Tahiti Infos

Teva Rohfritsch "nous n'accepterons pas de projeter notre Pays vers une indépendance de misère"


Teva Rohfritsch "nous n'accepterons pas de projeter notre Pays vers une indépendance de misère"
PAPEETE, vendredi 17 mai 2013. Après Antony Géros président du groupe UPLD à l'assemblée, Teva Rohfritsch, président du groupe A Tia Porinetia a pris la parole au sein de l'hémicycle territorial pour un discours de "candidature" à la présidence du Pays d'une durée de 45 minutes. Il a tout d'abord voulu tirer un trait sur la campagne électorale qui s'est achevée le 5 mai dernier. "La campagne a laissé quelques cicatrices qu'il faudra surmonter" mettant en scène "des polémiques et les contradictions des gouvernements passés, comme par exemple, où sont passés les milliards versés par la France au cours des 30 dernières années ? Où est passé le Taui ?"

En filigrane, Teva Rohfritsch a adressé quelques critiques à l'égard de Gaston Flosse, président du TaHoeraa grand vainqueur des élections territoriales et futur président de la Polynésie française, avec quelques piques comme "il faut avoir le courage de changer de génération politique". Le président d'A Tia Porinetia a souhaité mettre en valeur le fait que la présence de son groupe au sein de l'assemblée démontre "qu'une autre idée de l'autonomie solide et crédible a vu le jour". Un groupe qui sera attentif à ce que "la toile d'araignée ne se tisse pas de nouveau en Polynésie, mais de porter un regard objectif et vigilant sur certains tristes palmarès". Teva Rohfritsch ajoutait "il ne s'agit pas de juger mais de prévenir". Evoquant une autonomie plurielle, Teva Rohfritsch avertissait : "Il faudra que la majorité accepte d'entendre ceux qui ne feront pas toujours la révérence complice".

Au sujet de la résolution polynésienne adoptée quelques heures avant à l'ONU, Teva Rohfritsch a mis en garde "les amis indépendantistes" d'une certaine chimère de ce processus et des éventuels dangers qui pourraient en découler. "Nous n'accepterons pas de projeter notre Pays vers une indépendance de misère" a-t-il déclaré.

DISCOURS DE CANDIDATURE A LA PRESIDENCE DE LA POLYNESIE FRANCAISE TEVA ROHFRITSCH

17 MAI 2013

Nous avons été élus le 5 mai dernier au terme d’une campagne électorale particulièrement intense qui n’a pas manqué de piment et parfois de travers. Si tous les coups semblent permis ils finissent par laisser quelques cicatrices qu’il va nous falloir tous consentir à panser en souhaitant que le temps et la sagesse nous permettent non pas de les oublier mais bien les surmonter. Nous portons tous la lourde responsabilité d’exercer le mandat qui nous a été confié pendant les cinq années et je voudrais vous féliciter toutes et tous pour votre élection mais aussi remercier l’ensemble des électeurs polynésiens qui ont choisi d’exercer ce droit fondamental de vote que la République française nous permet d’exercer en toute liberté afin de nous gouverner librement et démocratiquement.

La campagne n’a pas manqué de thèmes, même si je regrette que les programmes n’aient pas pu être davantage approfondis et que les polémiques lancées habilement par certains maîtres en la matière aient pu prospérer plus que de mesure. Les électeurs ont été néanmoins le miroir des contradictions et faux pas des gouvernances passées en nous renvoyant quelques formules bien avisées : où sont passés les milliards déversés par la France pendant trente ans ? Pourquoi tant de guerres politiques pour renverser les uns au bénéfice des autres ? Pourquoi tant d’affaires et de scandales dans notre pays ? Mais aussi, où est passé le TAUI qui brandissait le changement en étendard ? ».

Il est vrai que les données que nous connaissons sont alarmantes : les prix n’arrêtent pas d’augmenter, il n’y a pas suffisamment d’emplois pour nos enfants, la misère s’est installée dans les rues, les jeunes sont abandonnés dans les quartiers. L’insécurité frappe nos familles alors que nous avions bâti un pays d’amour et de fraternité. Les SDF sont de plus en plus nombreux dans les rues de Papeete. La prostitution et les jeux sont sous nos fenêtres. La violence est une réalité.

Les enjeux de cette mandature sont immenses. Les promesses électorales que certains ont pu formuler pour gagner ces élections ont fait naître une attente encore plus colossale et je crois savoir que les files d’attentes ont commencé avec femmes et enfants sous les bras car dès le 6 mai avions- nous pu entendre vous aurez du travail ! faaitoito mea ma !
Nous restons persuadés qu’il nous faut avoir le courage de changer de génération politique et de changer l’organisation de notre Pays. A TI’A PORINETIA veut ramener du bon sens et une gestion plus saine des fonds publics, dire NON à ceux qui veulent encore jeter vos impôts par les fenêtres, ceux qui veulent nous endetter sur plusieurs générations. Du respect, de l’amour, de l’humilité, de la proximité et de la détermination doivent constituer le socle des valeurs et des principes pour guider l’action de nos élus au service de nos populations. Notre gouvernement doit s’occuper du quotidien de nos populations, de l’urgence et de la détresse sociale des plus démunis, de l’insertion de nos jeunes dans notre société qui ne leur parle plus, de l’avenir de nos familles, de l’emploi et de l’activité pour nos entreprises, des transports et de la circulation qui empoisonnent la vie des familles de Tahiti chaque jour, de l’équilibre de notre protection sociale, de la pertinence et de l’efficacité de notre système de santé et de la couverture sanitaire de notre Pays, des conditions de vie du troisième et du quatrième âge qui seront des défis financiers mais avant tout humains d’une population qui vit plus longtemps mais aussi de plus en plus isolée et malade d’un mode de vie importé qui a aussi véhiculé ses pathologies comme le diabète, le cancer et l’obésité.

Les résultats des dernières élections nous prouvent qu’une autre idée de l’autonomie, solide et crédible, a vu le jour. Le vrai changement est enfin possible dans notre pays. Il prendra le temps qu’il faut mais le mouvement est enclenché. Si 75% des électeurs polynésiens ont affirmé haut et fort leur attachement à la République française, 35421 voix se sont exprimées en faveur de l’autonomie au sein de la République mais une autonomie différente de celle prônée par le Tahoeraa Huiraatira et nous vous demandons de respecter ce vote et ce choix des électeurs chers collègues du tahoeraa huiraatira. Nous sommes fiers de ce résultat, je suis fier de ce résultat acquis à la force de notre travail au contact de nos populations, de nos familles, de nos demandeurs d’emplois, de nos jeunes, de nos entreprises de ceux et celles qui ont été laissés au bord du chemin du développement, de notre population qui veut tourner la page et bâtir différemment notre Pays.

Le temps de la campagne est fini. Celui du travail, du débat, de la construction, de la perspective est arrivé. Je suis convaincu que nous saurons tous et tous ensemble refuser un retour des affaires judiciaires, des arrangements entre amis et des pratiques douteuses, refuser la mise à genou des maires pour obtenir des subventions et le paiement des arriérés du FIP doit être une priorité du prochain gouvernement, refuser la coloration des aides publiques pour obtenir une maison ou un emploi, dire non à cette grand toile d’araignée qui avait été tissée pour contrôler et surveiller tout le pays, tous les secteurs économiques, toutes nos entreprises. Nous ne voulons plus de ça dans notre Pays !

Je suis certain que les 25 nouveaux entrants érigés en trophés fièrement hier par notre président de l’assemblée sauront aussi porter ce regard objectif et vigilant sur les gouvernances passées et les dérives que la gestion de notre Pays a pu connaître nous procurant ainsi de tristes palmarès au sein de la République. Je compte sur vous chers collègues pour garder la fraîcheur et le discernement propre à ceux qui découvrent et veulent bâtir avec l’élan du renouveau et l’honnêteté accrochée au corps.

Qui sommes-nous pour juger devez-vous penser ? Il ne s’agit pas de juger mais de prévenir. Je suis un optimiste têtu et veux croire encore que le changement est possible et que quel que soit notre âge nous soyons capables de tirer les leçons du passé. Vous aurez la lourde responsabilité de choisir et conduire cet avenir pour nos enfants. Nous sommes prêts à travailler en bonne intelligence avec vous. Encore faut-il accepter de nous entendre et de nous associer à notre juste place. Nous serons là à chaque fois pour vous rappeler que la Polynésie est plurielle même si elle saura s’unir dans les moments difficiles, la famille autonomiste est plurielle mais elle saura faire bloc dans l’intérêt supérieur du Pays et nous l’avons démontré hier lors du vote du vœu de l’assemblée contre la réinscription de la Polynésie française sur la liste des Pays à décoloniser.

Le travail constructif est possible chers amis de la majorité orange, mais à condition que vous acceptiez d’entendre ce qui ne fera pas toujours l’éloge aveugle ou la révérence complice, et pour accepter d’entendre, Monsieur le Président de l’assemblée, il faut déjà commencer par accepter de distribuer équitablement la parole au sein de notre hémicycle. L’épisode d’hier quand bien même nous connaissons vos talents de mise en scène et votre capacité d’adaptation, ne nous a pas rassuré sur la mise en œuvre réelle des engagements que vous avez pris lors de votre discours inaugural. Mais je reste aussi là un optimiste têtu et je suis sûr que le calme reviendra à l’assemblée dès lors que vous serez vous-même libéré de quelques contraintes et que la présidente du groupe majoritaire pourra enfin s’installer dans ses fonctions.

Le jeu des institutions donne à la majorité le loisir de considérer ou non la place de l’opposition dans la répartition des responsabilités que nous aurons à assumer au nom des Polynésiens et aux travaux que nous pourrons mener dans le cadre des commissions intérieures ou extérieures. Nous respecterons vos choix mais souhaitons vous rappeler encore une fois et humblement que nos 8 sièges représentent 35421 électeurs soit 4300 électeur pour chaque siège contre 1630 pour chacun des vôtres chers amis qui avez bénéficié de cette écrasante prime majoritaire. Il ne s’agit pas pour nous de fanfaronner mais de faire appel à votre sens de la démocratie et du civisme.

A TI'A PORINETIA propose aux Polynésiens une nouvelle voie politique, une autonomie vraie, sincère, digne et responsable, dans un lien confiant et durable avec la République française, dans une relation forte mais aussi franche et directe avec l’Etat. Une autonomie qui reconnait l’identité des archipels et leur laisse une vraie place dans le jeu des institutions pour exprimer et conduire le développement auxquels nos habitants de ces îles aspirent légitimement sans subir aussi fortement ce centralisme tahitien. Le partage des pouvoirs et des compétences nécessite une réelle mise en œuvre de la décentralisation et la réelle prise en compte de nos communes dans la construction et la gestion de notre Pays et du quotidien de nos populations.
Etre autonomiste c’est aussi savoir se lever dans les moments de tension et nous serons prêts à le faire pour défendre les intérêts des Polynésiens. Nous nous lèverons et ferons entendre nos voix pour protéger la maison Polynésie de l’extérieur comme de l’intérieur, y compris dans les couloirs de l’autonomie où certains ne manqueront pas de s’agiter sous un drapeaux et un hymne pour mieux préparer l’évènement d’un Tahiti Nui dont l’esprit les relents se rapprochent bien d’un certain Maohi nui prôné plus officiellement par d’autres.

L’autonomie juridique à marche forcée en distribuant les restes de la rente atomique sans compter et surtout sans construire au préalable une économie réelle nous parait toute aussi dévastatrice à terme que cette idée de l’indépendance avant tout quitte à condamner nos populations à la misère sur plusieurs générations et nous reléguer aux rangs des mendiants de l’aide publique internationale. Ces deux axes politiques, ces deux visions d’un autre temps ne sont pas les seules solutions qui se posent aux Polynésiens.

Arrêtons ces divisions stériles voire puériles qui ne mènent nulle part si ce n’est à deux rêves portés par deux hommes qui ne peuvent aujourd’hui voir l’avenir de la même façon que nous pouvons le voir pour nos enfants. Avec tout le respect que nous portons à nos anciens, il est temps de passer à autre chose ! Nous sommes 270000 habitants éparpillés sur une surface maritime vaste comme l’Europe. Nous avons des défis immenses à relever à notre échelle et pourtant si simples et accessibles au regard des enjeux du monde actuel. Apprenons à faire mieux avec ce qu’on a. Rassemblons-nous et construisons notre Pays tous ensemble.

Appelons la France et l’Etat à prendre toutes ses responsabilités sur ces 50 dernières années qui ont projeté notre Pays dans un tourbillon d’argent malheureusement mal orienté avec certes de réelles avancées en faveur de la modernisation de notre société polynésienne mais aussi un profond clivage et une véritable fracture du développement tel un fleuve torrentiel sur lequel peuvent naviguer seuls ceux et celles pourvus de navires quand d’autres restent sur les berges et contemplent le ballet de ces navigateurs fiers et majestueux qui pourtant n’ont jamais quitté le fleuve ni fait de très long voyage ni affronté de très grandes tempêtes. Tous devraient se souvenir que ce fleuve fut artificiel et que ces pseudos navigateurs ne font que flotter sur un courant alimenté et orienté. Nulle conquête, nul mérite si ce n’est celui de se maintenir à flot tant que le fleuve produira ses richesses. Il faudra bien accoster un jour et là le peuple laissé sur les berges attend ces grands voyageurs de l’autre rive.

Vous aurez chers amis de la majorité la lourde responsabilité de faire en sorte que ce fleuve irrigue nos populations avant qu’il ne vienne à tarir et que tous les polynésiens puissent à leur tour bénéficier plus largement de ses richesses, d’une économie qu’il nous faudra bâtir sur des basses réelles et solides. Le partage doit être le maître-mot de la mandature.
J’appelle le prochain gouvernement à engager rapidement le temps des réformes et à prendre les mesures d’urgence en faveur du redressement de nos finances publiques, en faveur du recentrage de l’administration et du service public polynésien sur ses missions essentielles parmi lesquelles l’éducation et la santé nous semblent revêtir une importance capitale. L’efficacité et le pragmatisme doivent primer sur la recherche du spectacle et du chatoyant, le cout et la rigueur doivent primer sur la dépense et la démesure, toutes deux filles de l’ambition mal contenue.

Nous encouragerons les programmes et actions qui permettront à notre jeunesse d’entrer dans le monde des entreprises et d’accéder à l’emploi, l’alternance et l’apprentissage sont pour nous deux rouages essentiels pour y parvenir, aux dispositifs de solidarité et d’insertion économique qui permettront aux plus démunis de retrouver de la dignité, aux sdf de sortir de leur situation de détresse humaine que nous ne pouvons continuer à ignorer monsieur le maire de Papeete, aux entreprises de retrouver le chemin de l’activité et de la croissance, aux artistes de s’exprimer fièrement et faire vivre notre culture, de valoriser notre patrimoine et nos sites ancestraux, aux nouveaux métiers que nous pourrons inventer dans les domaines de l’environnement, de la culture justement, des services à la personne, du tourisme et des loisirs qui restent les moteurs de l’ économie que nous devons consolider pour l’avenir. Nous soutiendrons les initiatives en faveur du redressement de la perle noire et de la filière pêche. Pas simplement celle du port de Papeete mais aussi à l’attention de nos pêcheurs côtiers, poti marara et lagonaires, mais aussi en faveur de nos agriculteurs et éleveurs parents pauvres d’une économie poussée vers l’argent en oubliant ce lien solidaire qu’ils assurent pour nourrir nos populations.

Nous appellerons l’Etat à prendre toutes ses responsabilités à nos côtés pour sortir notre Pays de cette crise sans précédents dont les fondements reposent nous le savons tous sur cette page de notre histoire qui doit se tourner, cette mutation de la société polynésienne que nous devons accompagner. L’Etat comme les dirigeants de la Polynésie française, tous ensemble, nous devons prendre la mesure de ces enjeux qui pèsent sur notre terre polynésienne que l’histoire, les navigateurs et les rois ont choisi de placer au sein du giron du Pays des droits de l’homme, faisant ainsi de nous au fil du temps des citoyens français à part entière.

Je suis pour ma part fier de cette double appartenance à cette terre qui m’a vu naître et qui fait de moi un Polynésien mais aussi à cette République des droits de l’homme et des libertés fondamentales, cette nation que nos anciens ont défendu dans les conflits majeurs du 20ème siècle et au nom de laquelle de nombreux soldats polynésiens se battent encore aujourd’hui sur les fronts ouverts pour défendre une certaine idée du monde et de nos civilisations. Je pense aussi à eux en cet instant.
Nous n’ignorons pas bien sûr que la France a fait le choix de Moruroa et Fangataufa pour effectuer des essais nucléaires aériens puis souterrains afin d’accéder au rang de puissance nucléaire mondiale et l’actualité entre la Corée du Nord et les Etats-Unis nous rappelle combien cette position revêt une importance stratégique capitale pour la sécurité de nos familles. Jamais une telle menace n’a été si proche de nous et nous ne pouvons l’ignorer.

Le choix du site des essais a donc bien été fait en Polynésie et non sous le plateau de Saclay, à Clermont Ferrand, Toulouse ou Ajaccio. Je ne reviendrai pas sur les choix qui ont présidé ni sur les décisions prises par certains de nos prédécesseurs dans cette assemblée mais j’appelle la République et avec elle la nation française à savoir reconnaître ce fait nucléaire et les conséquences durables et réels de ces choix sur la vie des Polynésiens, notre santé, notre environnement, notre économie, notre société. La France n’a pas simplement une dette qu’il faudrait monnayer, mais une responsabilité pleine et entière qu’elle doit reconnaître, assumer et engager devant les Polynésiens pour que nous puissions enfin tourner cette page et retrouver, dans un dialogue franc, sincère et apaisé, le chemin de l’avenir et du bien-être commun que nous appelons de nos vœux.
Nous voulons construire une Polynésie de tolérance et de respect, une Polynésie de travail et de prospérité mais aussi une Polynésie fière de son histoire qui fasse le choix de l’appartenance plutôt que de le subir, le choix de l’ouverture plutôt que du repli, le choix de l’avenir en préservant notre bien le plus précieux : notre identité polynésienne que fondent nos valeurs, notre culture et notre attachement à notre terre et nos lagons nourriciers.

Ne cédons pas aux chants des sirènes de certains grands pays qui n’ont d’autres visées que d’étendre encore leur hégémonie bien envahissantes dans nos petites îles du Pacifique, de capter nos ressources alimentaires pour tenter de combler les énormes besoins qu’on fait naître leur démographie écrasante, sans commune mesure avec les besoins simples mais réels que nous devons assurer pour nos populations polynésiennes sur les années à venir. L’alimentation, la qualité de l’air, l’eau et l’énergie sont les défis des 50 prochaines années. Prenons le virage des énergies nouvelles, redonnons sa place au secteur primaire, à l’agriculture, la pêche durable et l’élevage. Valorisons nos ressources, nos produits durablement et sans excès et ne bradons pas nos ressources aux nations les plus généreuses pour vivre mieux 5 ou 10 ans de plus ou dans l’espoir d’une prochaine élection, si nous savons d’avance qu’elle manqueront cruellement aux générations futures à qui nous empruntons temporairement les terres laissées par nos ancêtres.

Chers amis indépendantistes, et je n’aime pas ce terme car il est connoté d’une certaine forme de sectarisme que nous ne devons pas accepter dans notre Pays, rejoignez-nous et construisons ensemble, autonomistes et indépendantistes cette économie réelle, cette autonomie économique et financière préalable à toute autre évolution institutionnelle que nos enfants seront un jour en droit de choisir légitimement. Je ne remets pas en cause le principe du libre choix et du libre arbitre, de l’auto-détermination, car je crois en une société de choix et de partage volontaire plutôt qu’en celle de la résignation et de la contrainte. Et ce n’est pas cette résolution de New York qui permettra une réelle capacité à nos enfants un jour de voler de leurs propres ailes mais bien notre capacité à tous à faire taire nos égos, nos rancœurs et nos ambitions personnelles pour un seul but, une seule passion, un seul dessein qui est celui de bâtir notre Pays. Si nous voulons offrir à notre peuple, à nos populations, et à tous ceux qui auront choisi de vivre en Polynésie et de partager cette fierté de la construction d’un Pays, si nous voulons un jour offrir un vrai choix à nos enfants nous devons le préparer, le bâtir et non le décréter ou l’imposer par des faits politiques. L’économie est la base de toute avancée sociale et le bien être, le bonheur de nos populations est le socle de toute avancée politique. Nous n’accepterons jamais de projeter notre Pays dans une indépendance de misère pour satisfaire la course contre la montre des hommes qui ne la vivront pas. Nous ne pouvons accepter l’autonomie artificielle sous perfusion qui consiste à vivre sans penser au lendemain en tablant sur une France généreuse et prospère et ce fleuve qui ne tarira jamais. Bâtissons cette autonomie, donnons-lui tous ensemble du corps, du sens et de la perspective !

Nous voici tous réunis ce matin pour désigner le futur Président de la Polynésie française. Forts de nos 8 représentants et de nos 35421 électeurs, je n’ai pas la prétention d’emporter aujourd’hui ce scrutin, sauf bien entendu si dans un élan de courage et d’audace vous arriviez à faire le choix de cette autre voie que je vous propose de bâtir tous ensemble pour notre Pays. Ce n’est peut être que partie remise et je vous remercie de votre écoute attentive. En démocrate respectueux du verdict des urnes je tiens à saluer par avance celui qui devrait présider la gestion des affaires de notre Pays sur cette mandature.
A TI’A PORINETIA vous adresse ses sincères vœux de réussite au nom des Polynésiens qui n’ont pas choisi de vous soutenir mais qui néanmoins espèrent désormais que vous saurez trouver la force et la raison nécessaires à redonner de la dignité à nos familles et de l’espoir à nos enfants, sans jamais oublier que ni la démesure, ni le saupoudrage ne sauraient consister en une solution durable pour les Polynésiens et en vous appelant aussi à tirer les leçons du passé que la sagesse de vos années, Monsieur le Président, doit certainement vous amener à contempler différemment.

Permettez-moi de finir mon intervention Monsieur le Président en reprenant des paroles prononcées il y a quelques années dans cette assemblée par l’un de nos illustres prédécesseurs.
« Cette société ne pourra se bâtir ni se développer sans le changement de nos motivations et de nos comportements. Il y a un choix plus fondamental encore que l’option entre la gauche et la droite. La vraie alternative est entre le bien et le mal, dont l’appréciation se forme au niveau de notre conscience. ni la droite, ni la gauche n’ont le monopole du bien ou le monopole du mal. Dans le futur, les critères économiques doivent céder le pas à des critères moraux et spirituels. Sinon, quel que soit le régime de l’avenir, nous construirons une société irrémédiablement matérialiste, où l’individu perdra à jamais sa dignité et sa liberté.

Honnêteté pureté, dévouement et amour sont les composantes nécessaires de toute communauté. Refuser aujourd’hui de mettre un terme à l’abus de nos droits et privilèges, à nos habitudes de fraude, à nos compromissions, à notre réflexe permanent de défense catégorielle rendrait vain demain tout changement de structure.
Les dirigeants politiques et les responsables des organisations économiques et sociales se doivent de montrer la voie en appliquant à eux-mêmes, dans leur action comme dans leurs déclarations, l’exigence de la vérité.

Si nous voulons être solidaires des plus défavorisés, nous ne pouvons prétendre, pour nous-mêmes et pour nos familles, à un niveau de vie toujours en hausse et un confort toujours en accru ; il nous faut consentir à partager, donc choisir entre la satisfaction de nos appétits égoïstes et la solidarité à laquelle nous convient les immenses besoins de la communauté polynésienne. »
Ces mots ont été prononcés le 22 juillet 1977, lors de l’élection du conseil de gouvernement, par Monsieur Francis Ariioehau SANFORD et raisonnent toujours avec autant de pertinence aujourd’hui près de quatre décennies plus tard.
Mesdames, messieurs, c’est à nous, c’est à vous de choisir de vous lever pour l’avenir de notre Polynésie.

A TI’A TO PORINETIA.
A TI’A ! A TIKA ! A TU !


Rédigé par Mireille Loubet le Vendredi 17 Mai 2013 à 10:31 | Lu 2491 fois