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Licence mobile refusée à Viti : le Pays peine à convaincre en référé


Me Mourad Mikou, Bernard Foray, directeur de Viti et Mario Nouveau, président de la SAS.
Me Mourad Mikou, Bernard Foray, directeur de Viti et Mario Nouveau, président de la SAS.
PAPEETE, 25 octobre 2017 - La société Viti demande la communication des rapports d’instruction ayant conduit le Pays à la décision de rejet implicite de sa demande d’agrément d’une licence d’opérateur de téléphonie mobile, le 8 octobre dernier. Le juge des référés pourrait bien donner raison à cette requête. Décision jeudi matin "au plus tard".

La société par actions simplifiée (SAS) Viti, actuellement fournisseur d’accès à internet (FAI) réitère depuis bientôt deux ans une demande d'agrément pour une licence d'opérateur de téléphonie mobile en Polynésie française. Le secteur est ouvert à la concurrence depuis 2003. Sa dernière demande, le 8 juin dernier, est encore restée lettre morte. Le code des postes et télécommunications laissait pourtant au gouvernement un délai légal de quatre mois pour répondre. Sa non réponse, passé le 8 octobre, est de fait une décision de rejet implicite.

Il se trouve pourtant qu’en cas de rejet, la décision de l’exécutif devait être motivée. C'est en vertu de cette obligation que Viti a saisi mercredi le tribunal administratif de la Polynésie française dans le cadre d’un référé "mesures utiles".

La société de Mario Nouveau demande à la justice d’enjoindre le Pays (sous astreinte de 5 millions Fcfp par jour de retard) à lui communiquer sous 8 jours deux rapports d’instruction commandés par l’exécutif dans le cadre de l’étude de ses demandes : celui de l’Idate, une société de conseils spécialisée qui s’était intéressée en 2016 aux données macro-économiques du secteur des télécommunications en Polynésie française ; et le rapport d’instruction de la DGEN remis le 8 septembre dernier à l’administration. Un second document dans lequel la Direction générale de l’économie numérique s’est intéressé à la capacité technique et financière de Viti à faire face durablement aux obligations liées aux conditions d’exercice de l’activité d’opérateur de téléphonie mobile pour lequel elle sollicite un agrément.

Si le Pays a demandé au "juge des évidences" de rejeter cette demande, mercredi, pour la société Viti l’urgence se défend dans la mesure où la loi prévoit un délai de 2 mois pour engager une requête sur le fond contre la décision de rejet implicite dont elle s’estime victime. Ce délai arrive à échéance le 9 décembre prochain. La société estime que les rapports d’instruction sur lesquels a pu s’appuyer le Pays, dans le cadre de l’étude de sa demande, sont nécessaires à la formulation de sa requête devant le juge du fond.

Le Pays estime pour sa part qu’une telle communication serait contraire au "secret des délibérations" de l'exécutif. Mercredi, le juge des évidences est resté dubitatif devant la nature de ce "secret", concernant des rapports d'expertise.

La décision du juge des référés est annoncée pour jeudi matin "au plus tard". Il se pourrait bien qu’il s’agisse d’une "décision avant dire droit" par laquelle le président du tribunal administratif ordonne au Pays de lui communiquer les fameux rapports d'instruction afin d’estimer leur nature confidentielle, avant de les communiquer éventuellement à la société requérante.

Si l'avocat du Pays n'a pas souhaité faire de commentaire à l'issue de l'audience, l’avocat de Viti a dénoncé une "volonté manifeste" de la part du Pays "de retarder au maximum l’ouverture à la concurrence effective dans le secteur des télécommunications. Pourquoi ? Parce qu’il y a un pilier historique, dans ce domaine, l’OPT, qui génère un chiffre d’affaires colossal (…). Il y a un intérêt majeur, pour le Pays, à protéger ce domaine des télécommunications, extrêmement lucratif en termes de retombées financières et de dividendes (…). Quelle autre raison pourrait justifier le refus d’un nouvel agrément (pour de la téléphonie mobile, NDLR), alors que l’autorité polynésienne de la concurrence appelle de ces vœux l’attribution de ces licences, afin d’améliorer le service aux consommateurs et baisser les tarifs", s’est emporté Me Mikou, en pointant un comportement d’obstruction.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mercredi 25 Octobre 2017 à 16:51 | Lu 7260 fois