté, aimé et éduqué” et qui était “un gentil garçon généreux”. “Pourquoi cette cruauté ? Pourquoi aller jusqu'à 13 coups de couteau ?” a-t-elle dit en pleurs avant d'expliquer aux jurés de la cour s'en remettre à eux. Au terme de ces trois témoignages, l'accusé s'est adressé à la famille en tenant des propos révélateurs de sa pathologie : “Je compatis à votre souffrance, à votre douleur. Je vous demande pardon et puisque j'ai pris la vie de votre père de votre fils, je peux donner un organe.”
 
 
 

Rédigé par Garance Colbert le Jeudi 4 Décembre 2025 à 07:18 | Lu 2836 fois