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Levée de fonds pour offrir une voiture adaptée à un lycéen myopathe


Teiva utilise le mini-bus adapté de la fraternité chrétienne pour rentrer chez lui le soir. Le véhicule n'est malheureusement pas disponible le matin.
Teiva utilise le mini-bus adapté de la fraternité chrétienne pour rentrer chez lui le soir. Le véhicule n'est malheureusement pas disponible le matin.
PAPEETE, le 16 novembre 2017 - C'est un problème très quotidien d'une famille avec un enfant handicapé : comment l'amener à l'école tous les matins sans véhicule adapté ? Les administrations ne sont pas équipées, et les familles doivent se débrouiller. La maman de Teiva a décidé de prendre les choses en main et d'organiser des évènements caritatifs pour financer l'achat d'une voiture adaptée au fauteuil roulant.

Le jeune Teiva, 14 ans, est atteint de la myopathie de Duchenne, une maladie génétique rare qui affaiblit progressivement tous les muscles de son corps. Elle ne touche que 2500 personnes dans toute la France, et n'a pas encore de remède. Parmi les difficiles conséquences de la myopathie, Teiva est coincé dans un fauteuil roulant électrique. Mais le courageux adolescent ne laisse pas la maladie l'abattre. Il suit une scolarité normale dans une classe de troisième du collège de Arue, et est même un bon élève.

Aujourd'hui, il arrive à vivre la vie d'un collégien presque comme les autres. Son établissement est adapté aux fauteuils roulants et il arrive à se rendre au collège seul le matin. Il parcoure, en 20 minutes, la route entre son fare (près de la mairie de Arue) et le collège de Arue à la force du moteur électrique de son fauteuil. La fraternité chrétienne, qui dispose de l'un des rares véhicules adaptés sur le territoire, vient le récupérer le soir. Et sinon il arrive toujours à débrouiller. Une situation qui permet à Teiva de suivre une scolarité quasi-normale, avec le problème du transport qui ne réapparaît que lors des sorties scolaires. Dans ces cas là, même une visite au musée lui est interdite faute de moyen de locomotion adapté dans l’éducation polynésienne.

Mais tout va changer l'année prochaine avec l'entrée de Teiva au lycée, dans une classe de seconde générale au lycée Raapoto. L'établissement est bien plus éloigné de chez lui et l'itinéraire est semé d'obstacles difficilement praticables en fauteuil roulant. C'est pourquoi sa mère, Roberta, aimerait remplacer sa voiture actuelle pour s'équiper à la place d'un véhicule adapté au transport des fauteuils.

Offrir à Teiva la chance d'aller au lycée

Dans notre interview (voir ci-contre), Roberta nous raconte ses nombreuses démarches auprès des diverses autorités en matière d'éducation ou de handicap pour assurer le transport de son fils. Mais ses demandes sont restées sans réponses et elle se résout désormais à s'occuper seule du transport de Teiva. Pour cela, elle va devoir compter sur la solidarité des Polynésiens pour récolter les 2 millions de francs qui lui manquent pour financer l'achat et l'importation d'un mini-van équipé d'une rampe d'accès adaptée. Elle a demandé plusieurs devis et le modèle le moins cher qu'elle ait trouvé, un VW Caddy Maxi Life vendu comme une "occasion récente", arrive tout de même à Papeete à 3,5 millions de francs, avant les taxes.

Elle a donc créé l'association "Solidarité Teiva Myopathie de Duchenne" et lancé un appel aux dons. La structure permettra d'éviter certaines taxes et assurera que l'utilisation des fonds généreusement offerts par le public sera totalement transparente. L'aspect administratif étant réglé, Roberta a commencé à organiser une série d'événements caritatifs. Une première soirée cinéma a eu lieu début novembre, et deux autres événements sont prévus pour la fin du mois (voir encadré). Elle a également reçu le soutien de plusieurs entreprises du Territoire, tant financier que logistique pour l'organisation de ses évènements, lui permettant de déjà se rapprocher de son objectif.

Avec tant d'énergie positive et si l'élan de solidarité se poursuit, Teiva aura la chance de pouvoir continuer sa scolarité sans tracas à la prochaine rentrée. Et lui-même se prend à rêver qu'avec un véhicule adapté, il pourra vivre comme les autres adolescents : sorties en ville, concerts ou anniversaires des copains. Et quel plus beau cadeau pourrait-on offrir à ce jeune homme à qui sa maladie génétique, incurable pour le moment, promet une espérance de vie de moins de 30 ans...


Deux évènements pour soutenir l'association "Solidarité Teiva Myopathie de Duchenne"

Journée récréative à Arue
- Une journée de détente en famille avec des toboggans gonflables et des activités volleyball et football
- Le samedi 18 novembre à Vaipoopoo (la plage en face de la maison de James Norman Hall) de 9h à 17h

FitDance aux jardins de Paofai
- Une fin d'après-midi sport avec une session de FitDance offerte par Wake up
- Le samedi 25 novembre dans les jardins de Paofai, place de l'Autonomie, de 16h à 18h
- Pour réserver un billet en avance : "Tautu Roberta" sur Facebook, ou au 87 77 43 24

Roberta Tautu, maman de Teiva

Teiva et sa maman au collège de Arue, où le jeune handicapé peut se rendre seul le matin. Une facilité qu'il n'aura plus l'année prochaine, après son entrée au lycée.
Teiva et sa maman au collège de Arue, où le jeune handicapé peut se rendre seul le matin. Une facilité qu'il n'aura plus l'année prochaine, après son entrée au lycée.
"Finalement c'est moins le problème de sa maladie qui nous affecte, plutôt nos relations avec le système"

Comment se passe le quotidien avec un enfant atteint de Myopathie de Duchenne ?
Et bien ce n'est pas facile. Malgré toutes les difficultés que l'on rencontre, on essaie de rester positif. Entre l'éducation, faire la chambre adaptée pour Teiva, ça fait beaucoup de travail pour moi aussi. J'ai arrêté de travailler pour m'occuper de mon fils. Au quotidien, comme il ne marche plus, à la maison c'est mon mari qui se charge de le porter sur son fauteuil électrique, et par la suite Teiva vient tous les matins au collège seul. Il est obligé de passer par le côté mer, il y a trop d’embûches côté montagne. Au niveau batterie, il a juste assez pour faire l'aller-retour en passant à la fraternité.

Pour ce transport du matin, tu as essayé de demander de l'aide au ministère de l’Éducation ?
Oui, ça va faire deux ans que j'ai demandé de l'aide pour le transport de Teiva, aux deux ministres successives, mais je n'ai eu aucune réponse. Pas plus de réponse de la commission des transports. Apparemment il faut qu'on se débrouille, pourtant je pense que Teiva n'est pas le seul enfant en fauteuil roulant de Tahiti, il y a d'autres élèves à transporter… Pour l'instant il n'y a que la fraternité chrétienne et l'IIME de Hamuta qui ont le véhicule. La fraternité passe le prendre le soir, c'est financé par la DGEE. Moi ma voiture n'est pas adaptée. On m'a proposé de faire la navette, je porte Teiva dans la voiture et je prends le fauteuil manuel, mais je ne peux pas le porter, il est trop lourd !
C'est dommage que l'éducation n'ait pas de véhicule. Pourtant je pense qu'un transport adapté serait utile à plusieurs enfants du fenua. Il pourraient au moins rencontrer les parents pour voir avec nous comment on peut s'arranger pour le transport… Parce que pour le moment il y a des difficultés. Déjà par temps de pluie il ne peut pas aller à l'école, ensuite il ne peut pas participer aux sorties scolaires… Et surtout l'année prochaine il entre au lycée, et ce sera beaucoup plus loin !

Donc tu as décidé de monter une association pour financer l'achat d'un véhicule par toi-même ?
C'est bien ça. Le but est de vendre ma voiture actuelle et acheter un véhicule adapté, et je cherche juste à financer la différence de prix. Il me faudra un peut plus de 2 millions de francs… Et après l'emprunt pour faire la chambre adaptée, nous n'avons plus les moyens. Donc pour lever les fonds on organise des événements en novembre. Les prochains ce sera les deux samedi qui viennent (voir encadré), avec à chaque fois une buvette. Et ce sera l'occasion pour les gens de nous rencontrer.

Si tu arrives à acheter cette voiture, qu'est-ce que ça va changer pour la famille ?
Ça va simplifier la vie de Teiva, que ce soit au niveau personnel ou scolaire. Surtout l'année prochaine je pourrais le transporter au lycée, sinon il sera obligé d'aller jusqu'à Raapoto en fauteuil électrique, depuis la mairie de Arue. On a déjà essayé de le faire, et il y a beaucoup plus d’embûches sur le chemin, des trottoirs sans accès handicapé, des passages sur la route… Il met plus de 40 minutes. Et une voiture ça pourra aussi l'aider dans sa vie personnelle... Moi ça me peine vraiment de le voir privé de toutes ces choses, mais lui il reste toujours positif. Finalement c'est moins le problème de sa maladie qui nous affecte, plutôt nos relations avec le système.

D'autres parents d'enfants handicapés pourraient rejoindre l'association ?
Alors en fait j'ai pensé à mon fils pour le véhicule, mais voudrais par la suite pouvoir réunir les familles qui ont les même difficultés, pour les aider administrativement puisque j'ai des contacts en métropole pour le véhicule et j'aurai fait toute la procédure. Le but ce serait pour pouvoir voir runir les familles pour demander de l'aide soit au gouvernement, soit à la CPS, pour créer ces aides au transport des enfants handicapés.

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Jeudi 16 Novembre 2017 à 14:57 | Lu 5425 fois