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Facebook coté business


Alexandre Ventadour explique qu'avec Facebook il "peut toucher la moitié de la population polynésienne pour moins de 5000 euros"
Alexandre Ventadour explique qu'avec Facebook il "peut toucher la moitié de la population polynésienne pour moins de 5000 euros"
PAPEETE, le 8 septembre 2015 - En quelques années, Facebook est devenu un média incontournable pour la population comme pour les entreprises. Mais la façon de communiquer efficacement sur le réseau social a aussi été totalement chamboulée nous explique un des directeur France de l'entreprise.

Ce mardi, les Matinées du e-Business ont débutées et se poursuivront jusqu'à vendredi. Trois intervenants spécialistes de différents sujets concernant le business sur Internet vont partager leurs lumières à une assemblée de professionnelle. Nous les avons rencontrés lundi pour tous les interviwer. Nous commençons par l'entretien avec Alexandre Vendatour, qui était directeur de clientèle de Facebook France jusqu'au mois dernier (il crée désormais sa propre entreprise). Il propose des présentations tous les soirs : il reste une conférence mercredi, une autre jeudi et un atelier vendredi, inscriptions sur matinees-ebusiness.com.

Alexandre Ventadour, ancien directeur de clientèle de Facebook France

De quoi parlerez-vous aux entreprises Polynésiennes lors de ces matinées ?
"Je vais leur parler de la meilleur façon d'utiliser Facebook pour avoir du profit, même quand on est une entreprise à taille polynésienne. Le tout est d'avoir une stratégie de contenu. Ce sont des grands mots, mais il s'agit de dire que le contenu est central, quelque soit l'endroit où il sera publié. Il faut réfléchir en amont à ce qu'on va montrer aux gens, maintenant qu'on est capables de leur montrer quelque chose sur leur téléphone portable, au moment du réveil, au moment du coucher, etc."

Quel est le contenu que devrait publier une marque ?
"Aujourd'hui ce qui cartonne, c'est la vidéo. Des vidéos optimisées de 15 à 30 secondes qui racontent une histoire, qui sont très courtes et très impactantes dans l'approche, donc il faut être convainquant dès les premières secondes, ne pas hésiter à montrer le produit, et ensuite raconter une histoire. Ce sont des publicités vidéo de 15 à 30 secondes, qu'il ne faut pas hésiter à développer. Et bien sûr, il reste aussi toutes les images, toutes les bannières possibles et imaginables…"

Même à Tahiti où les connexions sont bien plus lentes ?
"Après je ne suis pas garant de l'infrastructure tahitienne, mais je sais que les Tahitiens sont plus de la moitié à se connecter à Facebook. Alors ils galèrent peut-être un peu plus que les autres pour le faire, mais ils y sont, ils consomment, et ce serait une erreur pour les entreprises polynésiennes de ne pas y aller puisque leurs clients y sont déjà."

On ne sait jamais s'il vaut mieux partager le soir, ou le matin, ou le samedi pour toucher le plus de monde…
"Alors ça a un impact, mais aujourd'hui il n'y a pas une seule vérité, en fonction du produit qu'on a à vendre et de la cible qu'on veut toucher. Certaines pages auront plus d'intérêt à poster le matin, ou le soir ; trois fois par jour ou une fois par semaine… Ça peut différer si on vend des billets d'avion, des perles ou des prestations de comptabilité. La seule règle, c'est de ne publier que lorsque l'on a quelque chose à dire. Sinon il vaut mieux ne rien dire, parce qu'aujourd'hui les gens ne sont plus dupes, ils sanctionnent. Les messages de community management qu'on avait il y a trois ou quatre ans, 'bonjour les fans comment allez-vous ?', aujourd'hui ils ont été remplacés par des messages très business. Je raconte l'histoire de ma marque très vite, je vais vendre des produits, des concepts… Et ça fonctionne."

Donc il ne faut plus engager la communauté ?
"On peut l'engager, mais autour de ses produits. Je prends un exemple : il y a eu une grosse période de jeux-concours. J'étais une banque et je diversifiais mes fans en leur faisant gagner un iPad, donc rien à voir avec mon produit. Donc les gens venaient sur ma page, interagissaient pour gagner la tablette, mais au final quand on leur demandait s'ils se souvenaient qui la leur avait offert, rien. Ils étaient venus pour l'iPad, pas pour la banque. Donc aujourd'hui une banque peut parler d'argent et de ses produits : 'oui on a une meilleure qualité de service, nous on a une application qui fonctionne bien, nous on a un prêt à 3% quand nos concurrents sont à 3,5%..."

Le métier de community manager a changé ces dernières années
"Il a complètement changé. Ce métier a mué, avant on était vraiment dans un animateur de fan-page, on était très centré sur les fans, on essayait de raconter des histoires. Aujourd'hui il y a encore cette valeur-là qui est très forte, mais on est devenus Content Manager. Donc on est à ce dire 'voilà, il y a ce contenu qui est intéressant pour la conversation, celui-là qui est bon pour les produits et la marque, celui-là qui est intéressant pour du mécénat… Et aujourd'hui le community manager est aussi garant d'un certain budget. S'il a un budget de 1000 euros, il peut se dire qu'il en attribue 500 à un nouveau produit pour le lancement, et le reste pour faire du fil rouge. Bref, il est devenu polymorphe et il va bien plus loin que la simple animation d'une communauté."

À Tahiti, toutes les PME ont une page Facebook souvent animée directement par le gérant ou un employé. À partir de quelle taille faut-il avoir un community manager dédié ?
"C'est une bonne question. Je ne sais pas si c'est vraiment une question de taille, ou une question de récurrence de l'information. Je vais prendre un exemple. Si j'ai une entreprise qui vend des produits en ligne et en moyenne 100 personnes m'achètent un produit chaque semaine. Ça fait 100 personnes potentielles qui peuvent me poser une question. Si j'ai le temps pour leur répondre tout seul, sans que ça m'empêche de construire mon business qui est mon métier premier, pourquoi pas l'internaliser. Si en revanche le service client devient chronophage et nécessite d'entrer dans une conversation avec chacun de ces 100 clients, là se pose la question de créer un pôle client qui aurait la responsabilité entre autre du community management."

Comment fait-on aujourd'hui pour avoir 50 000 fans sur Facebook ? Faut-il vraiment payer pour avoir des fans ?
"La première des choses, c'est de se demander s'il y a un intérêt à avoir des fans. Dans le Facebook d'avant 2012, les seules personnes qu'on pouvait toucher facilement, c'étaient les fans. Aujourd'hui avec de la publicité on peut toucher 1,5 milliard de personnes dans le fil d'actualité. Donc se poser la question de recruter un fan, ce qui fera 1 euros ou 1,5 euro en moyenne, puis de payer 20 à 30 centimes à chaque fois qu'on voudra le toucher à nouveau, c'est une vraie question. Parce que in fine on peut toucher toute la population voulue sans que jamais elle n'ait été fan de la page.

L'autre chose c'est que si on rentre dans cette logique de fans, qui reste intéressante pour tout un tas de raisons et notamment la recommandation sociale, ce que je conseille à mes clients c'est 'ayez autant de fans que de clients'. Les premiers fans d'une marque doivent être ses clients. Aujourd'hui Facebook a des outils qui permettent de rapprocher la base de données clients, avec ses mails, du nombre de personnes sur Facebook. On confronte les deux, et si on se rend compte que 12 000 clients dont j'ai l'adresse mail sont aussi sur Facebook, c'est la première population à essayer de convertir en fans. Et ensuite on peut continuer."


Donc la croissance organique des fans qu'on vantait il y a quelques années, c'est fini ?
"C'est fini. Pour plusieurs raisons, mais la principale est un peu technique. Le nombre de personnes sur Facebook a triplé en moins de 6 ans, donc les photos, vidéos et tout ce qu'on partage a également explosé. Ce qui fait qu'on a un nombre d'histoires potentielles dans une journée qui est à plus de 1000 posts que Facebook pourrait nous montrer sur notre fil d'actualité. Sauf que pour avoir une visibilité correcte, Facebook se réserve le droit de n'en diffuser que 300 à chaque utilisateur. Donc il faut faire un arbitrage. Via son algorithme, Facebook choisit de diffuser aux gens les histoires qui les intéressent le plus, avec tout de même une part de hasard. Donc on verra les contenus des amis et des marques avec qui on a le plus d'interactions. Sur ces 300 histoire, Facebook se réserve le droit de diffuser 5% de publicité au maximum.

Tout ça pour dire qu'aujourd'hui, si je suis devenu fan de la page d'une banque il y 3 mois et ne suis jamais retourné dessus, il n'y a aucune raison pour que Facebook me montre ses contenus plus que ceux de l'ex-copine dont je regarde le compte régulièrement… Donc le seul moyen pour la banque de me toucher à nouveau c'est de jouer le jeu de la publicité, que je sois fan ou pas fan. Comme elle le ferait via des médias presse, radio, TV… Mais c'est vrai qu'il y a encore des pages qui ont 100 000 fans et en touchent 30 ou 50 000 à chaque publication sans jamais rien payer, comme des pages d'info par exemple dont les gens attendent le contenu avec impatience et qui ont un très bon 'reach organique'. Facebook est un média gratuit dans sa conception, mais pour faire du profit il faut investir et calculer son retour sur investissement."


Est-ce vraiment rentable d'utiliser Facebook pour sa communication ?
"Il y a 135 000 Polynésiens sur Facebook, je pourrais en toucher 100 000 en un mois pour moins de 5000 euros. Et encore je tape haut. Donc je peux toucher la moitié de la population polynésienne, ou au moins celle qui est connectée et a un compte Facebook, pour des niveaux d'investissement atteignables pour les entreprises qui ont une certaine envergure ici, parce que je ne dis pas que 3000 euros de publicité c'est donné à tout le monde. Donc on peut toucher la moitié ou le quart de la population, dans son téléphone portable, avec une vidéo, avec une photo, en lui permettant d'interagir, en apprenant de ce qu'elle aime ou n'aime pas, etc. La question au final, c'est à quel niveau une entreprise met le digital dans la stratégie de communication, parce que les entreprises font déjà de la publicité pour ces montants sur les autres médias."

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Mardi 8 Septembre 2015 à 17:42 | Lu 1722 fois