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Le mono'i un petit marché aux grandes ambitions


PAPEETE, le 5 mai 2016. Le mono’i de Tahiti fait rêver dans le monde entier, il fait penser aux vacances, à l’été au soleil. Ce produit connu de Rio à Paris en passant la New York n’en est en fait qu’à ses débuts et à bien l’intention de faire parler de lui pendant encore longtemps. C’est un petit marché qui a bien l’intention de devenir grand.

Un petit produit présent dans le monde entier, le mono'i monte discrètement et bien que fortement installé localement, peu à peu il se fait une place à l’international et gagne des parts de marché.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes, les exportations de l’huile sont en constante augmentation. En effet les exportations de mono'i ont enregistré une hausse de 55,10 % entre 2013 et 2015. Par ailleurs entre 2013 et 2014 le mono'i était le poste à l’export qui enregistrait la plus forte hausse avec une variation de 19,2 %, entre 2014 et 2015 le monoi enregistrait la deuxième plus forte hausse des produits exportés. Enfin entre le premier trimestre 2015 et le premier trimestre 2016 les exportations du produit connaissent une progression de 22,8 % se positionnant ainsi juste après les produits perliers.

Cependant si les exportations de mono'i augmentent et que ce dernier gagne des parts de marché à l’international, la part du mono'i dans les exportations reste toute petite. L’huile parfumée représente en valeur 1,80 % des exportations en 2013, 2,71 % en 2014 et 1,99 % en 2015. Ainsi les producteurs de mono'i bien que dynamiques restent encore très petits.

La filière s’est rapidement organisée avec la création de l’Institut du Monoï (Groupement interprofessionnel du Monoï de Tahiti — GIMT) et la mise en place de l’appellation d’origine et la marque Monoï de Tahiti accompagnée d’un cahier des charges. "Afin de pouvoir bénéficier du label Monoï de Tahiti, il faut que l’huile réponde au critère suivant ; la noix de coco doit provenir d’un sol corallien, les fleurs macérées doivent être à l’état de bouton et être utilisées dans les 24 h suivant la cueillette, elles doivent macérer pendant au moins dix jours dans l’huile de coprah raffinée, il faut par ailleurs au moins 10 fleurs de tiaré pour un litre d’huile", explique Eric Vaxelaire, directeur de l’institut du Monoï

Aujourd’hui, huit producteurs font partie du GIMT, leur nombre a doublé de puis sa création en 1992. Le groupement accomplit trois missions : la recherche et développement, la promotion sur les marchés domestique et international et la partie légale. Jusque là, l’institut du Monoï a permis de lancer des études que les producteurs n’auraient jamais pu lancer individuellement, mais également de protéger le nom monoï de Tahiti à l’international. "L’appellation d’origine permet aux producteurs d’asseoir leur crédibilité en tant que produit cosmétique à l’international, raconte Eric Vaxelaire, par ailleurs le potentiellement de développement du marché pour les producteurs du groupement est essentiellement à l’international, à l’export, le marché local qui fait toujours le plus gros chiffre d’affaires est presque saturé et les locaux achètent essentiellement du mono’i artisanal".

Le but à l’export et dans la cosmétologie est, selon les producteurs de mono’i de sortir le produit de sa saisonnalité. "Le gros de notre chiffre d’affaires à l‘international se joue l’été. L’Europe et les États Unis commencent à nous passer les commandes en octobre novembre, pour une livraison fin mai début juin et une saison de juillet à septembre. Il est clair que nous n’avons pas intérêt à nous louper pour cette période" , déclare Jérémy Biot de la marque Tevi Tahiti, le petit nouveau du GIMT. L’objectif pour les producteurs de mono’i est de prouver et convaincre la cosmétologie (pour l’exportation en vrac), mais aussi les clients (pour les produits finis) que le mono’i est aussi efficace l’été que l’hiver. Par ailleurs, le plus gros défi et de sortir le mono’i du cliché de produit de l’été qui rappelle les vacances.

DES DISSENSIONS INTERNES

Mais aujourd’hui le groupement est en proie à des divisions internes, et pourrait même être amené à disparaître du fait de dissensions entre les producteurs. L’institut du monoï est alimenté par des fonds qui proviennent d’une taxe à l’export qui ne concerne que la filière du mono’i. Certains producteurs souhaiteraient la voir supprimée, tandis que d’autres indiquent « si nous supprimons la taxe à l’export qui finance le GIMT, beaucoup d’entre nous ne pourront plus financer l’institut du monoï, notamment les plus petites entreprises, or le groupement nous est très utile et nous aide à nous développer à l’international, et surtout nous permet de protéger le nom Monoï de Tahiti. Individuellement nous n’aurions jamais les moyens en temps et en argent pour défendre la marque », estime Philippe Maunier, actuel président de la filière à l’export de la CCISM et propriétaire de la savonnerie de Tahiti et de la marque Heiva. Le budget de la partie réglementation a, en effet, été multiplié par trois depuis 2012. 3cette rigueur est un argument pour les marques cosmétiques, mais c’est aussi notre devoir de protéger le nom de Tahiti et défendre le consommateur sur l’origine du produit. »

LE MARCHE LOCAL

Si le GIMT œuvre pour encourager les exportations et le développement de la filière à l’international, il s’est également donné pour mission de promouvoir le mono’i localement. L’huile parfumée est un produit traditionnel, une huile sacrée qui dans un premier temps était réservée aux nobles et aux cérémonies religieuses avant de faire office d’onguent médicinal. « Nous devons certes développer la filière industrielle et l’export, mais il ne faut pas oublier le marché interne et la fabrication artisanale qui sont l’origine même du produit », rappelle Eric Vaxelaire. C’est pourquoi localement, le GIMT a créé la semaine du monoï, mais aussi la route du monoï « il faut revaloriser le produit en Polynésie, d’autant que la filière se sert du savoir-faire ancestral pour continuer de s’améliorer. Les deux filières ne sont pas concurrentes, mais plutôt complémentaires, car les cibles ne sont pas les mêmes » ajoute le directeur de l’institut du Monoï.

Rédigé par Marie Caroline Carrère le Jeudi 5 Mai 2016 à 18:39 | Lu 3308 fois