Tahiti Infos

La dette nucléaire augmentée à 10,8 milliards Fcfp dès 2017


François Hollande, à Papeete le 22 février dernier, lors de son allocution devant les élus polynésiens.
François Hollande, à Papeete le 22 février dernier, lors de son allocution devant les élus polynésiens.
PAPEETE, 31 août 2016 - Dans un communiqué intitulé "Dotation globale d’autonomie augmentée et sanctuarisée" que signe René Bidal, mercredi soir, le haut-commissaire annonce avoir été informé par Paris d'une possible augmentation à 10,8 milliards Fcfp de la DGA "à compter de 2017".

Dans une lettre diffusée mercredi soir, le haut-commissaire annonce avoir reçu "aujourd’hui, des services du Premier Ministre, le projet d’article qui sera transcrit dans la loi de finances pour 2017 et qui concerne la contribution financière de l’Etat au titre de la Dotation globale d’autonomie".

Le représentant de l'Etat en Polynésie française indique que les termes choisis dans ce projet de loi "évoluent" par rapport à la rédaction de l'année dernière : "pour l’année 2016, les mots employés étaient « 80 547 668 € (plus de 9,6 milliards de FCFP) » désormais le projet de loi indique : « 90 552 000 € (plus de 10,8 milliards de FCFP) à compter de 2017 »", souligne-t-il en relevant que ce projet d'augmentation de la Dotation globale d'autonomie de 1,2 milliard Fcfp est annoncé "à compter" de 2017.

René Bidal voit dans cette formulation "le prolongement de l’engagement qu’avait pris le Président de la République lors de sa venue, le 22 février dernier" et n'hésite pas à évoquer, sur cette base, une DGA "sanctuarisée".

Sanctuarisée ? Pas encore

Le président de la République avait promis en ces termes, lors de son discours devant les élus polynésiens : "La dotation globale d’autonomie, celle qui est souvent présentée comme la dette nucléaire, cette dotation globale d’autonomie sera sanctuarisée dans le statut de la Polynésie française et son niveau sera, dès 2017, rétabli à plus de quatre-vingt-dix millions d’euros".

L'annonce de l'inscription dans le marbre de la DGA avait satisfait le gouvernement puisque depuis 2013, cette dotation a fait chaque année l’objet de coupes systématiques, passant de 90,7 millions d’euros à 87,7 millions d’euros en 2014, puis à 84,5 millions d’euros en 2015 pour être annoncée fin 2015 avec un nouveau coup de rabot de 4 millions d’euros. Après des échanges musclés entre les parlementaires polynésiens et la ministre des Outre-mer, le Premier ministre avait finalement assuré en janvier que la Dotation globale d’autonomie serait portée à 10 milliards Fcfp en 2016 en dépit de la baisse de près de 500 millions Fcfp inscrite au budget de l’Etat. Promesse visiblement en passe d'être tenue puisqu’un projet de convention vient d’être transmis à l’Assemblée pour approbation, comme le prévoit le statut d’autonomie. Ce projet de convention entre la Polynésie française et l’Etat doit servir au financement d’un programme en faveur du développement touristique.

Mais il demeure que le caractère "sanctuarisé" de cette "dette nucléaire" a surtout été présenté, par François Hollande lors de sa visite à Tahiti en février 2016, comme la résultante de son inscription dans le statut d'autonomie. Et pour l'instant il n'en est encore rien. Cette inscription pourrait être faite à la faveur du "toilettage" sur la loi organique,promis en juin dernier pour fin 2016. Selon toutes vraisemblances, l’Assemblée devrait être saisie d’un projet début octobre.

En attendant, et il s’agira d’une première concernant le projet de loi de finance métropolitain, pour ce qui concerne la collectivité, le haut-commissaire annonce mercredi soir avoir saisi "le Président de l’Assemblée de la Polynésie française lequel, selon la procédure d’urgence", afin de recueillir "l’avis de l’Assemblée dans un délai de quinze jours", sur ce projet d'article concernant la DGA. Un projet qui devra encore être examiné par le Parlement lors des débats sur la loi de finances 2017, à l'automne.

Dette nucléaire : du FREPF à la DGA en 20 ans

Sans cesse depuis 2002, le montant global annuel des transferts financiers liés à l'après-nucléaire été revu à la baisse, au gré d’évolutions renouvelées des dotations. Tout part, en 1996, de la décision par l’Etat de mettre un terme définitif à 30 ans d’expérimentations nucléaires en Polynésie française. La conséquence prévisible pour l’économie locale est une réduction inévitable et progressive, d’une partie importante des transferts financiers et de la présence de personnels liés directement à cette activité. L’économie de la collectivité avait été bouleversée en profondeur depuis 1966. Pour amortir le choc, une dotation spéciale fut négociée par le président de l’époque, Gaston Flosse, pour compenser cette perte. C’est dans ce contexte qu’est créé en 1996, le Fonds de reconversion de l'économie de la Polynésie française (FREPF). A sa création, le fonds de dotation de l’après-CEP avait été présenté par le président de la République de l’époque, Jacques Chirac, comme "pérenne" et "symbolique". Au départ il était de l’ordre de 18 milliards Fcfp par an.
Mais cette aide financière de l'État au titre de la "dette nucléaire" a d'abord été requalifiée en 2002 pour devenir la Dotation globale de développement économique (DGDE) avant d'être refondue en 2010 au profit de trois instruments financiers nouveaux : la fameuse DGA ; la Dotation territoriale pour l'investissement des communes en Polynésie (DTIC) ; et le 3e instrument financier (3IF).

Pour ce qui concerne la DGA, depuis 2013 cette dotation a fait chaque année l’objet de coupes systématiques, passant de 90,7 millions d’euros à 87,7 millions d’euros en 2014, puis à 84,5 millions d’euros en 2015 pour être annoncée en 2016 avec un nouveau coup de rabot de 4 millions d’euros. Suite aux vives protestations des parlementaires polynésiens, mi-janvier dernier, Emmanuel Valls avait promis, dans un courrier adressé aux sénateurs, de compenser cette baisse de dotation par une allocation complémentaire de 4 millions d’euros (477 millions Fcfp) abondée par le ministère des Outre-mer sur ses frais de gestion. Il s’était également engagé sur le principe : "l’Etat restera aux côtés de la Polynésie française afin de lui permettre de poursuivre le redressement économique et social impulsé par son Président".

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mercredi 31 Août 2016 à 19:30 | Lu 4979 fois