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Le Monde et Libération misent tout sur le numérique


PARIS, 13 septembre 2014 (AFP) - Lundi, Le Monde et Libération présentent tous deux à leurs salariés des réformes privilégiant le numérique: à Libération, une réforme radicale avec l'objectif de réduire d'un tiers la rédaction, au Monde une mutation progressive à effectifs constants.

Hasard du calendrier, les deux grands quotidiens tiennent ces comités d'entreprise cruciaux le même jour. Lundi matin, les nouveaux dirigeants de Libération exposeront leur projet de "big bang" pour le journal, selon l'expression du directeur opérationnel Pierre Fraidenraich.

Premier objectif, réduire les effectifs : dans une tribune publiée début août dans Libération, Laurent Joffrin (directeur de la publication) et le directeur général François Moulias déclaraient que "l'équilibre économique de Libération suppose une réduction de ses effectifs d'environ 60 personnes" sur environ 250 salariés dont 180 journalistes, un objectif qui "devra être atteint en tout état de cause, faute de quoi les coûts salariaux resteraient impossibles à supporter".

Pour y parvenir, la direction a ouvert en août la "clause de cession", qui offre aux salariés voulant partir des indemnités améliorées tout en touchant les allocations chômage. Mais jusqu'ici, seule une douzaine de candidats se sont déclarés, surtout des non-journalistes. Aussi la direction annoncera lundi de "nouvelles mesures sociales" tandis que les syndicats craignent un plan de licenciements.

Autre réforme prévue, donner la priorité à internet sur le papier et fusionner les rédactions papier et numérique autour de cinq ou six "pôles multimédias". Une nouvelle version du site est prévue au premier trimestre 2015, ainsi qu'une nouvelle formule papier. D'autres projets sont à l'étude, dont une "Radio Libé" avec une fréquence nationale.

De nombreux journalistes attendent les détails de ce plan avant de se décider sur un départ volontaire, selon les syndicats. De son côté Pierre Fraidenraich répète que "trop de journalistes sont trop peu productifs".

Au bord de la faillite, Libération a été renfloué fin juillet à hauteur de 18 millions d'euros, apportés principalement par le milliardaire franco-israélien Patrick Drahi.

- Réforme prudente au Monde -

Lundi après-midi, ce sera au tour du Monde de présenter sa réforme éditoriale, mais la direction s'est engagée cet été à maintenir les effectifs constants. La priorité sera donnée cependant aux projets numériques pour tout nouveau recrutement.

La direction du Monde veut avancer prudemment, échaudée par une crise en mai sur son premier plan de mobilité qui prévoyait un passage rapide d'une cinquantaine de journalistes du papier sur les éditions web.

Voulu par les actionnaires, lancé tambour battant par l'ex-directrice du journal Natalie Nougayrède, ce plan avait déclenché une fronde de la rédaction et la démission de la directrice, remplacée depuis par Gilles van Kote, directeur, et Jérôme Fenoglio, directeur des rédactions.

Ils présenteront lundi un plan de réforme remanié et le plan de mobilité qui en découle: nouvelle formule papier le 6 octobre, probable suppression du supplément "Télévisions" du week-end et création d'une "chaîne Afrique" sur son site. Le Monde prépare aussi une édition numérique du matin pour appareils mobiles, pour laquelle il a obtenu en mai 1,8 million d'euros du fonds Google pour la presse.

Les actionnaires du Monde songent aussi à l'image: ils se sont portés acquéreurs de la chaîne d'info LCI, que TF1 envisage de fermer depuis que le CSA a refusé son passage en gratuit. Pour l'instant, TF1 n'a pas donné suite.

Le Monde, qui fête cette année ses 70 ans, se lance enfin dans une nouvelle diversification en organisant pour la première fois les 20 et 21 septembre à l'Opéra Bastille, au Palais Garnier et à l'Olympia la première édition d'un festival annuel, composé de spectacles et d'une trentaine de débats avec une centaine de personnalités, pour lequel il attend 50.000 spectateurs.

Libération et le Monde ont tous deux été déficitaires l'an dernier, victimes de la baisse des recettes publicitaires et des ventes papier. Le Monde, dont les ventes ont reculé de 1,6% sur un an à 267.000 exemplaires en juillet, est l'un des titres qui résistent le mieux, avec une hausse régulière des abonnements numériques qui compense en partie le recul des ventes au numéro et des abonnements. Libération, plus touché, a vu ses ventes reculer à 95.000 exemplaires en juillet, en baisse de 5,6% sur un an.

Rédigé par AFP le Samedi 13 Septembre 2014 à 09:25 | Lu 472 fois