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Une étude met en lumière des carences dans la formation des futurs médecins


PARIS, 19 mars 2014 (AFP) - Accès compliqué aux formations théoriques, coût trop élevé des enseignements complémentaires, défaut d'évaluation: une étude réalisée par un syndicat d'internes se montre critique à l'encontre de la formation des futurs médecins, mais les professionnels tempèrent.

Légalement, les internes doivent disposer de deux demi-journées de formation théorique par semaine, en plus de la pratique clinique effectuée dans les services hospitaliers.

Dans les faits, seulement 50% ont la possibilité de les prendre. Et en moyenne, 18 demi-journées par semestre sont prises sur les 54 obligatoires, selon cette enquête nationale réalisée par l'intersyndicat national des internes (Isni) auprès d'internes (3.270 réponses complètes recueillies). Les internes sont plus de 25.000, toute année confondue.

Pourquoi des internes ne participent-ils pas aux cours théoriques? Plus d'un tiers disent ne pas avoir été libérés de leur stage.

Les internes "sont devenus indispensables pour faire tourner les services, cela se fait au dépend de la formation", déplore Emmanuel Loeb, président de l'Isni qui veut "sanctuariser les deux demi-journées de formation obligatoire".

Les internes bloqués en stage, "c'est un réel souci", reconnaît Julien Poimboeuf, président du syndicat d'internes généralistes (ISNAR-IMG). Mais "en fonction des régions, des hôpitaux, des services, les choses peuvent être vraiment différentes, cela dépend aussi de la politique du chef de service", relativise-t-il.

Les disparités sont grandes entre les 51 spécialités, a également tempéré auprès de l'AFP le Pr Dominique Perrotin, président de la conférence des doyens de facultés de médecine. La demande d'accès aux cours théoriques des internes est "tout à fait justifiée", mais "la formation clinique, quand les internes sont auprès des malades, est aussi importante que la formation théorique. La formation est un tout", fait-il valoir.

Le coût constitue un autre frein à la formation pour près de 20% des internes ayant répondu à l'enquête de l'Isni. L'étude indique que les internes déboursent en moyenne 1.150 euros par an: aux 508 euros d'inscription, peuvent s'ajouter 264 euros pour une inscription en master, 167 euros pour un DESC (réalisé en plus du diplôme d'études spécialisées, DES), ainsi que de nombreux frais annexes tels que le transport, l'hébergement, la restauration etc., rappelle l'Isni.

- 'Responsabilité de l'Etat' -

Le contenu des cours est aussi incriminé par l'étude. De plus en plus d'internes complètent leur formation de base, le DES, par des formations ad-hoc car près de la moitié la juge insuffisante (45% des internes ayant répondu). Les formations complémentaires sont ainsi devenues "obligatoires" pour valider leur formation selon près de 20% d'entre eux.

"Dans le DES de cardiologie, il n'existe pas de formation à l'échographie cardiaque, qui est pourtant la base du métier de cardiologue. Comment se fait-il que les internes soient obligés de payer en plus pour une formation qui est à la base de leur métier?", s'interroge Etienne Pot de l'Isni, selon qui il en va de "la responsabilité de l'Etat français", c'est "à lui d'investir dans la formation".

"La formation globale au sein des DES doit être renforcée", reconnaît le Pr Perrotin. "Il faut améliorer le corpus de notre formation de 3e cycle (internat, ndlr), ce dont on est capable au sein de nos disciplines", assure-t-il.

L'internat, effectué après six années d'études en médecine, dure de 3 à 5 ans et comprend des stages semestriels, des enseignements théoriques (séminaires, cours mensuels...) et la préparation d'une thèse de recherche. Pour obtenir le diplôme et s'installer, l'interne doit valider les stages et, pour la partie théorique, soutenir une thèse et un mémoire.

L'évaluation est un autre point noir mis en avant par l'enquête. Les internes interrogés estiment que dans près de 60% des cas ils ne sont jamais évalués sur leurs connaissances théoriques au cours de leur internat.

Mais une réforme du 3e cycle introduisant l'évaluation de l'enseignement et des enseignants par les internes, et renforçant l'évaluation clinique et théorique des étudiants doit être validée au printemps par les ministères de tutelle (Santé et Enseignement supérieur), a indiqué à l'AFP le Pr Perrotin.

Rédigé par () le Mercredi 19 Mars 2014 à 07:19 | Lu 789 fois