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La dévaluation du Franc Pacifique : une illusion


La dévaluation du Franc Pacifique : une illusion
PAPEETE, mardi 13 novembre 2012. Ce n’est pas une vue de l’esprit : la dévaluation du Franc Pacifique est bien l’une des pistes envisagées par le gouvernement d’Oscar Temaru dans le rapport du DOB (débat d’orientation budgétaire) discuté lundi (le 12 novembre) par les élus de l’assemblée de Polynésie française. Il est écrit précisément à la page 46 du rapport : «Les travaux à mener dès 2013 doivent permettre d’engager avec l’Etat les discussions pour une diminution du coût de la vie. Outre la dévaluation du franc pacifique, toutes les hypothèses doivent être envisagées pour voir laquelle ferait prendre le moins de risques au Pays. L’objectif est de ne pas dégrader notre niveau de compétitivité actuel, si bas soit-il, et de préserver au maximum le pouvoir d’achat des Polynésiens».

L’évocation officielle d’une hypothèse de dévaluation du Franc Pacifique, dans le chapitre consacré au développement du tourisme a fait mouche, même si peu de représentants ont choisi d’en parler lors du débat sur les orientations budgétaires, limités sans doute par les 20 minutes maximum de temps de parole accordées à chaque groupe. Néanmoins, Emma Algan évoquait «ce souhait irréaliste puisqu’il s’agit d’une compétence de l’Etat et que nous ne sommes pas la seule collectivité concernée par le franc pacifique». L’élue Ia Ora Te Fenua précisait : «notre dépendance à l’importation (produits comme l’alimentaire ou les médicaments que nous ne produisons pas) va rendre les prix plus chers. Et la baisse du pouvoir d’achat des Polynésiens n’est pas la solution».

Même scepticisme de la part du groupe Tahoeraa. René Temeharo déclarait : la réduction «de 30% des coûts pour résoudre la problématique de la cherté de la destination Polynésie, en procédant par exemple à une dévaluation du Franc Pacifique» est une «idée saugrenue et farfelue», qui va conduire à «un schéma d’appauvrissement de la Polynésie française».
Dans une tribune politique, adressée aux rédactions locales ce mardi 13 novembre, Teiva Manutahi, le président du parti Porinetia Ora développe «les effets pervers de la dévaluation» : augmentation des prix des matières premières importées, pouvoir d’achat des consommateurs réduit entre autres, et assimile cette hypothèse d’une dévaluation à «un crime socio-économique».

Quelle que soit la volonté du gouvernement Temaru, cette hypothèse reste largement illusoire, puisque la dévaluation de la monnaie n’est absolument pas une compétence du Pays. Le franc pacifique étalonné de manière fixe sur l’euro ne peut prétendre décrocher, seul, du système monétaire national, droit régalien de l’Etat. Avant même que le rapport du DOB (débat d’orientation budgétaire) ne soit discuté par les représentants de l’assemblée, l’IEOM (Institut d’émission outre-mer) ayant vent de rumeurs à ce sujet avait exprimé ses doutes sérieux sur la démarche. Une dévaluation du franc pacifique concernant trois territoires ultramarins (Polynésie française, Nouvelle Calédonie et Wallis & Futuna) ne pourrait être une action polynésienne isolée. Fin octobre dernier, le directeur général de l’IEOM, Nicolas de Sèze en visite à Tahiti avait déclaré : «Il n’y a actuellement aucun projet du gouvernement à Paris sur une remise en cause de cette parité».



Rédigé par Mireille Loubet le Mardi 13 Novembre 2012 à 13:56 | Lu 3036 fois