Tahiti Infos

Deux médecins tahitiens formés en Nouvelle-Zélande pour une meilleure prise en charge des grands brûlés


AUCKLAND, le 10 août 2015- Du 3 août au 8 août dernier, deux anesthésistes du Centre Hospitalier de Polynésie française ont suivi une formation au centre national des Grands Brûlés de Middlemore, à Auckland, en Nouvelle-Zélande.

Le projet trainait dans les tiroirs de l’hôpital de Papeete depuis longtemps. Cette année, il a finalement pris forme. Deux médecins tahitiens, Damien Berlaire et Xavier Da-Col, ont suivi pendant une semaine l’équipe médicale néo-zélandaise du centre national des grands brûlés de Middlemore, à Auckland, pour observer, apprendre et surtout, comprendre la manière dont les patients sont pris en charge.

Chaque année, entre 200 et 250 patients appelés « Grand brûlés » affluent au centre hospitalier de Papeete. Accidents domestiques, incendies ou jeux d’enfants qui tournent mal, les causes sont multiples. Les personnes sont envoyées à l’hôpital, où une équipe spécialisée est prête à les recevoir pour les premiers soins. Problème : les brûlures de certains patients sont tellement importantes que les médecins ne peuvent pas leur apporter une prise en charge maximale. « A Tahiti, nous avons pas mal de personnes brûlées comme partout ailleurs. Nous arrivons à nous occuper des petites brûlures mais pas des grosses. Dans ces cas-là, nous devons envoyer nos patients en Nouvelle-Zélande (six heures de vol, NDLR) parce que c’est la destination la plus proche », précise Damien Berlaire, anesthésiste en poste à Tahiti depuis 10 ans.

Un long voyage, de surplus coûteux et qui demande aussi au patient un gros effort, physique comme mental. « Depuis 7 ou 8 ans, il y a régulièrement des médecins néo-zélandais, des kinés, des infirmières, qui viennent à Tahiti pour suivre les patients qui ont été opérés en Nouvelle-Zélande et pour que nous leur montrions nos cas les plus compliqués. Ils viennent une semaine tous les 18 mois ce qui nous permet d’avoir une relation privilégiée avec eux. C’est pour cette raison que nous avions le projet de venir en Nouvelle-Zélande depuis des années déjà. L’intérêt est de confronter nos pratiques avec les leurs pour que, lorsque nous prenons un patient en charge à Tahiti, notre manière de faire corresponde mieux à leurs standards. Ainsi, personne n’est perdu. Si l’on parle le même langage, ça facilite totalement la prise en charge des malades. » Une infirmière et un docteur de Papeete ont eu l’occasion, il y quelques années, de suivre la formation à MIddlemore, mais fautes de moyens, la dynamique était retombée. Cette année, tout a changé.

MOINS D’EVACUATIONS SANITAIRES A L’AVENIR

L’association d’entraide des membres de la légion d’honneur et de l’Ordre National du Mérite a soulevé des fonds pour permettre au personnel du corps médical tahitien de rejoindre Middlemore. Damien Berlaire a tout de suite répondu présent, comme son collègue, Xavier Da-Col, en poste à Tahiti depuis 2010 : « S’occuper des grands brûlés était un challenge pour moi car je n’en ai fait qu’un tout petit peu durant ma formation. Venir en Nouvelle-Zélande m’a permis de compléter ma formation. »
Parmi les nouvelles techniques vues : la greffe de peau. « Dans notre structure, c’est un petit peu difficile de motiver les chirurgiens pour faire ce genre de choses. C’est pourquoi je me suis vraiment focalisé sur la greffe. Je veux essayer de l’exporter chez nous. A partir du moment où la brûlure atteint une certaine profondeur, c’est très important de greffer de manière précoce car cela accélère nettement la durée de la cicatrisation. Sur le plan purement technique, ce n’est pas quelque chose d’infaisable. Surtout que, en matière de matériel, nous sommes quand même bien équipés à Tahiti… », commente Xavier Da-Col.

Rentrés en Polynésie en début de semaine, les anesthésistes ont repris leur travail à l’hôpital de Papeete. Désormais, une partie des grands brûlés auparavant envoyés en Nouvelle-Zélande pourra être soignée sur place, à Tahiti. Cependant, si c’est un plus pour l’hôpital tahitien, il n’en devient en rien un centre de traitement des grands brûlés, comme l’est Middlemore. La Nouvelle-Zélande restera la réalité de certains patients, les plus gravement brûlés.





Deux médecins tahitiens formés en Nouvelle-Zélande pour une meilleure prise en charge des grands brûlés
Trois questions à … Nadine Plet, conseiller consulaire et membre de l’association d’entraide des membres de la Légion d’Honneur et de l’ordre National du mérite.

« C’est le premier projet mais nous espérons bien que ce ne sera pas le dernier ! »

Créée en 2012, l’association d’entraide des membres de la Légion d’Honneur et de l’ordre National du Mérite a pour de nombreux objectifs comme ceux, par exemple, de réduire la pauvreté ou encore d’aider à l’éducation.

Comment vous est venue l’idée d’aider au financement de la formation de médecins tahitiens pour la prise en charge des grands brûlés ?

Comme je travaille dans le milieu médical et que je suis parfois basée à Middlemore, la coordinatrice des grands brûlés, Tracey Perrett, m’a dit un jour, suite au décès d’une malade de Tahiti, qu’il serait bien d’avoir une meilleure coordination entre les personnels soignants de Tahiti et ceux de Middlemore. Elle m’a ensuite parlé d’un cours à l’hôpital qui existait pour cela, organisé par l’Association des Grands Brûlés de Nouvelle-Zélande et d’Australie. De là, nous avons commencé à travailler sur ce projet. Les élus du comité ont décidé de lui donner la priorité. C’est une formation où l’éducation est très importante et il faut que les deux systèmes, néo-zélandais et français, soient synchronisés et parlent le même langage. Ceci n’a rien à voir avec les langues anglais/français, ce que j’entends par là, c’est avoir les mêmes critères de diagnostic.

Quels sont les objectifs de cette formation ?

Les médecins, formés ici, vont ensuite pouvoir former les autres professionnels sur place à Tahiti. Aussi, ils vont pouvoir aider les personnes vivant dans des villages: enseignants, parents, enfants… N’importe quelle personne, en fait, qui peut apporter les premiers secours en cas de brûlure car ce sont toujours les premières minutes qui sont les plus importantes.

Est-ce que la formation se fera à nouveau ?

Au départ, seulement deux médecins sont formés car financièrement, c’est un coût important. Nous voulions voir petit au début, et ensuite accélérer le pas, peut-être. C’est le premier projet mis en place mais nous espérons bien que ce ne sera pas le dernier !

Rédigé par AMELIE DAVID le Lundi 10 Août 2015 à 18:49 | Lu 2085 fois