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L'accès aux soins en Outre-mer: des inégalités persistantes


Paris, France | AFP | mardi 17/10/2017 - Une prévention défaillante, un accès difficile aux structures médicales, une organisation inefficace des dispositifs médicaux, les disparités d'accès à la santé dans les outre-mer sont nombreuses et persistantes, dénonce la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH).

Dans un avis adopté mardi la CNCDH évoque "un constat inquiétant dans tous les territoires ultramarins", mais déplore des données statistiques "partielles et insuffisantes" sur la santé outre-mer.
L’espérance de vie à la naissance est en moyenne plus basse dans les départements et régions d’outre-mer (DROM). Si la Martinique et la Réunion connaissent une situation comparable à la métropole, l'espérance de vie en Guyane est de deux ans inférieure à celle de la métropole (76,7 ans pour les hommes et 82,9 ans pour les femmes) et encore plus basse à Mayotte (74,7 ans et  77,9 ans).
Le taux de mortalité infantile était en 2015 pour l'ensemble du pays à 3,7 pour 1.000 naissances contre le double (7,6 en moyenne) dans les DROM hors Mayotte.  
Les DROM sont aussi davantage affectés que la métropole par le surpoids et l’obésité -en Guadeloupe, la surcharge pondérale concerne la moitié de la population-, et par le diabète -La Réunion est le département le plus touché-.
Les taux d'hospitalisation et de mortalité par AVC sont particulièrement élevés en Guadeloupe, Guyane et surtout à La Réunion.
Les taux d'incidence concernant le VIH-SIDA sont aussi plus élevés. En Guyane, le taux de séropositivité est de 112 pour 100.000 habitants, contre 11 en métropole (hors Île-de-France). 
Les femmes en âge de procréer sont deux à trois fois plus exposées à un risque fatal lors de l'accouchement, et les plus jeunes sont confrontées à "un nombre nettement plus élevé de grossesses précoces non désirées".
La CNCDH fustige "l'organisation des systèmes de santé", très variable selon les territoires. Si les Antilles et la Réunion sont dans une "dynamique de convergence" avec l’Hexagone, la Guyane et Mayotte accusent "des retards très importants".
 

- Déficit de spécialistes -

 
En cause, "l’isolement" qui complique "l’accès aux soins et la réponse aux urgences, alors que l’évacuation des malades est fréquemment imposée". Les populations autochtones de l’intérieur de la Guyane sont ainsi particulièrement exposées aux risques sanitaires, fautes de structures.
"Les barrières financières sont aussi des obstacles", avec pour conséquence "le renoncement aux soins face au coût des transports, aux contraintes administratives trop lourdes et au manque d’accompagnement social", note la CNCDH.
A cela s'ajoute des professionnels de santé inégalement répartis. En 2012, quelque 7.000 médecins exerçaient dans les territoires. La Guyane avait 71 praticiens actifs pour 100.000 habitants et Mayotte 18, contre 180 pour La Réunion, seule à approcher la moyenne nationale (201). 
Le déficit de spécialistes "entrave le dépistage de certaines pathologies et leur prise en charge dans un délai favorable", notamment "en gynécologie obstétrique, en santé mentale et pour la prise en charge de certains cancers", note-t-elle. 
Et faute de médecine libérale, "l'hospitalo-centrisme" est "renforcé avec de grands ensembles hospitaliers souffrant de sous-dimensionnement (par rapport au territoire concerné,NDLR), de sous-effectif et trop souvent de gestion hasardeuse", notamment en Guyane et à Mayotte, où des mouvements sociaux ont dénoncé des situations d'engorgement.
La CNCDH salue la mise en place par le gouvernement de la "stratégie santé Outre-mer 2016-2020", visant à prendre en compte les particularités de l'Outre-mer, avec "des  solutions pertinentes, qu'il s'agisse de la formation des professionnels, de l'allocation des ressources aux établissements ultramarins ou de conditions d'installations en maisons médicales peu pratiquées en métropole".
Elle préconise notamment de "prendre des initiatives innovantes visant à aider l'installation de professionnels", "de renforcer la prévention", de créer des "centres de soins délocalisés" là où il y a pénurie de médecins, comme à Mayotte et en Guyane, et de développer la télémédecine.
Elle recommande aussi "une évaluation des besoins dans le domaine de la psychiatrie et de la santé mentale", et "le renforcement de l’aide à l’acquisition des droits aux populations les plus vulnérables".

le Mercredi 18 Octobre 2017 à 04:25 | Lu 474 fois