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Droits d’auteurs : la SPACEM condamnée face à la SACEM


Droits d’auteurs : la SPACEM condamnée face à la SACEM
La SPACEM, Société polynésienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, a été condamnée le 24 mai dernier, en première instance dans la procédure qui l’oppose à la SACEM.

Ce jugement a en outre légitimé l’action entreprise à Tahiti par la SACEM depuis 2011, pour assurer une continuité de la protection des droits d’auteurs en Polynésie, malgré la défaillance de son ancienne "petite soeur" locale.

Le Tribunal de grande instance de Paris condamne la société polynésienne à verser 900 000 euros (107,5 millions Fcfp) de provision au bénéfice de la SACEM et ordonne l’exécution provisoire.

Cette provision était réclamée par la SACEM au titre des droits non versés par la SPACEM depuis 2001 et liés à l’exploitation en Polynésie française du répertoire de la SACEM et des sociétés étrangères. Et ce, alors qu’à Tahiti des redevances étaient régulièrement perçues par la société polynésienne, auprès des utilisateurs locaux de musique (bar, hôtels, radios, associations, etc).

"Aucune expertise n’a été faite, comme cela se fait dans la cadre de la rupture de ce genre de contrat de représentation réciproque. Dans ce procès, tout ce qui est expertise, on l’a mis de côté !", dénonce cependant Me Miguel Grattirola, l’avocat de la SPACEM qui devrait faire appel de cette décision de justice.

"Compte tenu de la résiliation du contrat de représentation réciproque intervenue le 31 décembre 2010 (…)", a en outre constaté le Tribunal, la SPACEM "n’est plus habilitée à représenter les œuvres du répertoire de la SACEM, de la SDRM et des sociétés de perception étrangères que la SACEM représente en France."

La création de la SPACEM avait largement été aidée par la SACEM en 1978 et dotée d’une forte légitimité, en 1979, grâce à un contrat de représentation réciproque qui offrit à la société polynésienne une dimension internationale.

La SPACEM avait alors mission de percevoir les droits d'auteurs en Polynésie française, tant pour le compte de son répertoire propre que celui géré par la SACEM : 40 millions d’œuvres musicales et toutes les œuvres du répertoire international des 112 sociétés d’auteurs avec qui elle dispose d’accords de représentation, pour le territoire français.

La SACEM légitime en Polynésie

Mais les choses ont dérapées dans les années 2000. De 2001 à 2010, les comptes de la SPACEM n'ont été ni arrêtés ni soumis à l’approbation de l’Assemblée générale de ses sociétaires.

De son côté la SACEM a adressé à la SPACEM, pendant la période de 2001 à juillet 2009, une somme globale de 242 millions Fcfp, au titre de l’exploitation du répertoire de la SPACEM, hors de la Polynésie française, dans le cadre de l’accord de coopération réciproque qui liait les deux sociétés.

Accord de coopération qu’a fini par résilier la SACEM, le 31 décembre 2010, face aux dysfonctionnements dorénavant constants de la société polynésienne.

En juillet 2012, la Confédération Internationale des Sociétés d´Auteurs et Compositeurs (CISAC) décidait d’exclure la SPACEM de ses rangs "pour manquements à la législation et aux statuts de l’organisation".

Avec 229 sociétés d’auteurs dans 121 pays, la CISAC est la plus importante confédération internationale de sociétés d’auteurs. La SPACEM figurait parmi ses membres depuis 1978.

Depuis 2011, la SACEM incite les artistes locaux à lui confier la protection de leurs droits. Une centaine des principaux ayants droit polynésiens ont depuis quitté la SPACEM dans ce cadre-là.

La société métropolitaine tente parallèlement de faire valoir les droits de ses protégés auprès des utilisateurs de musique en Polynésie, mais se trouve confrontée à beaucoup de réticence, voire de désinformations orchestrées par la SPACEM, notamment en ce qui concerne l’incapacité qui serait celle de la SACEM à exiger redevance, en raison du statut d’autonomie de la Polynésie française.

A ce titre, le Tribunal constate : "si la loi organique du 27 février 2004 relative au statut d’autonomie de la Polynésie française lui donne compétence en matière de propriété intellectuelle, celle-ci n’ayant à ce jour adopté aucune législation en la matière, le code de la propriété intellectuelle, dans sa version en vigueur lors de l’entrée en vigueur de la loi organique, est applicable à cette collectivité. Ainsi, la SACEM a bien compétence pour y exercer ses missions légales et statutaires conformément aux dispositions du code de la propriété intellectuelle. Parallèlement, la SPACEM peut exercer ses missions en Polynésie française pour les œuvres qu’elle représente".

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mardi 4 Juin 2013 à 15:23 | Lu 3984 fois