Tahiti Infos

Rencontre avec Jean Cuneo, champion d'escrime de 64 ans


Jean Cunéo, devant les jeunes de l'Escrime Tiki Club à l'entrainement
Jean Cunéo, devant les jeunes de l'Escrime Tiki Club à l'entrainement
PAPEETE, le 25 septembre 2017 - Auréolé de deux médailles d'argent et une médaille de bronze en escrime aux jeux d'Asie, Jean Cuneo est revenu à Tahiti et se prépare aux prochains jeux d'Océanie. Surtout, le champion de 64 ans veut partager avec tous ceux qui vieillissent ses deux secrets tout simples pour garder la forme : le sport et une alimentation saine.

Jean Cuneo a remporté deux médailles d'argent (en fleuret et en épée) et une médaille de bronze par équipe contre de grandes nations sportives il y a dix jours. Cet exploit a été réalisé à Bangkok lors des troisièmes Jeux d'Asie d'escrime vétéran.

De retour à Tahiti, dans son club "l'Escrime Tiki Club" de Punaauia, nous l'avons rencontré en compagnie des sportifs qui se préparent à aller aux prochains Jeux d'Océanie. Une dizaine de cadets partira pour Nouméa, et ils étaient avides d'entendre le récit des aventures de leur champion. Jean Cuneo leur a obligeamment raconté son histoire : "La première médaille c'était au fleuret, un samedi. Alors, comment ça se passe… ça a commencé par les matchs de pool, donc on affronte tous les autres compétiteurs. Et là tu élimines un, deux, trois, quatre athlètes, tu te dis que tu seras bien placé dans le tableau. Tu rencontres en quart de finale un gars d'une autre pool… Et là tu le bats à plate couture. Tu te dis 'mince, soit ils sont tous nuls soit j'ai dû progresser'… Là forcément tu tombes en demi-finale sur un mec où ça devient difficile. Tu as tellement envie de gagner que tu deviens précautionneux, tu maîtrises tes coups, et c'est ce qu'il s'est passé pour moi, je n'ai pas pu jouer mon jeu, j'étais sur la défensive. J'étais devant un Iranien et je l'ai battu de justesse, 7-5. A ce moment-là, la victoire c'est une délivrance ! J'étais en feu et je me disais 'le Japonais, je vais le manger'. Mais le Japonais… C'est une grosse pointure ! C'est un ex-champion du monde il a de la bouteille et en plus c'est un gaucher. Ça a été un massacre, il a gagné 10 à 2, je n'avais rien à faire ! Il a pris un point dès le début et après j'ai été obligé d'attaquer sans cesse pour essaie de remonter, et il se contentait de me contrer et de prendre encore plus d'avance."

L'histoire continue : "La deuxième médaille était en épée. Elle était inespérée parce que ma discipline c'est plutôt le fleuret, mais j'ai suivi les conseils du coach, qui m'avait dit 'Jean, à l'épée tu n'as rien à perdre, donc fait de l'opposition, touche ceux qui s'approchent trop et reste en défense.' Ça a bien fonctionné ! (…) Et je me suis encore retrouvé en finale. C'était le tenant du titre, un colonel Thaïlandais… Et là, il va vraiment falloir que je travaille, parce que ce n'est pas passé. Après, la dernière médaille c'était avec l'équipe d'Océanie, on étaient invités tous ensembles à ces jeux d'Asie, et on a eu une médaille de bronze à l'épée, et c'était sympa finalement, assez agréable."

Pour l'athlète, ces sorties à l'étranger sont capitales : "C'est important les compétitions à l'extérieur, parce que tu te confrontes à des sportifs qui ont de l'expérience et tu progresses. Si je restais ici je me confronterais à des jeunes de 16 ou 17 ans, mais de mon âge il n'y en a pas, donc il faut absolument que j'aille à l'extérieur, quitte à faire des compétitions senior. C'est ce qu'on va faire en octobre à Auckland pour les Océanias, on part à trois. C'est un peu prétentieux, à la compétition ils auront entre 20 et 60 ans, donc je vais me prendre une grosse claque. Mais ce n'est pas grave, on y va pour apprendre, faire de son mieux et progresser, c'est un chouette challenge."

LES DEUX SECRETS DE LA RÉUSSITE SPORTIVE APRÈS 60 ANS

Pour Jean Cuneo, le sport est indispensable aux personnes qui commencent à prendre de l'âge. "J'ai commencé l'escrime fin 2011, car je pense que si on veut garder une bonne condition physique, il faut se trouver un loisir sportif. En fait je viens de la boxe, c'est un sport que j'aime beaucoup. Je suis à Tahiti depuis très longtemps, et ici c'est un pays de boxe. Et quand je me suis mis à l'épée, j'ai retrouvé les mêmes sensations qu'à la boxe ! Juste qu'au lieu d'avoir le gauche devant, on a la droite devant avec l'épée. D'ailleurs je pense que beaucoup de Polynésiens devraient s'épanouir dans l'épée car ils y retrouveraient les mêmes sensations, donc je pense que c'est un sport qui va se développer ici, surtout si les anciens comme moi montrons l'exemple !"

Il profite de l'occasion pour partager ses conseils à ces sportifs aux cheveux gris : "Le secret est tout simple, si tu as une condition physique ça permet de faire la différence, ça je le répète souvent, même aux jeunes. Ne faites pas une fixation sur la technique. Ce sont les fondamentaux et c'est important, mais si après tu te déplaces comme une mule sur la piste… J'ai éliminé comme ça une dizaine de personnes, parce qu'ils ont été surpris par ma vitesse, et j'avais plus d'endurance."

Une endurance qu'il a retrouvé grâce à ses enfants qui l'ont poussé à participer à des marathons avec eux : "Je fais beaucoup de courses avec mes enfants… C'est eux qui m'ont poussé à m'y mettre avec eux. Du coup on a fait des marathons ensembles. Pour le dernier, en décembre dernier, on courrait jusqu'à 70 kilomètres par semaine pour s’entraîner ! Et je mange sain, je pense que ça joue. Ma femme et mon fils ont monté cette ferme en permaculture dans le jardin, la ferme Tipapa. Après sept jours en Thaïlande, je n'avais qu'une hâte, c'était de rentrer et de manger de la nourriture vivante, des légumes du jardin qui n'ont pas été traités ! Je pense que je tire une partie de mon énergie de ça."


Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Lundi 25 Septembre 2017 à 17:34 | Lu 1333 fois