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Corruption à Vanuatu : le pied-de-nez des politiques à la justice


PORT-VILA, dimanche 11 octobre 2015 (Flash d’Océanie) – Marcellino Pipite, Président du Parlement de Vanuatu, a profité d’une brève période d’intérim pour assumer les fonctions du Président de la République, en voyage à l’étranger, pour décider de gracier, ce week-end, 14 députés, dont lui-même, reconnus vendredi coupables des chefs d’accusation portés à leur encontre.

En sa qualité de Président du Parlement, M. Pipite assume automatiquement les fonctions du Chef de l’État lorsque ce dernier se trouve en déplacement à l’étranger.

Vendredi, au terme de longues audiences, la Cour Suprême de Vanuatu a rendu un verdict prononçant coupables M. Pipite ainsi que 13 autres députés membres de l’Assemblée (52 sièges) dans une affaire de corruption active ou passive.
Parmi les coupables : l’ancien Premier ministre Moana Carcasses, devenu Vice-premier ministre au sein du gouvernement actuel, à la faveur du vote d’une motion de censure, a rapporté la presse locale vendredi 10 octobre 2015.
De nombreuses autres personnalités ont aussi ministres au sein du gouvernement actuel, dirigé par le Premier ministre Sato Kilman.
Au cœur de cette affaire : d’importantes sommes d’argent remises sous forme de « prêts » aux élus, qui se sont aussi trouvés avoir soutenu la dernière motion de censure en date dans l’histoire politique agitée de cet archipel mélanésien.

La motion a renversé M. Joe Natuman, alors Premier ministre, qui avait auparavant renversé M. Carcasses par le même procédé de motion de défiance.
Au cours des audiences, M. Carcasses a adopté une stratégie de défense consistant à affirmer que ces « prêts » aux députés (pour un total annoncé à quelque 35 millions de vatu, soit plus de 275.000 euros) provenaient de ses fonds propres et a démenti en bloc toute notion de pot-de-vin.
La Cour en a décidé autrement en reconnaissant tous les accusés coupables des chefs d’accusation portés à leur encontre et en estimant que le versement de ces sommes avait pour vocation principale d’influencer les élus en vue d’un soutien à la motion de censure contre M. Natuman.
La juge Mary Sey, qui entendait l’affaire avait annoncé vendredi qu’elle prononcerait le 22 octobre 2015 les peines associées à ce verdict.
Aux termes de la loi, ces peines pourraient atteindre les dix ans de prison.

Seul élu à avoir échappé à ces peines : un vétéran de la politique locale, Willie Jimmy, qui dès le début des audiences en septembre 2015, avait choisi de plaider coupable et de collaborer avec la justice en tant que témoin, obtenant ainsi une immunité.
Dimanche, au cours d’une conférence de presse, M. Pipite a invoqué le souci de préserver la stabilité nationale, la paix et l’unité à Vanuatu.
Interrogé par la presse, il a aussi fait référence des situations de troubles récents survenus aux îles Salomon, sur l’île de Bougainville (Papouasie-Nouvelle-Guinée) et à Fidji, sans pour autant préciser en quoi le verdict de la Cour Suprême pourrait susciter une situation similaire à Vanuatu.

Dimanche, la grâce prononcée par celui qui se trouvait encore être le Président par intérim a été publiée au Journal Officiel, quelques heures avant le retour dans l’archipel du Président en titre, Baldwin Lonsdale.
M. Lonsdale se trouvait en déplacement à Samoa.

pad

• Document ressource : l’intégralité du jugement prononcé vendredi 9 octobre 2015 par la juge Mary Sey de la Cour Suprême à l’adresse suivante :

https://vanuatudaily.files.wordpress.com/2015/10/criminal-case-73-of-2015.pdf

Rédigé par PAD le Lundi 12 Octobre 2015 à 05:48 | Lu 712 fois