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Fédération internationale de football : les dessous de l'affaire Temarii


PAPEETE, 13 mai 2015 - La commission d'éthique de la Fédération internationale de football (Fifa), a annoncé mercredi la suspension pour huit ans du directeur général de la Fédération tahitienne de football, Reynald Temarii, coupable de violation du code d'éthique.

Il aurait pu devenir un grand nom de la Fifa ; mais Reynald Temarii, ex vice-président de la Fédération internationale de football, a enfreint le code d'éthique de la Fifa "en acceptant un montant de 305.640 euros (36,5 millions Fcfp) de M. Mohamed bin Hammam, alors membre du Comité exécutif de la Fifa et président de l'AFC, pour couvrir ses frais de procédure dans le cadre d'un appel interjeté contre sa précédente suspension prononcée par la Commission d'éthique de la Fifa le 17 novembre 2010", a indiqué mercredi la Fifa dans un communiqué.

Le Tahitien, mis en cause dans le scandale autour de l'attribution de la Coupe du monde de football 2022 au Qatar, avait reçu cette somme en janvier 2011 à la suite d'une entrevue avec M. Bin Hamman, alors candidat à la présidence de la Fifa, a ajouté l'organe suprême du football mondial.

A compter du 13 mai, Reynald Temarii est suspendu de "toute activité liée au football aux niveaux national et international pour une durée de huit ans".

La fédération tahitienne de football, vraisemblablement gênée aux entournures, ne souhaite pas réagir à cette annonce. Reynald Temarii, attendu à Tahiti ce vendredi, communiquera officiellement la semaine prochaine.

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L’affaire remonte à octobre 2010, alors que Reynald Temarii siégeait encore parmi les 24 membres du comité exécutif de la Fifa. Des révélations publiées dans le Sunday Times, l’édition dominicale du très sérieux London Times, laissaient entendre que Reynald Temarii était disposé à monnayer son scrutin en échange de pots-de-vin.

L’information avait fait un tôlé, à six semaines de l’annonce des pays hôtes des Mondiaux 2018 et 2022. D’autant qu’un membre nigérien du même comité exécutif s’était aussi fait avoir par le Sunday Times. Les journalistes de l’hebdomadaire, prétendument lobbyistes pour la fédération américaine de football, disposaient d’enregistrements en caméra cachée du Tahitien reconnaissant qu’il pouvait voter en faveur de l’organisation de la Coupe du monde 2018 au Etats-Unis en contrepartie du versement de 3 millions de dollars NZ (230 millions Fcfp).

Le Mondial 2018 aura finalement lieu en Russie. Mais de redoutables soupçons pesaient désormais sur l’intégrité, l’honnêteté, la sincérité et le fair-play du comité exécutif de la Fifa.

Quatre ans de procédure

Sur l’autel de la bonne foi, la Fifa n’avait pas tardé à suspendre de manière conservatoire Reynald Temarii, alors vice-président de la Fifa et de la confédération océanienne de football, qu’il présidait depuis 2004. La sentence avait été confirmée par le comité d’éthique de l’organisation le 17 novembre 2010. Le Tahitien avait fait appel de cette mesure disciplinaire.

Et c’est dans le cadre de cette procédure qu’il a accepté le secours financier (36,5 millions Fcfp) offert par Mohammed Bin Hamman, un lobbyiste qatari, pour financer ses frais d’avocats. Le problème c’est que le Mondial 2022 se déroulera précisément au Qatar et que Bin Hamman, ancien président de la Confédération asiatique de football, écarté de la Fifa en juin 2011, est lui-même soupçonné avoir tenté de corrompre plusieurs membres du comité exécutif de l’organisation pour favoriser la candidature de son pays mais également en sa faveur, alors qu’il était candidat à la présidence de la Fifa en 2011.

Reynald Temarii affirmait, en juin 2014 sur Polynésie 1ere, que cette aide n’avait en aucune manière été accordée en contrepartie de son suffrage : "en aucune manière cet accompagnement financier n'est lié à mon positionnement par rapport à l'attribution de la Coupe du Monde de Football 2022 au Qatar". Il déclarait aussi que "dans la mesure où il ne s'est absolument rien passé, j'ai fait appel pour me défendre vis à vis de la décision de la FIFA, et Mr Bin Hamman a bien voulu m'accompagner dans la prise en charge des frais d'avocats. Mohammed Bin Hamman suppute que son soutien financier a un quelconque rapport avec mon positionnement sur la Coupe du Monde, mais il n'en est rien. Et donc, contrairement à ce qu'affirme le Sunday Times, en aucune manière le financement de mes frais d'avocats n'est lié à la Coupe du Monde".

Après une telle affaire, difficile d’imaginer aujourd’hui le retour au premier rang du football mondial de cet ancien Golden boy polynésien de la discipline : huit ans, semble une manière élégante de dire "au revoir".

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mercredi 13 Mai 2015 à 15:06 | Lu 3381 fois